La crise antimilitariste des années 1970

Il y a cinquante ans, alors que Valéry Giscard d’Estaing entame son septennat, la France traverse une crise antimilitariste inédite, tant par ses manifestations que par son intensité. Cet antimilitarisme est aujourd’hui largement oublié dans un contexte où l’institution militaire est plébiscitée dans les enquêtes d’opinion. Maxime Launay, en revenant sur les origines et la grande variété des contestations, montre combien le rôle de l’institution militaire dans la société française a pu avoir une dimension très politique après Mai 68.

Durant ce que les historiens nomment les « années 19681Michelle Zancarini-Fournel, Le moment 68. Une histoire contestée, Paris, Seuil, 2008 ; Geneviève Dreyfus-Armand, Robert Frank, Marie-Françoise Lévy et al. (dir.), Les années 68. Le temps de la contestation, Bruxelles, Complexe, 2000. », l’antimilitarisme s’inscrit dans un mouvement politique et social plus vaste, marqué par une forte contestation des institutions d’ordre au lendemain de Mai 682Je remercie vivement Chantal Dukers pour la relecture de ce texte.. Les manifestations d’insubordination – à des degrés divers – se multiplient en effet envers l’autorité militaire, à l’image de l’« insubordination ouvrière » qui se manifeste au même moment face à l’ordre usinier3Xavier Vigna, L’insubordination ouvrière dans les années 68. Essai d’histoire politique des usines, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007.. De l’école « caserne » aux hôpitaux « totalitaires », en passant par les prisons, on assiste durant l’après-Mai à la fois à une libéralisation de la critique contre les institutions et à des tentatives de subversion des lieux d’enfermement4Bruno Benoit, Christian Chevandier, Gilles Morin et al. (dir.), À chacun son mai ? Le tour de France de mai-juin 1968, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2011 ; François Dubet, Le déclin de l’institution, Paris, Seuil, 2002 ; Elsa Génard, Mathilde Rossigneux-Méheust (dir.), Routines punitives. Les sanctions du quotidien, XIXe-XXsiècle, Paris, CNRS, 2023.. Anti-autoritaire, contre-culturel, libertaire, ce mouvement protéiforme et radical ne peut se comprendre qu’à la lumière de Mai 68, sans que celui-ci suffise à l’expliquer totalement : c’est plus largement depuis les années 1960 que la société française reconnaît une plus large place à la conflictualité, cherche plus d’horizontalité, promeut l’individualité tout en adoptant un consumérisme dopé par une forte croissance55,8% en moyenne entre 1959 et 1971. Dominique Lejeune, La France des Trente Glorieuses, 1945-1974, Paris, Armand Colin, 2015..

L’armée n’est pas épargnée par ces profondes mutations : la fin des guerres de décolonisation ouvre en France une longue période de déprise du fait militaire qui se caractérise par la baisse des budgets et des moyens humains dédiés aux armées. L’éloignement de l’horizon combattant suscite également un nouveau rapport entre le citoyen et le port des armes. Les jeunes hommes, et singulièrement ceux ayant fait des études, considèrent de plus en plus le service militaire – devenu service national en 1965 – comme une corvée inutile qu’il s’agit d’éviter par tous les moyens, un impôt du temps décorrélé de l’évolution technologique de la guerre, où la dissuasion nucléaire prime sur la confrontation terrestre des soldats rassemblés en masse.

C’est dans ce cadre que les forces armées font l’objet d’un vaste débat public au tournant des années 1970. L’un des traits les plus saillants en est la politisation des questions militaires à un degré rarement atteint6La première grande crise remonte au tournant du XXsiècle. Voir Éric Fournier et Arnaud-Dominique Houte (dir.), À bas l’armée ! L’antimilitarisme en France du XIXsiècle à nos jours, Paris, Éditions de la Sorbonne, 2023.. Partis et organisations politiques, mouvements sociaux et institutions politiques font des armées un « problème public7Éric Neveu, Sociologie politique des problèmes publics, Paris, Armand Colin, 2015. », cible de fortes contestations dont le caractère antimilitariste, s’il est loin d’être systématique parmi les acteurs en présence, teinte largement le débat public sur la défense nationale jusqu’au milieu de la décennie.

