Les années 1980 sont des années de défi pour les socialistes sensibles à la paix. Arrivés au pouvoir en 1981 après avoir accepté le principe de la dissuasion nucléaire en 19781Pour une compréhension du processus qui y a conduit, cf. Yannick Pincé, Quel « consensus » nucléaire français ?, Fondation Jean-Jaurès, 20 octobre 2022., ils sont immédiatement confrontés à la crise des Euromissiles2La crise des Euromissiles, dernière de la guerre froide, est déclenchée par la dénonciation en 1977 du déploiement de missiles soviétiques SS-20 à moyenne portée, visant l’Europe occidentale. Après l’échec des négociations quant à leur retrait, les États-Unis, en accord avec leurs alliés de l’OTAN, déploient à partir de la fin 1983 des missiles équivalents en Europe de l’Ouest. La crise s’achève en décembre 1987 par la signature du traité de Washington (ou traité FNI, forces nucléaires intermédiaires) entérinant la double option zéro : le retrait complet des armes nucléaires de portée intermédiaire (500 à 5 500 kilomètres). qui génère un important mouvement pacifiste et antinucléaire en Europe. Yannick Pincé, historien et lauréat du Prix de thèse 2023 de l’Institut François Mitterrand, décrypte les enjeux et débats de cette décennie.
Les travaux réalisés sur les débats stratégiques en France après 1981 tendent à assimiler l’attitude du pouvoir et celle de son parti, voire font l’impasse sur un éventuel rôle de ce dernier3Voir par exemple la distinction entre la partie sur « La France dans le monde » et celle sur « Le fonctionnement des institutions, l’opinion et les forces politiques » dans le colloque de 1999 sur « Les années du changement » : Serge Berstein, Pierre Milza et Jean-Louis Bianco (dir.), François Mitterrand, les années du changement 1981-1984, Paris, Perrin, 2001.. Il convient donc de préciser ce qu’il fut et, en particulier, comment le Parti socialiste (PS) a relayé la parole gouvernementale et présidentielle.
Après l’arrivée au pouvoir, le PS maintient une réflexion stratégique, certes moins active que dans les années 1970 avec la commission de la défense et les conventions pour l’Armée nouvelle, mais indispensable afin de résister aux pressions nationales et internationales qui se font sur le parti gouvernemental et présidentiel. L’objectif est de rester en cohérence avec les décisions prises par le pouvoir, fidèle à ses engagements de promotion du désarmement pris alors qu’il était dans l’opposition. Le PS et le pouvoir s’accordent ainsi pour démontrer que le pacifisme n’offre pas la meilleure solution pour garantir la paix si bien que le parti joue un rôle considérable dans la modération du mouvement pacifiste français. Après les élections législatives de 1986, les enjeux se modifient quelque peu car il s’agit d’un retour ambigu à l’opposition puisque François Mitterrand reste président de la République face au gouvernement de droite dirigé par Jacques Chirac.
Un parti de gauche au pouvoir face à la crise des Euromissiles
Une réflexion sur la défense indépendante du pouvoir ?
En 1981, le PS prend soin de s’inscrire dans la filiation des positions exprimées par le président alors qu’il était premier secrétaire. Pour le parti, l’affirmation de sa doctrine de défense repose sur plusieurs textes et prises de parole remontant à des réflexions publiées dans Le Monde par François Mitterrand en 1977, dans lesquelles il développe ses solutions pour le désarmement, et à la convention nationale de janvier 1978 acceptant la dissuasion nucléaire4François Mitterrand, « II- Deux façons d’avancer », Le Monde du 15 décembre 1977. Lionel Jospin, « Pour une conception globale de la sécurité en Europe », dans Pierre Lellouche (dir.), La sécurité de l’Europe dans les années 80, Paris, IFRI, 1980, p. 349.. La doctrine de défense n’est cependant établie qu’à l’occasion de la motion de censure communiste de décembre 1979 contre la double décision de l’OTAN. Celle-ci, prise par les membres du commandement intégré de l’Alliance, prévoit que, face à l’installation de missiles soviétiques SS-20 à l’origine de la crise des Euromissiles, leur retrait soit négocié entre Washington et Moscou et, en cas d’échec, des armes américaines équivalentes doivent être déployées fin 1983 en Europe de l’Ouest. Contrairement au PCF, François Mitterrand, au nom du PS, refuse de condamner la double décision et donc de voter la motion de censure car la France n’en est pas partie prenante puisque Charles de Gaulle l’a retirée du commandement intégré de l’OTAN en 1966. Le premier secrétaire met en avant la volonté de sortir de Yalta, rejette les missiles des deux camps mais pointe le caractère prioritairement menaçant de l’URSS.
Le parti poursuit sa propre réflexion sur les questions stratégiques, distincte parfois des propositions du premier secrétaire et futur président. En effet, Jacques Soppelsa, responsable des questions de désarmement au secrétariat international, réfléchit à un « processus de dénucléarisation de l’Europe du Rhin à l’Oural notamment en gelant le déploiement de missiles euro-stratégiques5Archives socialistes, 70 RI 6, note de Jacques Soppelsa de janvier 1981. », ce qui rejoint les préoccupations des militants pacifistes de plus en plus nombreux en Europe qui refusent le déploiement des missiles américains. La perspective d’une dénucléarisation est en contradiction avec l’attachement de plus en plus fort du futur président à la doctrine de dissuasion nucléaire.
Une fois au pouvoir, il s’agit de faire respecter la discipline de vote des élus socialistes, de soutenir le gouvernement mais aussi et paradoxalement d’éviter une confusion entre les deux. Il faut aussi prendre en compte la volonté de Charles Hernu, ministre de la Défense, de contrôler toute expression ou avis dans son domaine d’attribution afin d’empêcher l’émergence d’un concurrent. La commission de la défense du parti qu’il avait fondée et dirigée continue ses réunions sous la houlette de Jacques Soppelsa. Il lui donne une orientation très nette : respecter les décisions de 1978 mais également la parole présidentielle. En cela, il revendique une cohérence entre les positions du PS au pouvoir et les orientations de François Mitterrand en termes de désarmement prises à la fin des années 1970. Cet attachement à la réflexion sur le désarmement répond également à une autre préoccupation : le souci d’arrondir les angles avec les alliés communistes et l’internationale socialiste (IS)6Archives socialistes, 70 RI 6, réunion de travail sur les problèmes du désarmement, 10 janvier 1983..
La commission de la défense réfléchit à l’articulation entre sécurité et désarmement tout en maintenant le dialogue avec les mouvements pacifistes, en particulier le Mouvement de la paix de sensibilité communiste. Le parti défend le respect des alliances dans l’autonomie de décision, souhaite une défense européenne mais la juge pour le moment peu probable. Selon lui, le risque de guerre avec la querelle des Euromissiles est limité car c’est une lutte de nature politique. L’activité de la commission tend cependant à s’éteindre après le départ de Jacques Soppelsa pour la présidence de la Sorbonne en février 19827« M. Jacques Soppelsa, président de l’université de Paris I », Le Monde, 9 février 1982..
