En mai 2014, pour la huitième fois, les Européens éliront au suffrage universel direct leurs représentants au Parlement européen. Pourra-t-on, à cette occasion, avoir enfin un Parlement paritaire ? Ghislaine Toutain revient, dans cette étude en partenariat avec la FEPS, sur les enjeux de ce vote.
Synthèse :
Les prochaines élections du Parlement européen se dérouleront en mai 2014. Ce sera la huitième fois depuis 1979 que les Européens éliront leurs représentants au niveau de l’Union européenne (UE) au suffrage universel direct. Dans un contexte persistant de crise économique et d’interrogation sur le projet européen, l’un des enjeux des élections de 2014 doit être, avec celle de la croissance, la question de la parité et de l’égalité effective entre les femmes et les hommes dans les vingt-sept Etats membres, facteur de démocratie, de progrès et de confiance en l’avenir.
I- Un peu d’histoire
Depuis 1979, le Parlement européen a acquis au fil des traités, de l’Acte unique au traité de Lisbonne, en passant par ceux de Maastricht, d’Amsterdam et de Nice, des compétences accrues. Avec le temps, il est ainsi passé d’un simple rôle consultatif à un pouvoir de codécision avec le Conseil de l’UE qui représente les Etats membres.
Le Parlement européen est organisé à l’image des parlements nationaux. Les députés ne siègent pas par regroupement national mais au sein de partis politiques transnationaux. Vingt commissions permanentes préparent les travaux des sessions, parmi lesquelles la Commission des droits de la femme et de l’égalité des genres créée en 1984.
II- Le Parlement européen et l’égalité entre les femmes et les hommes
Depuis sa création en 1957, l’Union européenne promeut l’égalité entre les femmes et les hommes. L’article 141 (119) du traité de Rome pose ainsi le principe de l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale. L’égalité entre les femmes et les hommes est également au cœur de la Charte des droits fondamentaux adoptée en 2000.
Les femmes représentent 35 % des députés européens depuis les élections de 2009. Pour la majorité des Etats membres, le pourcentage de femmes siégeant au Parlement européen est plus élevé qu’au sein de leur parlement national, la moyenne étant de 25 %. Notons que depuis 1979, seules deux femmes sur les vingt-neuf présidents qui se sont succédés ont présidé le Parlement européen : Simone Veil de 1979 à 1982 et Nicole Fontaine de 1999 à 2002. Le groupe politique le plus féminisé est celui des Verts/Alliance européenne (51 %), suivi du groupe Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (42 %). Le groupe de l’Alliance progressiste des socialistes et démocrates compte 40 % de femmes, la lanterne rouge revenant au groupe Europe de la liberté et de la démocratie (9 %).
La Commission des droits de la femme et de l’égalité des genres (FEMM), devenue permanente en 1984, est présidée depuis le mois d’octobre 2011 par un homme, le Suédois Mikael Gustafsson. Au fil des années, la FEMM a agi comme un aiguillon au sein du Parlement européen pour favoriser l’égalité et la parité entre les femmes et les hommes à travers la publication de nombreux rapports, l’organisation de débats, d’auditions publiques et de séminaires. L’égalité de traitement et des chances dans la sphère professionnelle est le domaine dans lequel le corpus juridique égalitaire est le plus important mais le faible taux de femmes dans les postes de direction dans la sphère professionnelle et dans le champ politique et administratif, la question de la participation des femmes à la prise de décision politique, celle des violences faites aux femmes comme celle des droits reproductifs sont autant de domaines qui doivent faire l’objet de règlements européens.
III- Le témoignage de Sylvie Guillaume
Sylvie Guillaume est députée européenne et membre de la Commission des droits de la femme et de l’égalité des genres. Elle témoigne ici de l’action de la FEMM au cours de la législature 2009-2014.
Le Parlement européen qui sortira des élections de 2014 peut-il être plus féminisé ? Comment faire ? Que peut faire la Commission des droits des femmes pour y parvenir ?
« Il doit et je l’espère. Cependant, nous n’avons toujours pas atteint la parité, notamment parce que de très nombreuses têtes de listes sont des hommes. Les formations politiques doivent systématiquement présenter des listes paritaires avec une alternance stricte femme-homme. De même, le Parlement a demandé pour la prochaine législature que la prochaine Commission européenne reflète l’équilibre femme-homme et que les Etats membres présentent à la fois une candidate et un candidat ».
Incontestablement, l’existence d’une Commission des droits de la femme et de l’égalité des genres au sein du Parlement européen a joué un rôle important dans l’élaboration d’un corpus juridique égalitaire parmi les plus avancés au monde, si ce n’est le plus avancé. Pour autant, le défi persistant dans l’Union est toujours de faire passer le droit dans les faits. On en est loin, quel que soit le secteur considéré, on l’a vu tout au long de cette étude, malgré les progrès, encore trop limités, accomplis au cours des cinquante dernières années.