L’antimilitarisme prend de ce fait de multiples formes qui puisent dans une longue histoire et un corpus doctrinal dense8Jean Rabaut (dir.), L’antimilitarisme en France. 1810-1975, faits et documents, Paris, Hachette, 1975 ; Alain Brossat et Jean-Yves Potel (dir.), Antimilitarisme et révolution. Anthologie de l’antimilitarisme révolutionnaire, Paris, Union générale d’éditions, 1976, 2 vol. ; Marc Angenot, L’antimilitarisme : idéologie et utopie, Saint-Nicolas, Presses de l’Université Laval, 2003.. Tandis que certains cultivent une opposition au principe même de l’existence d’une armée, d’autres luttent contre le rôle – qu’il soit réel ou supposé – de l’institution militaire dans la société. Chaque jour, les médias rendent compte de ces mobilisations : la lutte du Larzac, l’opposition aux essais nucléaires dans le Pacifique, la critique des ventes d’armes, la remise en question du service national et la défense de l’objection de conscience, la préservation des libertés publiques dans les casernes animent régulièrement la chronique politique. Plus fondamentalement, c’est l’institution en tant que telle qui est ciblée : perçue par une partie de la gauche comme le suppôt des dictatures et du capitalisme, elle est vue comme un outil de la répression contre le mouvement ouvrier en raison de son rôle potentiel dans le maintien de l’ordre9Même si celui-ci est en pratique quasiment inexistant depuis la création des forces spécialisées en la matière, les CRS et la gendarmerie mobile, la répression des grèves de 1947-1948 faisant exception. et de sa justice d’exception. Les tribunaux militaires, dénoncés depuis l’affaire Dreyfus, continuent de ce point de vue à concentrer les critiques des avocats et des militants de la Ligue des droits de l’homme10Mouvement d’action judiciaire, Les droits du soldat. Statut, discipline et justice militaire, Paris, Maspero, 1975..

L’antimilitarisme se manifeste donc en pratique par une pluralité de causes et par une grande diversité d’acteurs : des militants et des syndicalistes de toutes les tendances que compte la gauche, et plus spécifiquement d’une nébuleuse d’extrême gauche en pleine ascension depuis 1968 et au sein de laquelle les trotskistes de la Ligue communiste jouent les premiers rôles ; des pacifistes et des écologistes ; des insoumis et des objecteurs de conscience ; des écrivains et des intellectuels ; des paysans et des prêtres « rouges » ; des avocats et des journalistes ; ou encore des militaires en rupture de ban et des appelés du contingent contestataires. Ces derniers fournissent de loin les effectifs les plus nombreux car, contraints de passer sous les drapeaux, ils sont les plus directement aux prises avec les militaires.

Leurs actions se déploient sur l’ensemble du territoire français car la géographie de l’antimilitarisme recoupe la carte militaire, sans que le phénomène ait partout la même intensité. Les régions à forte densité militaire sont surtout concernées (la Lorraine et la Provence-Alpes-Côte d’Azur sont bien plus touchées que la Normandie ou le Limousin), ainsi que les grandes villes (Paris, Lyon) et les ports majeurs de la Marine (Brest, Toulon). L’armée de terre est la plus affectée, puisque qu’elle se voit attribuée près de huit appelés sur dix11Commission Armées-Jeunesse, « Le service national », note d’information, 1973. SHD, GR 2 T 168, EMAT : Directives du CEMAT, information et relations publique, conférences d’informations, Commission Armée-Jeunesse, presse, information sur les personnels féminins (1971-1979).. Ces démonstrations d’hostilité s’observent à l’occasion de campagnes de presse, de manifestations de rue ou lors de meetings, mais elles prennent aussi lieu au sein même des casernes à travers une palette d’actions de résistance – diffusion de documents antimilitaristes, création de comités de soldats, boycott d’activités, graffitis, sit-in, etc. – donnant à ce mouvement une portée profondément déstabilisatrice pour les forces armées.

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Les phases de la crise antimilitariste de Mai 68 à l’explosion de 1974