Il ne peut de toute manière qu’y avoir diminution de l’activité après les initiatives constantes de Charles Hernu dans les années 1970 lorsqu’il présidait la commission et les conventions pour l’Armée nouvelle. Il publiait très fréquemment des communiqués de presse et prenait soin de réagir à toute actualité en rapport avec les questions de défense8Cette habitude d’exister en permanence dans la presse est prise dès les années 1960, cf. Jean Guisnel, Charles Hernu ou la République au cœur, Paris, Fayard, 1993, pp. 332-333.. On peut identifier le maintien d’activité par la poursuite de la diffusion du bulletin des conventions9Archives socialistes, CAED « 1983 paix sécurité désarmement, Conventions pour l’armée nouvelle ».. Le rythme est même accéléré. Le contenu, essentiellement informatif, laisse toutefois moins de place à la réflexion. Entre 1978 et 1981, il s’agissait de rendre compte de la recherche stratégique au sein du PS et de critiquer la politique de défense de Valéry Giscard d’Estaing. Après 1981, il y a certes encore des articles de fond mais l’essentiel rend compte du travail des députés socialistes, reproduit des discours ou des prises de parole dans d’autres médias. Il inclut un courrier des lecteurs sans réponses, des comptes-rendus de visite par des membres des conventions comme le site de missiles du plateau d’Albion ou divers rassemblements. Le ton est beaucoup moins incisif. Le 16 mai 1983, une réunion du bureau des conventions suspend leur activité sans pour autant prononcer officiellement leur dissolution. Il apparaît clairement que les conventions ont perdu leur rôle d’innovation dans la pensée stratégique socialiste puisque, selon Jean Paucot, « le ministre pense comme le Président et le Président ne tolère pas que l’on pense autrement10Archives socialistes, CAED, « 1983 paix sécurité désarmement, Conventions pour l’armée nouvelle », compte-rendu de la réunion du bureau des conventions pour l’Armée nouvelle, le 16 mai 1983. ».
Le PS soumis à une pression internationale
Le PS au pouvoir est soumis à des pressions extérieures qui veulent influencer indirectement les positions du gouvernement et de la présidence de la République. Dès la victoire de 1981, le parti est destinataire d’une lettre du comité central du Parti communiste d’Union soviétique en faveur des postions de Moscou dans les négociations de Genève à propos des Euromissiles11« Le comité central du PC soviétique a adressé une lettre à tous les partis socialistes d’Europe sur le problème des euromissiles », Le Monde, 23 mai 1981.. À ce propos, les Soviétiques entretiennent des contacts réguliers avec les dirigeants de la gauche européenne, notamment Willy Brandt en raison de sa double casquette à la tête de l’IS et du SPD.
L’objectif est de souligner la singularité de la position des partis de la sphère socialiste et sociale-démocrate qui ne prendraient pas cette orientation. En réalité, les partis socialistes des pays membres de l’Alliance atlantique sont fracturés entre ceux qui rejettent la mise en œuvre de la double décision (Norvège, Danemark, Pays-Bas, Luxembourg, RFA, Royaume-Uni et Belges flamands) réunis dans le groupe Scandilux et les autres (France, Italie, Espagne, Portugal et Belges wallons)12Jérôme Dupuis et Maryvonne Prévot (dir.), Pierre Mauroy, passeur d’avenirs ?, Lille, Septentrion, 2020, p. 186 ; Bernd Rother, Willy Brandts Aussenpolitik, Berlin, Springer, 2014, p. 310 ; Archives socialistes, CAED « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 17 septembre 1986.. Les Français forment d’ailleurs avec ces derniers en 1984 un groupe concurrent nommé Eurosud13Pascal Boniface en est l’initiateur, cf. entretien téléphonique, 2 septembre 2021.. Alors que les partis nordiques reprochent aux Français de refuser de voir leurs forces nucléaires prises en compte dans les négociations de Genève, la politique de défense de ces derniers est défendue par leurs camarades d’Europe du Sud14Archives socialistes, 70 RI 22, compte-rendu manuscrit de la rencontre PS-PSI-PSDI-PSOE-PSP-PSB du 5 janvier 1984. Cf. également Jérôme Dupuis et Maryvonne Prévot (dir.), Pierre Mauroy passeur d’avenirs ?, op. cit. p. 186 ; Bernd Rother, Willy Brandts Aussenpolitik, op. cit., p. 310 ; Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 17 septembre 1986..
Cette pression est accentuée en juin 1982 par la publication des conclusions du rapport de la commission indépendante sur les problèmes de désarmement et de sécurité dirigée par Olof Palme, président du Parti social-démocrate suédois. Il propose l’interdiction complète des essais nucléaires et des armes chimiques et l’adhésion de tous les États au traité de non-prolifération de 1968, refusée par la France jusqu’en 1992. Il souhaite une « prise en considération » des armes nucléaires françaises et britanniques dans les négociations, ce qui est inacceptable pour Paris et Londres qui revendiquent l’indépendance de leur armement nucléaire15Jonathan Power, « Palme’s report », The New York Times, 2 juin 1982..
« Paix, sécurité et désarmement »
Les conclusions de la commission Palme sont publiées à la veille du sommet du G7 de Versailles et de la deuxième session extraordinaire des Nations unies pour le désarmement. Ce contexte est propice à une mobilisation d’organisations pacifistes liées au PCF le 20 juin 1982. Dans ces conditions, le PS se doit de réagir. Le secrétariat à l’international, dirigé par Jacques Huntzinger depuis 198116Jacques Huntzinger est un juriste spécialiste des questions de relations internationales et de désarmement. Il entame une carrière de diplomate à la fin des années 1980., prépare un argumentaire et un plan pour le désarmement, en somme un document capable de défendre la position gouvernementale tout en la présentant comme le meilleur moyen de garantir la paix, électorat de gauche oblige.
Le document se présente sous la forme d’une brochure, intitulée Paix, sécurité et désarmement17Brochure du PS, Paix, sécurité et désarmement, 25 mai 1982., adoptée par le comité exécutif le 25 mai 1982 et dont Pascal Boniface est le principal rédacteur. Il devient un texte de référence pour la direction et les militants dans le contexte de la crise des Euromissiles18Brochure du PS, Paix, sécurité et désarmement, 25 mai 1982 ; entretien téléphonique avec Pascal Boniface, 2 septembre 2021.. C’est un document de réponse au mouvement pacifiste mais aussi aux pressions qui s’exercent depuis l’IS et plusieurs partis de la gauche européenne, tous engagés dans la contestation de la mise en œuvre de la double décision :
« Mais l’histoire nous a appris que le pacifisme ne garantit pas la paix. Or, ce qui est en cause, c’est la paix. Il ne suffit pas de crier son horreur de la guerre pour obtenir la paix. Il faut créer les conditions de celle-ci, il faut la construire sans relâche. Une action pour la paix ne peut se confondre avec de simples attitudes pacifistes qui ne tiendraient pas compte de la réalité des armements accumulés par les grandes puissances, et des dangers de déséquilibre en Europe.19Brochure du PS, Paix, sécurité et désarmement, 25 mai 1982. »
Le PS répond aussi aux militants inquiets des orientations du pouvoir que la meilleure voie vers la paix n’est pas l’adoption de mesures unilatérales. L’idée est, conformément aux positions du président, de distinguer le pacifisme de la paix20Entretien téléphonique avec Pascal Boniface, 2 septembre 2021.. Celle-ci se défend par la sécurité collective qui doit permettre de sortir de la logique des blocs, toujours dénoncée par le PS. Ainsi, le Bureau exécutif du parti maintient sa mise en avant de toutes les négociations engagées. Ceci reflète l’état d’esprit qui prévaut au PS depuis 1978-1979 puisque la responsabilité soviétique est mise en avant : « l’URSS a créé un déséquilibre entre les deux alliances en Europe ». Surtout, la décision socialiste de 1978 d’adopter la dissuasion est réaffirmée.
La brochure Paix, sécurité et désarmement prend également soin de souhaiter la création d’un fond du désarmement pour le développement, en adéquation avec certaines orientations tiers-mondistes du PS et du pouvoir. François Mitterrand défend cette orientation et propose à la tribune de l’ONU le 28 septembre 1983 une conférence des puissances nucléaires afin d’établir clairement le lien désarmement/développement21Georges Saunier et Philippe Vial (dir.), La France et sa défense. Paroles publiques d’un président – 1981-1995, Paris, Nouveau Monde éditions, 2015, pp. 110 et 113-114..
