Psychiatre, professeur de médecine légale au CHU de Saint-Étienne, spécialiste des violences, il a été vice-président de la section du Travail au Conseil économique et social dont il est actuellement personnalité associée. Outre ses travaux sur le suicide, il a été l’auteur de rapports sur le harcèlement moral au travail et les maltraitances à personnes âgées.
Membre du Parti socialiste, ancien secrétaire national (Entreprises, Affaires sociales), il a été président honoraire du Comité économique social et culturel du Parti socialiste. Il a été premier secrétaire de la fédération socialiste de la Loire et conseiller régional à la région Rhône-Alpes (1986-1998).
Il a été l’auteur de Le traumatisme du chômage (Éditions de l’Atelier, 2015), Le renouveau démocratique : mettre la santé au coeur du projet politique (Éditions de l’Atelier / Fondation Jean-Jaurès, 2016) et Journal incorrect d’un médecin légiste (Éditions de l’Atelier / Fondation Jean-Jaurès, 2021).
Il a été membre du Conseil d’administration de la Fondation Jean-Jaurès depuis 1992 et trésorier entre décembre 2014 et novembre 2024, jusqu’à son décès.
L’hommage de Jean-Marc Ayrault
Discours prononcé lors des obsèques de Michel Debout à Saint-Étienne, le 26 novembre 2024
Mesdames, Messieurs, chers amis, chère Monique,
Je connaissais Michel Debout depuis 1973, l’année ou il a adhéré au Parti socialiste, nous militions ensemble dans le courant animé par Jean Poperen où nous partagions les mêmes orientations à un moment où la vie interne du Parti socialiste était vivante. Nous avons contribué ensemble à la construction d’un grand Parti socialiste sous la direction de François Mitterrand qui allait jouer dans le cadre du rassemblement de toute la gauche un rôle essentiel dans la victoire du 10 mai 1981. J’ai connu alors à travers Michel Debout une personnalité forte et attachante, profondément engagée dans les combats de la gauche, attachée aux valeurs du socialisme, comme il l’était si fortement à la République, laïque, démocratique et sociale, exigeant pour lui-même mais aussi soucieux que la vie de tous et des plus modestes s’améliore concrètement. J’ai découvert un homme de conviction et de passion qui cherchait constamment à mettre en cohérence ses engagements professionnels de professeur de médecine, de soignant dans tous les sens du terme, et l’engagement citoyen. Il avait le besoin constant d’élever sa pensée et d’agir en conséquence, donnant ainsi un sens à sa vie. S’il a exercé des mandats électifs, conseiller municipal au Chambon-Feugerolles et à Saint-Étienne, conseiller régional à la Région Rhône-Alpes, Michel était avant tout un militant qu’il restera toute sa vie. Tout au long des années qui suivirent, nous avons parcouru nos propres chemins, nous nous sommes vus moins souvent mais c’est à la Fondation Jean-Jaurès que j’ai retrouvé Michel Debout.
Ses combats, il les menait au sein des instances du PS, que ce soit au Conseil national du PS au sein duquel il a siégé entre 1981 et 2000 et du Bureau national où il a siégé de 1988 à 2000, et encore récemment en tant que secrétaire général du Comité économique, social et culturel, poste qu’il assurait depuis 1998. Mais aussi au sein des associations. Très jeune, dès ses études, il a souhaité s’engager dans la vie associative en présidant l’Association générale des étudiants de Lyon puis ensuite tout au long de sa vie en ayant créé ou animé plusieurs associations : Choisir Lyon – Mouvement pour la Liberté de l’avortement et de la contraception, Mouvement Santé Population qui s’engagea pour la transformation de l’Ordre des médecins, Violences au travail Environnement, Loire Prévention Suicide, Bien-être et société mais surtout l’Union nationale de la prévention du suicide. Cette liste impressionnante nous fait dire que Michel avait peut-être compris avant beaucoup d’entre nous l’intérêt de développer de nouvelles formes d’engagement et de mutualiser engagement associatif et syndical et engagement politique, forme d’engagement qui permet d’influer et changer concrètement le cours des choses.
L’influence de Michel a été en effet concrète dans plusieurs des grands combats majeurs récents tels que l’Interruption volontaire de grossesse dont il fut l’un des acteurs nationaux pour l’obtention de ce droit fondamental ou encore la lutte contre le suicide, le « combat de sa vie » pour lequel il a œuvré pour briser les tabous en alertant très vite sur les signaux de détresse et en promouvant des politiques publiques dédiées à la prévention. L’un de ses derniers combats sera celui du droit à mourir dans la dignité pour que la France se dote enfin d’une législation sur la fin de vie. En tant que médecin, il a également apporté un éclairage précieux sur les violences sociétales, et notamment les violences faites aux femmes, et les conditions de travail, enrichissant ainsi ses combats politiques d’une expertise rare et reconnue.
Car oui, Michel jouissait pour son expertise d’un cursus universitaire brillant en médecine à l’université de Lyon qui l’a mené à une fonction de professeur de médecine légale et de droit de la santé dès 1984 au CHU de Saint-Étienne et à assurer de 1980 à 2010 la direction du service de médecine légale du CHU et d’y fonder en 1979 le service d’urgence psychiatrique, particulièrement innovant pour l’époque. C’est d’ailleurs son expertise solide qui l’a amené à siéger comme personnalité qualifiée au Conseil économique, social et environnemental à plusieurs reprises entre 1991 et 2015.
C’est donc à la Fondation Jean-Jaurès, que je préside désormais, que nous nous sommes retrouvés. La Fondation Jean-Jaurès, première fondation politique française crée par Pierre Mauroy et Michel en 1992 et au sein de laquelle il était présent très régulièrement depuis sa création et où il assurait aussi la fonction importante de trésorier depuis 2014. Là encore, peut-être avait-il compris avant beaucoup l’intérêt du débat d’idées et de la confrontation pour faire vivre le clivage voire le créer, au vu du contexte politique actuel traduisant la pauvreté du renouvellement des idées dans le débat s’inspirant des grandes figures du socialisme français. Car Michel était aussi un esprit très fertile et volontariste, je regardais encore récemment la liste de ses différentes productions et de ses notes pour la Fondation, c’est impressionnant, il y en a près d’une cinquantaine. Mais toujours, dans chacune de ses productions, c’était intéressant de saisir sa passion pour le commun, toute démarche qu’il prônait s’inscrivait forcément dans une démarche collective. Encore très récemment, dans son dernier livre, L’Art du rendez-vous, livre dont il était très fier et qu’il m’avait commenté à plusieurs reprises, il attirait l’attention sur l’importance du temps accordé à autrui dans un monde marqué par l’urgence et l’individualisme.
Michel était un humaniste. Au moment où Michel nous quitte, je nous invite à ne pas l’oublier et à faire vivre cet héritage commun qu’il a toujours prôné. À Monique et ses enfants et tous ses proches, j’adresse mes sincères condoléances et l’assurance de mes affectueuses pensées.
N’oublions pas ses combats et l’héritage qu’il nous lègue. Michel était un homme fidèle à ses convictions et à ses idées et c’est pour ces raisons que chacun d’entre nous se souviendra de lui, de sa gentillesse aussi, son sens de l’amitié et de la fraternité.