En mai-juin 1968, l’armée avait été une cible marginale des protestations mais les signaux envoyés par le pouvoir avaient laissé à penser qu’en cas de troubles insurrectionnels, voire de crise révolutionnaire, un appel aux légions par le gouvernement aurait été inéluctable. En effet, le rapprochement aux abords de la capitale de troupes professionnelles, susceptibles d’intervenir dans le cas où elles en auraient reçu l’ordre, ainsi que la visite du général de Gaulle aux Forces françaises en Allemagne commandées par le général Massu à Baden-Baden, donnaient à tous le sentiment que l’armée était un roc de stabilité qui, s’il était resté in extremis à l’écart des événements, pouvait être la solution, ou un pan de celle-ci, lors d’une prochaine crise. C’est ce qui explique que, dans les mois et années qui suivent, tant du côté des pouvoirs publics que des militants révolutionnaires, chacun s’organise dans l’éventualité d’un nouveau Mai 68. Tandis que l’État repense ses plans de crise – pour lesquels le concours de l’armée est attendu –, les organisations de la nébuleuse d’extrême gauche (en particulier la Gauche prolétarienne et la Ligue communiste) s’emploient à diffuser un esprit antimilitariste parmi la jeunesse scolarisée. Les trotskistes, fidèles à la doctrine léniniste, sont convaincus que la révolution est proche et souhaitent empêcher que les militaires y fassent obstacle12« L’histoire nous mord la nuque », disait l’un des dirigeants de la LC, Daniel Bensaïd. Voir Daniel Bensaïd et Henri Weber, Mai 1968 : une répétition générale, Paris, Maspero, 1968.. Ils entendent par conséquent développer tous les moyens de subversion13Le terme « subversion » est aussi utilisé comme notion savante, à l’exemple de Michael Hardt, The Subversive Seventies, New York, Oxford University Press, 2023. et de démoralisation des armées en cas de situation révolutionnaire ou, à l’inverse, pour faire face à un putsch militaire. Le coup d’État – raté – des généraux d’avril 1961 en Algérie, réputé avorté grâce au contingent14Le rôle du contingent n’a pas été négligeable, mais davantage par son inertie. Voir Maurice Vaïsse, Comment de Gaulle fit échouer le putsch d’Alger, Paris, Odile Jacob, 2021 [Bruxelles, André Versaille, 2011]., demeure dans toutes les têtes.

Les actions réalisées entre 1968 et 1973 ne dépassent toutefois pas le stade des signaux faibles. Les tentatives dans les casernes sont des échecs, et les contestations rencontrent un faible écho dans l’espace public ou sont localisées. C’est le cas, par exemple, des manifestations de soutien à l’égard de trois soldats du contingent incarcérés à Rennes pour avoir été trouvés en possession de journaux antimilitaristes, L’Étincelle et Crosse en l’air. On pouvait notamment lire sous leur plume :
« Crosse en l’air, contre l’armée de caserne, réalisé par de jeunes appelés antimilitaristes qui sont contre seize mois de détention, contre la discipline obsessionnelle, contre seize mois de chômage, contre notre éventuelle utilisation comme flics ou comme briseurs de grève15« Une réunion de protestation contre l’incarcération de trois soldats du contingent est prévue pour jeudi à Rennes », Le Monde, 29 janvier 1970.. »

C’est au printemps 1973 que s’opère la bascule vers une mobilisation intense. Cinq ans après Mai 68, des dizaines de milliers de lycéens et d’étudiants, encouragés si ce n’est encadrés par les militants de la Ligue communiste, protestent dans la rue contre la « loi Debré », du nom de Michel Debré, ministre d’État chargé de la Défense nationale16Didier Leschi et Robi Morder, Quand les lycéens prenaient la parole, Paris, Syllepse, 2018.. Cette réforme du service national prévoit la suppression des sursis accordés pour études au-delà de 21 ans, un avantage auquel est attachée la jeunesse dans un contexte de massification des études supérieures. Fort de ce succès, les rassemblements et les publications antimilitaristes se multiplient, et priorité est donnée à la lutte antimilitariste à travers des organisations dédiées. Tandis que la Ligue communiste dispose depuis 1972 d’une organisation clandestine, le Front des soldats, marins et aviateurs révolutionnaires (FSMAR), destinée à développer des actions collectives au sein même des unités militaires, ainsi qu’un Comité de défense des appelés (CDA) conçu comme un appui civil à cette lutte dans les casernes, les trotskistes-libertaires du groupe Révolution ! ont créé une organisation similaire intitulée le Comité antimilitariste (CAM). Du côté des états-majors, les militaires redoutent une difficile incorporation de ces jeunes contestataires, voués à servir prochainement sous les drapeaux17SHD, DE 2007 ZB 20 15, DSM, Synthèses mensuelles, 1968-1969..

Leur crainte se confirme un an plus tard, à la veille du second tour de l’élection présidentielle de 1974, lorsqu’un « Appel des Cent » circule dans les casernes sous la forme d’une pétition d’appelés et d’une liste de revendications contestant les conditions du service national. Publié à l’initiative de la Ligue communiste dans la presse de gauche, le texte appelle à une augmentation de la solde, au refus des missions antigrèves confiées aux soldats ou encore demande le respect des libertés publiques dans les armées18Paru dans Rouge, Libération et Politique Hebdo le 16 mai 1974. Voir aussi note de la Direction de la sécurité militaire, « Fiche concernant l’Appel des Cent », 20 mai 1974. SHD, GR 1 R 1541, Appels nationaux et manifestations (1974-1981) : Appel des Cent.. Les signataires sont sanctionnés, le plus souvent mutés dans d’autres régiments, mais l’appel se diffuse pour atteindre près de 3700 signatures à l’automne, un nombre qui peut paraître faible s’il est rapporté au total des appelés, mais qui se révèle être un succès au regard des contraintes de la vie militaire, où l’activité politique est proscrite et les capacités répressives de la hiérarchie importantes.