La brochure Paix, sécurité et désarmement est utilisée afin de répondre aux protestations de militants pacifistes antinucléaires qui s’adressent au PS pour dénoncer la politique du pouvoir. Tout courrier reçoit une réponse accompagnée du document. Pascal Boniface et Jacques Huntzinger sont parfois soucieux d’adresser une lettre personnalisée, notamment lorsqu’une personne estime que la question posée à son premier courrier n’a pas reçu les éclaircissements attendus. Une attention toute particulière est portée aux membres du parti22Archives socialistes, 70 RI 8, courriers de particuliers et associations à propos du désarmement, 1983-1984.. La brochure et cette attention pour les courriers témoignent bien d’une volonté de la part du PS de démontrer en quoi cette politique ne sacrifie pas l’engagement en faveur du désarmement mais représente réellement une politique de paix.
Jacques Huntzinger garde ainsi une main tendue vers les partis de gauche européens gagnés par le pacifisme et vers les militants français. Chez les socialistes et sociaux-démocrates européens, il reconnaît une analyse de qualité et voit, dans leur approche européenne des questions de sécurité, l’embryon d’une réflexion sur l’identité européenne23« Défense : le PS sur la sellette de l’Internationale socialiste », Le Quotidien de Paris, 24 novembre 1983.. Pour cette raison, il estime qu’il faut adopter face à la mouvance pacifiste une attitude équilibrée qu’il qualifie de « ni manichéisme, ni naïveté24« Jacques Huntzinger : “Ni manichéisme, ni naïveté” », PS aujourd’hui, 18 octobre 1983. ». Ce dernier aspect devient la position officielle du PS à l’égard du mouvement pacifiste au congrès de Bourg-en-Bresse le 30 octobre 198325Patrick Jarreau, « La position des principales familles politiques. Un consensus dont le PCF s’exclut », Le Monde, 21 novembre 1983.. S’exprime donc la volonté constante de ménager les tendances pacifistes de la gauche et de convaincre que la politique choisie est la seule réaliste pour garantir la paix, rechercher l’équilibre au plus bas niveau possible, y compris par le déploiement des missiles américains, avant de pouvoir réaliser un vrai désarmement et de sortir de Yalta.
Une cohérence avec la politique de désarmement du gouvernement
Cet affichage ne peut fonctionner que si les propos du parti au pouvoir sont en adéquation avec les actes du gouvernement qu’il défend. Il a l’occasion de le prouver puisque les débuts de la présidence Mitterrand sont marqués par des initiatives multilatérales qui visent à encourager le désarmement. Les positions défendues par la France sont dans la continuité de celles qui l’étaient par Giscard, en particulier pour défendre la réunion d’une conférence pour le désarmement en Europe (CDE) à la Conférence sur la sécurité et la coopération en Europe (CSCE) de Madrid qui aboutit à un mandat de convocation de ce forum pour 1984 à Stockholm26Jacques Amalric, « Les coulisses de Stockholm », Le Monde, 15 et 16 janvier 1984.. Autre forum multilatéral, le 7 juin 1982 s’ouvre la deuxième session extraordinaire des Nations unies pour le désarmement. La France y défend l’appel à la CDE, l’achèvement de la création de l’Institut des Nations unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR) et celle d’une agence internationale de satellites de contrôle. Ce dernier projet suscite cependant l’abstention des deux grands 27Archives socialistes, 8 FP 8, carton 4 « Pontillon défense et sécurité », fiche « Agence internationale de satellites de contrôle » réalisée par Benoît d’Aboville, ministère des Relations extérieures, direction des affaires politiques, service des affaires stratégiques et du désarmement, sous-direction du désarmement, 13 mai 1982.. Voulue par Giscard, la France maintient son soutien et sa participation active au comité du désarmement de Genève mais souhaite son élargissement à d’autres États. Lors de son discours devant la session extraordinaire des Nations unies, Claude Cheysson, ministre des Relations extérieures, établit un catalogue de ces propositions qui figurent également dans la brochure des socialistes français. Cette session extraordinaire se termine par un constat d’échec et n’aboutit même pas à un document commun28Paul Tavernier, « L’année des Nations unies, 1er janvier 1982 – 21 décembre 1982, questions juridiques », Annuaire français de droit international, Paris, CNRS, 1982, p. 664.. Néanmoins, après le lancement de la CDE, l’UNIDIR reçoit ses statuts de l’Assemblée générale le 17 décembre 1984. La cohérence politique avec le parti reste complète, quelques succès peuvent être affichés.
L’effet modérateur du PS sur le mouvement pacifiste français
L’arrivée du PS au pouvoir a un effet paralysant sur le mouvement antinucléaire. Avant 1981, la lutte se place avant tout sur le terrain de l’opposition entre la gauche et la droite avec la mobilisation d’élus locaux contre la construction de centrales nucléaires. La conversion du PS à la dissuasion en 1978 et la bienveillance à son égard de nombreuses forces militantes, dans les milieux écologistes et les syndicats hostiles au nucléaire, privent cette contestation de relais politique29Michel Dobry, « Le jeu du consensus », Pouvoirs, septembre 1986, p. 64 ; Sezin Topçu, La France nucléaire. L’art de gouverner une technologie contestée, Paris, Seuil, 2013, p. 121 ; cf. également Martin Siloret, « L’émergence partisane des écologistes français (1984-1988) », dans Georges Saunier (dir.), Mitterrand, les années d’alternances, 1984-1986 et 1986-1988, Paris, Nouveau Monde, 2019, p. 841..
Ainsi, les sympathisants de la gauche antinucléaire font passer en priorité leur soutien au nouveau pouvoir avant leurs préoccupations contre l’atome30Nicole Gnesotto, « La France, fille aînée de l’Alliance ? », dans Pierre Lellouche (dir.), Pacifisme et dissuasion, op. cit., p. 276.. Le radical Michel Crépeau, candidat à la présidentielle en 1981, renonce à son opposition antinucléaire pour devenir ministre de l’Environnement. Signe de son peu d’importance, le ministère est supprimé pour un secrétariat d’État le 22 mars 1983, dirigé par Huguette Bouchardeau, elle-même ancienne candidate antinucléaire pour le Parti socialiste unifié (PSU)31Dans le souci de transparence de la réflexion sur les grands projets publics portés par la contestation antinucléaire des années 1970, elle porte la loi du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l’environnement. L’intégration de Michel Crépeau puis d’Huguette Bouchardeau symbolisent la démarche socialiste de canalisation de la critique antinucléaire en l’associant à diverses structures d’information et d’expertise sur les grands projets et installations nucléaires, cf. Sezin Topçu, La France nucléaire, op. cit., pp. 122-133.. Le PS reçoit assez peu de lettres de protestations quant à sa politique internationale en faveur de l’installation de nouveaux missiles américains en Europe de l’Ouest32Archives socialistes, 70 RI 8, courriers de particuliers et associations à propos du désarmement, 1983-1984.. Les prises de position de François Mitterrand au Bundestag et à l’Hôtel de ville de Bruxelles en 1983 en faveur de ces armes ne peuvent qu’avoir un poids auprès des militants et sympathisants33À Bruxelles, il déclare : « Le pacifisme, il est à l’Ouest, et les euromissiles ils sont à l’Est », cf. Bernard Brigouleix, « M. Mitterrand exhorte les Occidentaux à rester résolus sur les euromissiles », Le Monde, 14 octobre 1983..
Ceci correspond à l’attitude du PS qui assume faire corps avec la doctrine française au moment où il publie sa brochure Paix, sécurité et désarmement. Les socialistes estiment avoir réussi les évolutions conduites depuis les années 1970 puisque, selon Lionel Jospin, premier secrétaire depuis 1981, un « consensus » est mis en place autour d’une politique de défense qui rassemble la politique de la France et celle du parti, approuvées par l’ensemble des Français34Jean-Luc Mano, « Un document du PS. La paix, la sécurité et le désarmement », L’Humanité, 3 juin 1982..
