La campagne pour les primaires du Parti Démocrate italien continue et les sondages restent incertains, sur fond de cure d’austérité imposée par le gouvernement Monti, alors qu’en Sicile le PD s’offre une belle victoire aux élections régionales.
La course pour les primaires se poursuit, à la fois sur le terrain et dans les sondages qui évoluent de jour en jour. Si l’institut SWG (qui est, depuis toujours, la référence de la gauche italienne) comptabilise onze points de distance entre Pier Luigi Bersani et Matteo Renzi, l’institut EGM (celui qui avait pronostiqué la victoire de Matteo Renzi à la mairie de Florence en 2009) continue de donner la victoire à ce dernier, devant Pier Luigi Bersani et Nichi Vendola.
Après une période marquée par l’avantage de Matteo Renzi sur Pier Luigi Bersani, le secrétaire du Parti Démocrate (PD), les sondages ont évolué depuis que celui-ci a fait des déclarations sévères sur les réformes du gouvernement Monti. Et surtout depuis qu’a éclaté une polémique sur deux des thèmes au cœur du débat politique italien : l’emploi et les finances publiques. Si sur la question de l’emploi le cas difficile de l’Ilva à Taranto et la montée du chômage obligent les différents candidats à prendre clairement position, sur le thème des finances publiques l’embarras ne cesse de croître. Cet embarras s’explique par les faibles résultats obtenus par Mario Monti en termes de crédibilité des emprunts d’Etat, crédibilité qu’une simple déclaration maladroite pourrait facilement fragiliser. Cela s’est déjà vu : Silvio Berlusconi a ainsi fait chuter le « spread de crédit » à la suite d’une conférence de presse où il annonçait sa volonté de continuer sa carrière politique malgré la décision du Tribunal de Milan.
Si Pier Luigi Bersani continue à soutenir Mario Monti, il considère pourtant que la critique du gouvernement peut être aussi une stratégie de communication efficace, cherchant ainsi à capitaliser sur le mécontentement des Italiens. D’où les efforts du PD et de son secrétaire candidat pour montrer qu’il existe une alternative à la sévère « cure Monti » en vue des élections de 2013.
Dans l’entrefaite, une polémique est née d’un dîner auquel Matteo Renzi a participé en compagnie de personnalités du monde de la finance à Milan, fin octobre. Accusé de dialoguer avec l’ennemi, de faire financer sa campagne électorale par des chefs d’entreprise dont le siège social serait aux Iles Caïman – un argument utilisé par Pier Luigi Bersani et ensuite contesté par Davide Serra, l’organisateur du dîner milanais –, Matteo Renzi a défendu la transparence de sa campagne électorale, confirmé sa volonté de supprimer les financements publics aux partis et s’est engagé avec force dans la deuxième phase de la campagne des primaires. Après une période où la « mise à la casse » (« rottamazione ») des anciens du parti était encouragée, vient maintenant le temps de la preuve par l’exemple. Le maire de Florence dévoile ainsi ses recettes pour administrer le pays, propositions chiffrées et détaillées à l’appui – ce qui, aux dires de ses détracteurs, lui avait fait particulièrement défaut jusqu’à maintenant.
Une chose est sûre : ces primaires font l’objet d’une attention soutenue, tant elles posent la question de la défiance à gauche et du possible changement à droite. En effet, après la condamnation historique de Silvio Berlusconi qui voit – enfin – les magistrats aller jusqu’au bout lors d’un des procès le mettant en cause, la droite italienne vacille et perd du terrain dans les sondages.
C’est ce qu’a clairement démontré le vote en Sicile du dimanche 28 octobre 2012, véritable événement dans la vie politique italienne aujourd’hui. En effet, les élections régionales ont vu la victoire de Rosario Crocetta dans cette région dotée d’un statut spécial et de compétences très particulières. Député européen du PD, celui-ci est aussi le premier maire anti-mafia et un militant gay, qui vit sous escorte depuis des années après sa condamnation à mort par la mafia.
Avec 30,50 % des voix, Rosario Crocetta offre une belle victoire à son parti, saluée avec enthousiasme par les dirigeants du PD. Mais celle-ci cache une réalité plus amère : une abstention d’environ 53 %. Un chiffre alarmant, dans une terre où, malgré tout, le président sortant du Conseil régional – l’homme de droite Gianfranco Micciché, ami de Silvio Berlusconi et mis en examen pour ses liens avec la mafia – obtient un score de 15 % et où le Mouvement des Cinq étoiles du populiste Beppe Grillo atteint, quant à lui, 18,2 %.
Les élections régionales siciliennes sont, pour de nombreux observateurs, un test national. Le défi des primaires est alors d’importance pour la gauche : il lui sera en effet très difficile de faire revenir dans le camp de la coalition de centre-gauche ceux qui se sont tournés ces derniers mois vers l’« antipolitique » et le populisme de Beppe Grillo et qui semblent être, en grande partie, d’anciens électeurs du PD.
Mais rien n’est encore joué. Matteo Renzi et Pier Luigi Bersani continuent, pendant ce temps-là, à s’éviter et le maire de Florence a même défié son principal adversaire dans un duel (à la française).
Ce dernier mois avant la tenue des primaires promet de garder un rythme frénétique.
Située à Taranto, dans les Pouilles, au sud de l’Italie, Ilva est la plus grande aciérie d’Europe et produit un tiers de l’acier italien. L’usine est responsable à elle seule de 92 % des rejets de dioxine en Italie et de près de 9 % des rejets européens. L’air et le sol de Taranto sont contaminés (plomb, nickel, minerai de fer…) et cela fait des années que les habitants respirent ces particules toxiques.
En Italie, les partis reçoivent des fonds de l’Etat sur la base de leurs résultats nationaux.