Le projet politique de Jaurès, cet intellectuel pétri d’humanités classiques, a-t-il battu pavillon de « la science », comme nombre de progressistes du XIXe siècle, pour guider sa vision de l’avenir et fournir une méthode à la question sociale ? L’historienne Anne Rasmussen a répondu à cette interrogation lors d’une conférence organisée par la Fondation et la Société d’études jaurésiennes dans le cadre des Rendez-vous de l’histoire de Blois.
Le XIXe siècle a scellé l’alliance de la science et du politique. De Saint-Simon à Auguste Comte, de Fourier à Marx, les penseurs de la transformation de la société ont conjugué une philosophie de l’histoire et une vision de l’avenir, dont le progrès a constitué une pierre de touche. À la fin du siècle, les intellectuels socialistes puisent dans la référence aux sciences de la nature une inspiration pour élaborer une « science du social ». Toutefois, pour le sociologue Émile Durkheim, condisciple de Jaurès à l’École normale, il revient à la science d’expliquer ce qui est et ce qui a été, sans spéculer sur l’avenir, tandis qu’au socialisme incombe l’idéal, le programme d’une vie collective rêvée et de la reconstruction des sociétés. Comment le projet politique de Jaurès, cet intellectuel pétri d’humanités classiques, formé dans la tradition des Lumières, a-t-il fait écho à cette conversion, qui marque l’entrée dans la démocratie de masse, de « la raison » du XVIIIe siècle, à « la science » du XIXe siècle ? Pour l’auteur des Preuves, développées en défense du capitaine Dreyfus, l’esprit critique, la méthode scientifique et la pédagogie de la raison sont les garants de la recherche de la vérité ; mais ils gagent aussi le projet d’instruction républicaine du plus grand nombre et la solution des questions sociales.
Écoutez la conférence sur le site des Rendez-vous de l’histoire de Blois
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