En plus du rôle modérateur du PS, la faiblesse du mouvement pacifiste français s’explique par l’absence d’un fer de lance politique puissant et non communiste, à la différence des pays d’Europe du Nord où la contestation contre les missiles a pris une grande ampleur35Dans Pierre Lellouche (dir.), Pacifisme et dissuasion, op. cit. : Alfred van Staden, « Pays-Bas et Belgique : la tentation neutraliste », pp. 94-95, Ingemar Dorfer, « La Scandinavie ou la défense de la virginité nucléaire », pp. 107-139, Jean-François Bureau, « La contestation des armes nucléaires et les partis politiques en Europe de l’Ouest », p. 189. La section du PS aux Pays-Bas est favorable au mouvement pacifiste en raison de son ampleur, cf. Archives socialistes, 70 RI 6, document dactylographié du groupe désarmement de la section PS des Pays-Bas, mars 1982.. L’absence de soutien de la part du parti majeur et central de la gauche française révèle le manque d’un lien possible entre les diverses composantes du mouvement pacifiste. Seul le PS détient la clé d’une éventuelle union entre la mouvance procommuniste, la nébuleuse de mouvements écologistes mais aussi d’extrême gauche et la « deuxième gauche » antinucléaire36Jean-François Bureau, « La contestation des armes nucléaires et les partis politiques en Europe de l’Ouest », art. cit., pp. 195-196.. On retrouve cette situation d’un parti socialiste au pouvoir et d’un mouvement pacifiste dans l’Espagne de Felipe Gonzalez et en Italie où le Parti socialiste italien (PSI) et le Parti social-démocrate appartiennent à la coalition au pouvoir depuis 1979. Bettino Craxi, chef du PSI, en prend la tête en devenant chef du gouvernement en août 1983.
Cette attitude commune à ces trois États est également un frein à la volonté soviétique d’établir des liens avec la gauche socialiste et social-démocrate européenne pour faire échec à la double décision. En novembre 1983, au lendemain du déploiement des premiers missiles en RFA, le bureau de l’IS se réunit à Bruxelles37Patrice Buffotot et Maurice Vaïsse, « La politique de défense de François Mitterrand pendant les trois gouvernements Mauroy, 21 mai 1981 – 17 juillet 1984 », Serge Berstein, Pierre Milza et Jean-Louis Bianco (dir.), François Mitterrand, les années du changement, op. cit., p. 188.. Tous les observateurs s’attendent à de lourdes difficultés qui mettraient les socialistes français sur la sellette38« Défense : le PS sur la sellette de l’Internationale socialiste », Le Quotidien de Paris, 24 novembre 1983.. Or, parce qu’ils ne sont pas isolés, que le déploiement a déjà commencé et que les négociations de Genève ont échoué, l’heure n’est plus à se déchirer39Claire Tréan, « L’accord s’est fait sur un texte ambigu », Le Monde, 26 novembre 1983..
La poursuite de la réflexion stratégique au PS en accord avec la fidélité aux engagements de promotion du désarmement qu’appliquent effectivement tant le président que le gouvernement assure la crédibilité de la parole du parti tant comme soutien du pouvoir que comme partenaire des défenseurs de la paix. Les militants pacifistes français sont sensibles à la parole du mouvement majoritaire pour lequel ils ont, pour la plupart, voté lors des élections de 1981. Dans ce sens, la présence au pouvoir du principal parti de gauche acquis à une politique de fermeté face à l’URSS sans renier ses engagements de désarmement constitue un puissant facteur modérateur de la mobilisation contre la double décision.
Cohabitation et règlement de la crise des Euromissiles
Après les élections de 1986, le PS entame une opposition bien particulière dont le chef est, en réalité, le président de la République, lequel entretient le plus tard possible le suspense à propos d’une candidature pour sa réélection40La déclaration de candidature est finalement faite le 22 mars 1988 au journal télévisé d’Antenne 2, soit à peine un mois avant le premier tour, le 24 avril.. Cette incertitude ainsi que la volonté de jouer son rôle de formation d’opposition interrogent sur l’attitude à adopter pour le PS. Il choisit de privilégier l’idée de « consensus » sur les questions de défense autour de la personnalité du président de la République pour subtilement mettre à mal les volontés de réorientation stratégique de la droite, dénoncer chez elle une posture politicienne et, à l’inverse, adopter une position de « juste milieu ».
Seule la parole de l’Élysée compte
Le parti s’appuie sur son puissant groupe à l’Assemblée nationale dirigé par Pierre Joxe pour lequel Pascal Boniface effectue le travail d’analyse stratégique en liaison avec l’Élysée41Entretien téléphonique avec Pascal Boniface, 2 septembre 2021.. Hormis ce dernier, la réflexion en matière de défense s’assèche au sein du PS. Elle est normalement assurée par le secrétariat à l’international depuis la mise en sommeil de la commission de la défense et des conventions pour l’Armée nouvelle en 1983. Avec Louis Le Pensec à la tête de ce secrétariat depuis le congrès de Toulouse en octobre 1985, plus aucune structure n’en a la responsabilité exclusive42« Comité directeur du 16 octobre 1985 », PS info, 26 octobre 1985.. Les têtes pensantes de la commission de la défense des années 1970 sont, après un passage par le cabinet de Charles Hernu, parties vers d’autres horizons43François Cailleteau prend la direction financière et des affaires juridiques du ministère de la Défense en 1983. En 1984, Jean-François Dubos est nommé au Conseil d’État et François Heisbourg devient directeur international de Thomson-CSF, cf. Jean Guisnel, Charles Hernu, ou la République au cœur, op. cit., pp. 504-505.. Le document officiel du PS adopté le 21 octobre 1987 pour renouveler la brochure Paix, sécurité et désarmement, réalisé par un « groupe de travail » animé par Gérard Fuchs, rocardien et député de Paris, témoigne d’un certain renouvellement des spécialistes des questions de défense au PS44On y trouve Edwige Avice, Catherine Lalumière, Pascal Boniface, Jean-Michel Boucheron, Pierre Guidoni, Gilles Martinet et Robert Pontillon. Cf. Archives socialistes, CAED 1987-1989, « Réflexions sur la sécurité européenne », texte adopté en bureau exécutif du 21 octobre 1987.. Renouvellement limité car une « liste des experts en matière de défense » qui œuvrent pour le parti, réalisée par Pascal Boniface en mars 1988 avec leurs coordonnées, ne comprend que cinq noms : Hubert Védrine, pour lequel il est mentionné « Élysée », figure en tête, unique personnalité proposée pour « les problèmes Est-Ouest45Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Liste des experts en matière de défense », 8 mars 1988. Dans « Sur les problèmes de personnel ou de service national » sont mentionnés Guy-Michel Chauveau, député de la Sarthe et François Cailleteau devenu contrôleur général des Armées. « Sur les problèmes financiers », il s’agit de Frédéric Tiberghien, membre des requêtes au conseil d’État, et de Patrick Careil qui fut directeur de cabinet de Charles Hernu. Enfin, dans « Sur l’ensemble de ces problèmes », c’est Jean-François Dubos, ancien directeur adjoint du cabinet de Charles Hernu, qui est mentionné. ».
