Le Conseil constitutionnel est une institution à l’origine contestée, mais est-il toujours contestable ? Si son rôle de protecteur des droits fondamentaux est désormais consacré, le consensus républicain autour du contrôle de constitutionnalité n’est pas total. Notamment du point de vue de sa composition, qui rend l’institution singulière au regard des standards européens, des critiques demeurent et des réformes s’avèrent aujourd’hui indispensables pour faire évoluer substantiellement la justice constitutionnelle en France. Retraçant le chemin parcouru par le Conseil constitutionnel dans le paysage politique et juridique français, Bernard Rullier propose également des pistes à même de le renforcer et de conforter son indépendance et son impartialité.
Table des matières
Introduction
Une institution à l’origine contestée et toujours contestable ?
Le ralliement de la gauche à une institution « politisée »
Le ralliement de la droite à l’exception d’inconstitutionnalité
Le Conseil constitutionnel, juge des élections
Les efforts du Conseil constitutionnel pour devenir une cour constitutionnelle
Une jurisprudence constitutionnelle qui encadre l’action normative de façon croissante
Une plus grande transparence
Un mode de nomination toujours critiqué
Une plus grande déontologie
Le Conseil constitutionnel, rempart de l’État de droit
Le Conseil constitutionnel et l’épidémie de Covid-19
Le Conseil constitutionnel et les retraites
Les propositions pour améliorer la juridiction constitutionnelle
Une composition plus incontestable
Une déontologie renforcée
Un fonctionnement de la procédure constitutionnelle amélioré
Quelles perspectives pour parachever le contrôle de constitutionnalité ?
Propositions pour améliorer la juridiction constitutionnelle
Lors des prochaines nominations en 2025 :
– exiger une compétence juridique ;
– respecter un délai de « viduité » après l’exercice de fonctions gouvernementales ou d’un mandat parlementaire ;
– instituer un appel public à candidature ;
– demander une lettre de motivation des candidats et motiver les propositions des autorités de nomination.
Lors d’une prochaine révision constitutionnelle :
– renommer le Conseil en « Cour constitutionnelle » ;
– intégrer l’obligation d’avoir une compétence juridique pour être nommé ainsi qu’un délai de « viduité » après l’exercice de fonctions gouvernementales ou d’un mandat parlementaire ;
– mettre fin aux membres de droit que sont les anciens présidents de la République ;
– augmenter l’effectif de six membres cooptés, trois nommés, respectivement, par le Conseil d’État, la Cour de cassation et la Cour des comptes, et trois cooptés ;
– instaurer une limite d’âge en fin de mandat (soixante-dix ou soixante-quinze ans).
Insérer, au sein de l’ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel :
– une définition des conflits d’intérêts ;
– les obligations de déport et de récusation ;
– les obligations de déclaration d’intérêt et de situation patrimoniale.
Obliger le membre du Conseil constitutionnel sollicitant un mandat électif à démissionner au préalable (en modifiant le décret n° 59-1292 du 13 novembre 1959 sur les obligations des membres du Conseil constitutionnel).
Donner une base légale à la rémunération des membres du Conseil constitutionnel et instaurer un non-cumul entre la rémunération et une retraite.
Instaurer le principe de l’autonomie budgétaire du Conseil constitutionnel.
Allonger de un mois à trois mois le délai dans lequel le Conseil constitutionnel doit statuer dans le cadre de l’article 61 (contrôle a priori), et à six mois dans le cadre de l’article 61-1 (contrôle a posteriori), afin d’améliorer la motivation de ses décisions.
Renforcer le service juridique du Conseil constitutionnel et affecter à chacun de ses membres une équipe de juristes.
Autoriser la publication des opinions séparées dans les conditions énoncées par la Commission de Venise en 2018.
L’auteur :
Bernard Rullier est enseignant à l’Institut d’études politiques de Paris.