Même si cela paraît naturel, la conformité des choix du PS avec la présidence de la République n’est pas automatique. Les débats que suscite chez les socialistes le budget de la défense en 1987, premier d’une nouvelle loi de programmation militaire à adopter au printemps suivant, en témoignent. À première vue, les orientations exprimées par ce budget « satisfont le président de la République et, donc, le PS46Jean-Louis Andréani, « Le saute-mouton des socialistes », Le Monde, 14 novembre 1986. ». D’ailleurs, dès les annonces du conseil des ministres, le 5 novembre 1986, le bureau exécutif du PS estime que l’approbation du budget puis de la loi de programmation va de soi. Les principaux responsables du parti, anciens ministres comme Charles Hernu, Paul Quilès, Jean-Pierre Chevènement, Louis Mermaz, et les chefs de file des principales tendances s’expriment dans ce sens. Mais des réticences apparaissent à la base du parti, relayées par Pierre Mauroy, Lionel Jospin, le premier secrétaire, et André Laignel, député de l’Indre et trésorier du PS. Les raisons avancées sont en réalité politiques. En effet, un groupe minoritaire de députés met en avant le symbole que représente la nette progression de la hiérarchie budgétaire en faveur de la défense, faisant passer l’éducation au deuxième rang. La base ne comprend pas l’approbation d’un budget voulu par la droite et estime que l’opposition doit remplir son rôle. Par compromis et malgré le souhait de 80% des députés socialistes d’approuver les crédits, le groupe parlementaire à l’Assemblée nationale s’accorde pour s’abstenir lors de ce vote. Pierre Joxe insiste bien auprès de ses collègues sur la nécessité d’oublier l’argument du regret de l’abandon de la priorité budgétaire en faveur de l’éducation, car ce serait « opposer inutilement enseignants et militaires » et donc effacer les bénéfices du travail effectué par le PS depuis que Charles Hernu parle de consensus, c’est-à-dire quasiment depuis Épinay47Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, non datée, sans doute le 12 novembre 1987..
En vue de faire évoluer la position du parti pour l’élection présidentielle de 1988, Lionel Jospin, sous la pression d’une mobilisation des États du Pacifique après l’affaire du Rainbow Warrior, s’interroge sur la continuité des essais nucléaires48Lionel Jospin, « Comité directeur du 15 novembre 1986 », PS info, 22 novembre 1986.. Après un rappel à l’ordre de l’Élysée, le texte adopté au congrès de Lille en avril 1987 est l’expression de la volonté de François Mitterrand de poursuivre les essais nucléaires49Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « La défense dans les contributions nationales pour le Congrès de Lille », note de Pascal Boniface pour Pierre Joxe, 29 janvier 1987.. Signe de l’atonie de la réflexion stratégique au sein du PS, Jean-Michel Boucheron, député chargé des questions de défense, s’exprime en comité directeur du parti pour relayer scrupuleusement les prises de position du président50Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Éléments d’intervention de Jean-Michel Boucheron. Responsable des questions de défense au sein du groupe socialiste de l’Assemblée nationale », 10 mai 1987..
Le problème pour le PS est que le président maintient le suspense sur sa future candidature, ce qui ne doit donc pas interdire une réflexion sur tous les sujets y compris le domaine militaire, dans le but de préparer un programme et éventuellement désigner un candidat. Dans ces conditions, Pierre Mauroy demande en réunion de groupe à l’Assemblée nationale l’organisation d’une nouvelle convention nationale sur la défense dans la perspective de la présidentielle51Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 2 avril 1987., voire pour faire un « bilan critique52Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Avant-projet pour l’organisation d’une Convention nationale du PS sur la défense » réalisé par Pascal Boniface pour Pierre Joxe, 11 juin 1987. ». Pascal Boniface s’en inquiète et estime que cela risque de faire apparaître des divergences avec la présidence de la République. Il parvient ainsi à en renvoyer le projet pour l’après-présidentielle : la convention de 1978 ayant approuvé la dissuasion reste définitivement la seule et unique. La réflexion stratégique est ainsi inhibée pour préparer la candidature de François Mitterrand. Dans ces conditions, à quoi sert le PS au plan de la réflexion stratégique ? A-t-il une utilité aux côtés du président candidat virtuel, chef des armées et de l’opposition ?
Le relais de la parole présidentielle
Le PS n’a donc d’autre choix que d’assurer un rôle de relais politique de la parole présidentielle. La nouvelle position officielle du parti sur les questions militaires adoptée en octobre 1987 à l’approche du débat présidentiel renouvelle ainsi la brochure Paix, sécurité et désarmement de 1982 et intègre l’action de François Mitterrand sous le titre Réflexions sur la sécurité européenne.
Par rapport au document de 1982, les trois mots d’ordre sont repris, signe que les objectifs restent inchangés : « la dissuasion nucléaire demeure une nécessité » pour garantir la paix et l’indépendance ; « le désarmement est souhaitable mais n’est pas une fin en soi ». La défense reste une contrainte nécessaire tant que l’Europe n’est pas sortie de Yalta. Il ne s’agit plus tant de s’adresser aux milieux de gauche sensibles au pacifisme, comme en 1982, que de conforter les orientations de François Mitterrand en les opposant à la droite au pouvoir. Pour la première fois, un texte socialiste destiné à une diffusion publique se lance dans une explication assez détaillée des doctrines stratégiques en défendant le principe d’une dissuasion basée sur la menace de représailles massives alors que certaines personnalités de droite, notamment le ministre de la Défense André Giraud, souhaiteraient se rapprocher de la stratégie de l’OTAN de riposte graduée. Beaucoup sont également hostiles au règlement de la crise des Euromissiles par le retrait, en cours de négociation pour être signé en décembre 1987, de tous les missiles intermédiaires qui laisseraient une Europe dénucléarisée vulnérable face aux chars soviétiques.
En pleine dispute internationale sur les Euromissiles, le texte de 1982 accordait une large place aux processus de discussion entre Américains et Soviétiques, mais aussi à ceux qui relèvent de la sécurité collective. Désormais, ce sont les voies de la sécurité européenne et de la réussite du démantèlement des Euromissiles qui ont la faveur des socialistes tel que l’affirme François Mitterrand, dans la fidélité à toutes ses positions prises depuis le début de la crise.
Un rôle tampon face à la gauche européenne
Le PS assure également le service après-vente des décisions présidentielles. Il est ainsi toujours sollicité par des organisations pacifistes, non plus à propos de l’acceptation de l’arme nucléaire, signe d’évolution, mais en raison de demandes d’arrêt des essais. Dans ce but, Pascal Boniface prépare un argumentaire renvoyé aux auteurs de courriers de protestation. Son objectif : démontrer leur innocuité pour l’environnement, avec avis d’experts et inspections internationales, leur légalité en termes de droit international et leur nécessité stratégique pour garantir la dissuasion nucléaire, la sécurité nationale, ensemble approuvé dans la loi de programmation militaire votée en 1983 par les socialistes et les communistes53Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », lettre de Claude Panne, président du mouvement de la paix de la Drôme, au président de la République, au président de l’Assemblée nationale, au « chef du gouvernement », au « ministre de la guerre » et aux présidents des groupes parlementaires du 26 octobre 1987. Réponse de Pierre Joxe du 24 novembre 1987. Note de Pascal Boniface à propos des essais nucléaires, 23 décembre 1986..
Une autre pression toujours subie par le PS est celle des partis de gauche européens qui se sont engagés contre la double décision et font preuve de défiance vis-à-vis du nucléaire français. Lionel Jospin est conscient que ce sentiment encore fort en Europe pourrait se diffuser chez les Français, particulièrement ceux de sensibilité de gauche54Lionel Jospin, « Comité directeur du 15 novembre 1986 », art. cit.. D’où l’importance de procéder comme vis-à-vis des critiques des pacifistes en 1982-1983 : les prendre en compte, les respecter mais répondre avec une solide argumentation tout en restant ouvert à toutes les propositions de dialogue. Ainsi, à partir de mars 1985, les groupes séparés des partis socialistes des pays membres de l’OTAN – Scandilux réservé sur le nucléaire stratégique et Eurosud qui l’accepte – décident-ils de se retrouver régulièrement pour rapprocher leurs vues55Bernd Rother, Willy Brandts Aussenpolitik, op. cit., p. 310. Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 17 septembre 1986. « La querelle disparaît » selon Pascal Boniface, entretien téléphonique, 2 septembre 2021..
La tâche est néanmoins difficile avec les Danois, les Belges flamands et surtout le Labour de Neil Kinnock qui, fin 1986, renforce sa critique antinucléaire. Non seulement il prône l’abandon de l’énergie atomique, mais en outre il s’engage en faveur du désarmement unilatéral du Royaume-Uni et du démantèlement de toutes les bases nucléaires américaines présentes sur son territoire56« Les travaillistes se prononcent pour l’abandon total du nucléaire », Le Monde, 5 septembre 1985 ; « M. Neil Kinnock se prononce pour la fermeture des bases nucléaires américaines », Le Monde, 30 septembre 1986.. En effet, un gouvernement travailliste, s’il accédait au pouvoir, accepterait alors une prise en compte de ses armes nucléaires dans les négociations Est Ouest. Le PS cherche à faire avancer une solution intermédiaire qui consisterait à s’associer à la France pour développer ensemble le successeur du missile M4 et éviter le risque de dénucléarisation du partenaire britannique. Il veut surtout réduire cette pression de la part d’un parti ami qui critique dans les forums internationaux une forme de militarisme et de dérive nucléaire des socialistes français57Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Rencontre Labour Party / PS – Londres le 23 /10 », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 30 octobre 1986.. Pascal Boniface doit même, lors d’une rencontre internationale des partis socialistes le 16 février 1987, menacer le Labour d’attaques publiques de la part de responsables du PS pour démontrer, si leurs critiques ne cessent pas, son irresponsabilité en politique de défense58Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Réunion du SIDAC (Socialist International Desarmement Advisory Council) du 16 février 1987 à Helsinki », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 18 février 1987..
Ainsi, l’attitude de fermeté du PS, aidée par l’évolution de l’actualité stratégique en Europe, lui permet de désamorcer progressivement cette menace politique. Il constate un affaiblissement du soutien des partenaires socialistes européens aux mouvements pacifistes. Lors d’une réunion à Vienne le 28 novembre 1986, le représentant suisse salue le fait que les socialistes français n’aient pas changé leur politique fondée sur le nucléaire stratégique malgré leur passage dans l’opposition. Même si les partis réservés sur le nucléaire continuent de considérer les socialistes français comme militaristes59Leur défiance à la politique nucléaire des socialistes français est confortée par le scandale du Rainbow Warrior et par l’affaire Luchaire, une vente d’obus secrète à l’Iran dans laquelle le cabinet de Charles Hernu est impliqué, cf. Gilles Gaetner, « 1987 : l’affaire Luchaire », L’Express, 30 mars 1995., ils sont confrontés, avec gêne, à la réussite de la double décision qui a permis la relance des négociations entre Moscou et Washington pour concrétiser le démantèlement de tous les missiles de portée intermédiaire en Europe (double option zéro). La majorité des partis socialistes qui se sont montrés méfiants finit par reconnaître le caractère purement défensif de l’arsenal français60Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Réunion Scandilux des 26 et 27 janvier 1988 », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 29 février 1988.. Voilà le fruit d’un travail de contact et d’explication conduit par le PS et personnellement par Pascal Boniface auprès de responsables politiques identifiés à l’intérieur de ces partis comme sensibles aux positions françaises61Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 30 juin 1987..
Le parti du « consensus » autour du président
Le débat sur une nouvelle loi de programmation militaire 1987-1991 met en scène un consensus autour des orientations du président de la République qui auraient été imposées au gouvernement et à la majorité parlementaire malgré leurs velléités d’inflexion stratégique. Il convient donc, pour les députés socialistes, de maintenir la ligne déterminée par Pascal Boniface et Pierre Joxe au moment du vote du budget 1987 : saluer le consensus autour des orientations de François Mitterrand soutenu par le PS, parti responsable sur les questions de défense contrairement à la droite qui vote contre les budgets entre 1981 et 198662À l’exception près de l’UDF pour le budget 1982, cf. Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Argumentaire loi de programmation militaire » réalisé par Pascal Boniface, 25 mai 1987..
Les interventions des députés socialistes démontrent la conformité de cette loi avec les orientations du président de la République et affichent même un certain attachement au « gaullisme63Journal officiel, Assemblée nationale, compte-rendu de la 1ère séance du jeudi 9 avril 1987, intervention de Jean-Michel Boucheron. ». Paul Quilès, ministre de la Défense en 1985-1986 après l’affaire du Rainbow Warrior, s’attache surtout à montrer la poursuite des programmes engagés par la précédente loi, ce qui permet non seulement de critiquer son annulation, mais aussi de relever tous les renoncements de la droite par rapport à ses ambitions initiales en matière de défense. Il démontre que la droite cache ses divergences internes (se rapprocher ou non de l’OTAN, approuver ou pas le retrait des Euromissiles américains), voire ses velléités de changer la doctrine stratégique. Grâce au président et au PS, la dissuasion serait donc toujours comprise par la population comme la non-guerre, alors qu’adopter une riposte graduée rendrait la guerre acceptable64Paul Quilès, « Le débat sur la programmation militaire. Du bon usage du consensus », Le Monde, 8 avril 1987..
Finalement, parmi le groupe socialiste, seule Huguette Bouchardeau, fidèle à ses convictions antinucléaires, refuse de voter le texte en préférant l’abstention pour dénoncer le « surarmement65Journal officiel, Assemblée nationale, compte-rendu de la 2ème séance du jeudi 9 avril 1987 ; Pierre Servent, « À l’Assemblée nationale, une écrasante majorité en faveur de la loi de programmation militaire », Le Monde, 11 avril 1987. ». Les socialistes et le président bénéficient cependant du refus communiste de voter le texte, les autorisant à se placer au centre du jeu politique entre une droite divisée à tentation atlantiste, d’un côté, et le PCF qui, de l’autre, critique le surarmement français66Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Argumentaire loi de programmation militaire » réalisé par Pascal Boniface, 25 mai 1987. Cf. également le soutien à l’URSS dans les négociations de désarmement et leur critique contre le surarmement français : « Rassemblement et action pour la survie de l’Humanité », L’Humanité, 6 mai 1987..
La stratégie du PS reste identique au moment du vote du budget 1988 en novembre 1987. Il s’agit prioritairement de se présenter comme le parti du juste milieu et d’utiliser le consensus, partiel, incomplet, réel ou non, à son profit. Il n’est cependant pas possible de l’adopter pour des raisons politiques même si l’affichage est celui du refus de donner des « chèques en blanc67Journal officiel, Assemblée nationale, compte-rendu de la 1ère séance du mardi 10 novembre 1987, intervention de Paul Quilès. Cf. également Pierre Servent, « La discussion budgétaire à l’Assemblée nationale. Défense : les agacements de M. Giraud », Le Monde, 12 novembre 1987. » au gouvernement dont les conceptions stratégiques traduisent des tensions entre Jacques Chirac et André Giraud. Par ailleurs, les socialistes dénoncent un budget difficile à tenir. Ils pensent aussi en interne que, s’ils reviennent au pouvoir en 1988, ils vont se trouver dans l’impossibilité de l’exécuter. Il faut ajouter que les mêmes personnalités que l’année précédente, Lionel Jospin et Pierre Mauroy, mais aussi Jean Poperen, demandent un vote négatif au nom des militants qui ne comprennent pas cet accord avec le gouvernement et regrettent des dépenses militaires excessives68Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Attitude du groupe socialiste sur le budget défense 1988 », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 5 octobre 1987..
En réalité, chacun des deux points de vue qui s’expriment au sein du PS pose la question du terrain qu’il convient d’occuper. Les partisans d’un vote négatif craignent que ceci ne donne une marge de manœuvre au PCF pour dénoncer une collusion du PS avec la droite. Il est également mis en avant le souci, comme en 1981, de récupérer le vote écologiste pour l’emporter au second tour de la présidentielle. Signe de l’affaiblissement communiste et du sentiment d’avoir remporté la bataille du nucléaire, Pascal Boniface estime qu’il est prioritaire de conserver la position centrale acquise par le parti pour ne pas laisser libre le terrain de la fermeté sur les questions de défense à Jacques Chirac et à Raymond Barre, sachant que le premier glisse vers une acceptation par réalisme de la double option zéro alors que le second la refuse. Le PS décide de jouer, avec François Mitterrand, le consensus malgré les autres formations politiques.
Conclusion
Dans les années 1980, le PS au pouvoir comme dans l’opposition n’a d’autre possibilité que de suivre les orientations présidentielles afin de mettre en avant sa primauté en matière de défense face à une droite divisée pour mettre en échec ses options de défense et la battre en 1988. Il joue cependant un rôle actif de canalisation de la critique en France et, parmi les partenaires de la gauche étrangère, plus efficacement en raison du succès de la double décision de l’OTAN puisqu’elle permet le démantèlement des Euromissiles et qu’elle a été activement défendue par le chef de l’État. Finalement, avec les questions de défense, le PS contribue au renforcement de l’image consensuelle de rassembleur que François Mitterrand entend incarner lors de l’élection présidentielle. Ce faisant, il installe l’idée que la dissuasion nucléaire est la principale garantie de paix.
- 1Pour une compréhension du processus qui y a conduit, cf. Yannick Pincé, Quel « consensus » nucléaire français ?, Fondation Jean-Jaurès, 20 octobre 2022.
- 2La crise des Euromissiles, dernière de la guerre froide, est déclenchée par la dénonciation en 1977 du déploiement de missiles soviétiques SS-20 à moyenne portée, visant l’Europe occidentale. Après l’échec des négociations quant à leur retrait, les États-Unis, en accord avec leurs alliés de l’OTAN, déploient à partir de la fin 1983 des missiles équivalents en Europe de l’Ouest. La crise s’achève en décembre 1987 par la signature du traité de Washington (ou traité FNI, forces nucléaires intermédiaires) entérinant la double option zéro : le retrait complet des armes nucléaires de portée intermédiaire (500 à 5 500 kilomètres).
- 3Voir par exemple la distinction entre la partie sur « La France dans le monde » et celle sur « Le fonctionnement des institutions, l’opinion et les forces politiques » dans le colloque de 1999 sur « Les années du changement » : Serge Berstein, Pierre Milza et Jean-Louis Bianco (dir.), François Mitterrand, les années du changement 1981-1984, Paris, Perrin, 2001.
- 4François Mitterrand, « II- Deux façons d’avancer », Le Monde du 15 décembre 1977. Lionel Jospin, « Pour une conception globale de la sécurité en Europe », dans Pierre Lellouche (dir.), La sécurité de l’Europe dans les années 80, Paris, IFRI, 1980, p. 349.
- 5Archives socialistes, 70 RI 6, note de Jacques Soppelsa de janvier 1981.
- 6Archives socialistes, 70 RI 6, réunion de travail sur les problèmes du désarmement, 10 janvier 1983.
- 7« M. Jacques Soppelsa, président de l’université de Paris I », Le Monde, 9 février 1982.
- 8Cette habitude d’exister en permanence dans la presse est prise dès les années 1960, cf. Jean Guisnel, Charles Hernu ou la République au cœur, Paris, Fayard, 1993, pp. 332-333.
- 9Archives socialistes, CAED « 1983 paix sécurité désarmement, Conventions pour l’armée nouvelle ».
- 10Archives socialistes, CAED, « 1983 paix sécurité désarmement, Conventions pour l’armée nouvelle », compte-rendu de la réunion du bureau des conventions pour l’Armée nouvelle, le 16 mai 1983.
- 11« Le comité central du PC soviétique a adressé une lettre à tous les partis socialistes d’Europe sur le problème des euromissiles », Le Monde, 23 mai 1981.
- 12Jérôme Dupuis et Maryvonne Prévot (dir.), Pierre Mauroy, passeur d’avenirs ?, Lille, Septentrion, 2020, p. 186 ; Bernd Rother, Willy Brandts Aussenpolitik, Berlin, Springer, 2014, p. 310 ; Archives socialistes, CAED « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 17 septembre 1986.
- 13Pascal Boniface en est l’initiateur, cf. entretien téléphonique, 2 septembre 2021.
- 14Archives socialistes, 70 RI 22, compte-rendu manuscrit de la rencontre PS-PSI-PSDI-PSOE-PSP-PSB du 5 janvier 1984. Cf. également Jérôme Dupuis et Maryvonne Prévot (dir.), Pierre Mauroy passeur d’avenirs ?, op. cit. p. 186 ; Bernd Rother, Willy Brandts Aussenpolitik, op. cit., p. 310 ; Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 17 septembre 1986.
- 15Jonathan Power, « Palme’s report », The New York Times, 2 juin 1982.
- 16Jacques Huntzinger est un juriste spécialiste des questions de relations internationales et de désarmement. Il entame une carrière de diplomate à la fin des années 1980.
- 17Brochure du PS, Paix, sécurité et désarmement, 25 mai 1982.
- 18Brochure du PS, Paix, sécurité et désarmement, 25 mai 1982 ; entretien téléphonique avec Pascal Boniface, 2 septembre 2021.
- 19Brochure du PS, Paix, sécurité et désarmement, 25 mai 1982.
- 20Entretien téléphonique avec Pascal Boniface, 2 septembre 2021.
- 21Georges Saunier et Philippe Vial (dir.), La France et sa défense. Paroles publiques d’un président – 1981-1995, Paris, Nouveau Monde éditions, 2015, pp. 110 et 113-114.
- 22Archives socialistes, 70 RI 8, courriers de particuliers et associations à propos du désarmement, 1983-1984.
- 23« Défense : le PS sur la sellette de l’Internationale socialiste », Le Quotidien de Paris, 24 novembre 1983.
- 24« Jacques Huntzinger : “Ni manichéisme, ni naïveté” », PS aujourd’hui, 18 octobre 1983.
- 25Patrick Jarreau, « La position des principales familles politiques. Un consensus dont le PCF s’exclut », Le Monde, 21 novembre 1983.
- 26Jacques Amalric, « Les coulisses de Stockholm », Le Monde, 15 et 16 janvier 1984.
- 27Archives socialistes, 8 FP 8, carton 4 « Pontillon défense et sécurité », fiche « Agence internationale de satellites de contrôle » réalisée par Benoît d’Aboville, ministère des Relations extérieures, direction des affaires politiques, service des affaires stratégiques et du désarmement, sous-direction du désarmement, 13 mai 1982.
- 28Paul Tavernier, « L’année des Nations unies, 1er janvier 1982 – 21 décembre 1982, questions juridiques », Annuaire français de droit international, Paris, CNRS, 1982, p. 664.
- 29Michel Dobry, « Le jeu du consensus », Pouvoirs, septembre 1986, p. 64 ; Sezin Topçu, La France nucléaire. L’art de gouverner une technologie contestée, Paris, Seuil, 2013, p. 121 ; cf. également Martin Siloret, « L’émergence partisane des écologistes français (1984-1988) », dans Georges Saunier (dir.), Mitterrand, les années d’alternances, 1984-1986 et 1986-1988, Paris, Nouveau Monde, 2019, p. 841.
- 30Nicole Gnesotto, « La France, fille aînée de l’Alliance ? », dans Pierre Lellouche (dir.), Pacifisme et dissuasion, op. cit., p. 276.
- 31Dans le souci de transparence de la réflexion sur les grands projets publics portés par la contestation antinucléaire des années 1970, elle porte la loi du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l’environnement. L’intégration de Michel Crépeau puis d’Huguette Bouchardeau symbolisent la démarche socialiste de canalisation de la critique antinucléaire en l’associant à diverses structures d’information et d’expertise sur les grands projets et installations nucléaires, cf. Sezin Topçu, La France nucléaire, op. cit., pp. 122-133.
- 32Archives socialistes, 70 RI 8, courriers de particuliers et associations à propos du désarmement, 1983-1984.
- 33À Bruxelles, il déclare : « Le pacifisme, il est à l’Ouest, et les euromissiles ils sont à l’Est », cf. Bernard Brigouleix, « M. Mitterrand exhorte les Occidentaux à rester résolus sur les euromissiles », Le Monde, 14 octobre 1983.
- 34Jean-Luc Mano, « Un document du PS. La paix, la sécurité et le désarmement », L’Humanité, 3 juin 1982.
- 35Dans Pierre Lellouche (dir.), Pacifisme et dissuasion, op. cit. : Alfred van Staden, « Pays-Bas et Belgique : la tentation neutraliste », pp. 94-95, Ingemar Dorfer, « La Scandinavie ou la défense de la virginité nucléaire », pp. 107-139, Jean-François Bureau, « La contestation des armes nucléaires et les partis politiques en Europe de l’Ouest », p. 189. La section du PS aux Pays-Bas est favorable au mouvement pacifiste en raison de son ampleur, cf. Archives socialistes, 70 RI 6, document dactylographié du groupe désarmement de la section PS des Pays-Bas, mars 1982.
- 36Jean-François Bureau, « La contestation des armes nucléaires et les partis politiques en Europe de l’Ouest », art. cit., pp. 195-196.
- 37Patrice Buffotot et Maurice Vaïsse, « La politique de défense de François Mitterrand pendant les trois gouvernements Mauroy, 21 mai 1981 – 17 juillet 1984 », Serge Berstein, Pierre Milza et Jean-Louis Bianco (dir.), François Mitterrand, les années du changement, op. cit., p. 188.
- 38« Défense : le PS sur la sellette de l’Internationale socialiste », Le Quotidien de Paris, 24 novembre 1983.
- 39Claire Tréan, « L’accord s’est fait sur un texte ambigu », Le Monde, 26 novembre 1983.
- 40La déclaration de candidature est finalement faite le 22 mars 1988 au journal télévisé d’Antenne 2, soit à peine un mois avant le premier tour, le 24 avril.
- 41Entretien téléphonique avec Pascal Boniface, 2 septembre 2021.
- 42« Comité directeur du 16 octobre 1985 », PS info, 26 octobre 1985.
- 43François Cailleteau prend la direction financière et des affaires juridiques du ministère de la Défense en 1983. En 1984, Jean-François Dubos est nommé au Conseil d’État et François Heisbourg devient directeur international de Thomson-CSF, cf. Jean Guisnel, Charles Hernu, ou la République au cœur, op. cit., pp. 504-505.
- 44On y trouve Edwige Avice, Catherine Lalumière, Pascal Boniface, Jean-Michel Boucheron, Pierre Guidoni, Gilles Martinet et Robert Pontillon. Cf. Archives socialistes, CAED 1987-1989, « Réflexions sur la sécurité européenne », texte adopté en bureau exécutif du 21 octobre 1987.
- 45Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Liste des experts en matière de défense », 8 mars 1988. Dans « Sur les problèmes de personnel ou de service national » sont mentionnés Guy-Michel Chauveau, député de la Sarthe et François Cailleteau devenu contrôleur général des Armées. « Sur les problèmes financiers », il s’agit de Frédéric Tiberghien, membre des requêtes au conseil d’État, et de Patrick Careil qui fut directeur de cabinet de Charles Hernu. Enfin, dans « Sur l’ensemble de ces problèmes », c’est Jean-François Dubos, ancien directeur adjoint du cabinet de Charles Hernu, qui est mentionné.
- 46Jean-Louis Andréani, « Le saute-mouton des socialistes », Le Monde, 14 novembre 1986.
- 47Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, non datée, sans doute le 12 novembre 1987.
- 48Lionel Jospin, « Comité directeur du 15 novembre 1986 », PS info, 22 novembre 1986.
- 49Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « La défense dans les contributions nationales pour le Congrès de Lille », note de Pascal Boniface pour Pierre Joxe, 29 janvier 1987.
- 50Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Éléments d’intervention de Jean-Michel Boucheron. Responsable des questions de défense au sein du groupe socialiste de l’Assemblée nationale », 10 mai 1987.
- 51Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 2 avril 1987.
- 52Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Avant-projet pour l’organisation d’une Convention nationale du PS sur la défense » réalisé par Pascal Boniface pour Pierre Joxe, 11 juin 1987.
- 53Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », lettre de Claude Panne, président du mouvement de la paix de la Drôme, au président de la République, au président de l’Assemblée nationale, au « chef du gouvernement », au « ministre de la guerre » et aux présidents des groupes parlementaires du 26 octobre 1987. Réponse de Pierre Joxe du 24 novembre 1987. Note de Pascal Boniface à propos des essais nucléaires, 23 décembre 1986.
- 54Lionel Jospin, « Comité directeur du 15 novembre 1986 », art. cit.
- 55Bernd Rother, Willy Brandts Aussenpolitik, op. cit., p. 310. Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 17 septembre 1986. « La querelle disparaît » selon Pascal Boniface, entretien téléphonique, 2 septembre 2021.
- 56« Les travaillistes se prononcent pour l’abandon total du nucléaire », Le Monde, 5 septembre 1985 ; « M. Neil Kinnock se prononce pour la fermeture des bases nucléaires américaines », Le Monde, 30 septembre 1986.
- 57Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Rencontre Labour Party / PS – Londres le 23 /10 », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 30 octobre 1986.
- 58Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Réunion du SIDAC (Socialist International Desarmement Advisory Council) du 16 février 1987 à Helsinki », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 18 février 1987.
- 59Leur défiance à la politique nucléaire des socialistes français est confortée par le scandale du Rainbow Warrior et par l’affaire Luchaire, une vente d’obus secrète à l’Iran dans laquelle le cabinet de Charles Hernu est impliqué, cf. Gilles Gaetner, « 1987 : l’affaire Luchaire », L’Express, 30 mars 1995.
- 60Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Réunion Scandilux des 26 et 27 janvier 1988 », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 29 février 1988.
- 61Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 30 juin 1987.
- 62À l’exception près de l’UDF pour le budget 1982, cf. Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Argumentaire loi de programmation militaire » réalisé par Pascal Boniface, 25 mai 1987.
- 63Journal officiel, Assemblée nationale, compte-rendu de la 1ère séance du jeudi 9 avril 1987, intervention de Jean-Michel Boucheron.
- 64Paul Quilès, « Le débat sur la programmation militaire. Du bon usage du consensus », Le Monde, 8 avril 1987.
- 65Journal officiel, Assemblée nationale, compte-rendu de la 2ème séance du jeudi 9 avril 1987 ; Pierre Servent, « À l’Assemblée nationale, une écrasante majorité en faveur de la loi de programmation militaire », Le Monde, 11 avril 1987.
- 66Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Argumentaire loi de programmation militaire » réalisé par Pascal Boniface, 25 mai 1987. Cf. également le soutien à l’URSS dans les négociations de désarmement et leur critique contre le surarmement français : « Rassemblement et action pour la survie de l’Humanité », L’Humanité, 6 mai 1987.
- 67Journal officiel, Assemblée nationale, compte-rendu de la 1ère séance du mardi 10 novembre 1987, intervention de Paul Quilès. Cf. également Pierre Servent, « La discussion budgétaire à l’Assemblée nationale. Défense : les agacements de M. Giraud », Le Monde, 12 novembre 1987.
- 68Archives socialistes, CAED, « 1987-1989 courriers notes (divers) défense », « Attitude du groupe socialiste sur le budget défense 1988 », note de Pascal Boniface à Pierre Joxe, 5 octobre 1987.