La crise antimilitariste puise ses sources dans un double contexte national et international

Pour comprendre cet essor soudain de l’antimilitarisme, il faut aussi le resituer dans un double contexte, tant national qu’international, propice à cette défiance à l’égard des militaires. La mobilisation contre la guerre du Vietnam, le coup d’État au Chili contre le gouvernement d’unité populaire de Salvador Allende et la chute de la dictature portugaise lors de la Révolution des Œillets forment une toile de fond essentielle pour comprendre le rapport de la gauche à l’armée en ce début des années 1970. Objet d’un choc mondial19Maud Chirio, « 1973. L’autre 11 septembre », dans Patrick Boucheron (dir.), Histoire mondiale de la France, Paris, Seuil, 2017, p. 707-711 ; Caroline Moine, « « Votre combat est le nôtre ». Les mouvements de solidarité internationale avec le Chili dans l’Europe de la Guerre froide », Monde(s), n°8, 2015, pp. 83‑104., le putsch mené par la junte militaire chilienne a une très forte résonance parmi la gauche. En France, c’est la question de la loyauté de l’armée française en cas d’alternance qui est désormais posée. Tandis que les trotskistes considèrent que l’expérience chilienne vient confirmer que la voie électorale est une illusion, Michel Rocard, secrétaire national du Parti socialiste unifié, affirme, dans une tribune qu’il publie dans Le Monde, qu’il existe un « syndrome chilien » :
« Au fond, c’est à l’armée française et à ses cadres qu’est posé le plus grave des problèmes soulevés par le Chili. À la lumière de ce qui vient de s’y passer, que pensent les officiers conviés à des manœuvres sur le thème : « L’armée intervient pour rétablir le gouvernement au pouvoir » ? Que pensent les officiers de gendarmerie mis au service du patronat pour réoccuper Lip ? Que pensent les officiers de l’École de guerre auditeurs de Michel Debré quand il leur dit : « La D.O.T. [Défense opérationnelle du territoire] a pour mission d’empêcher le retour d’événements tels que ceux qui se sont produits en mai 1968 » ?20Michel Rocard, « Madrid, Athènes et Santiago », Le Monde, 22 septembre 1973. »

La situation internationale paraît, en effet, indissociable du contexte intérieur. Entre un gaullo-pompidolisme qui s’est rigidifié pendant ses dernières années, le projet giscardien vantant une « société libérale avancée » et enfin la « rupture avec l’ordre établi » incarnée par François Mitterrand depuis le congrès refondateur du PS à Épinay, c’est la question du maintien de l’ordre social ou de sa transformation qui est posée. À l’heure de la montée en puissance de l’union de la gauche, portée par l’alliance des socialistes, communistes et radicaux autour du Programme commun de gouvernement21Christophe Batardy, Le programme commun de la gauche, 1972-1977, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux, 2021., l’essor dans le débat public du thème de l’ennemi intérieur – vieil épouvantail qui resurgit régulièrement dans l’histoire politique et militaire de la France22François Cochet et Olivier Dard (dir.), Subversion, anti-subversion et contre-subversion, Paris, Riveneuve, 2009. – en est un symptôme évident. Le successeur de Michel Debré à la Défense, Robert Galley, n’hésite pas à déclarer en 1973 que « l’armée demeure le dernier recours de notre société libérale23Jacques Isnard, « “À la défense nationale, on veut substituer la démission nationale” déclare M. Robert Galley », Le Monde, 15 mai 1973. », considérant la gauche comme un acteur subversif et présentant l’institution militaire comme le défenseur ultime du régime en place, à l’encontre du principe même de neutralité des armées. De tels propos confortaient tous ceux qui assimilent les forces armées à l’« État-UDR », au service d’une VRépublique gaullienne adepte du « coup d’État permanent24François Mitterrand, Le coup d’État permanent, Paris, Plon, 1964. ».

Cet amalgame est d’autant plus facilement fait qu’au printemps 1974, au moment où Georges Pompidou décède, les gaullistes lèguent, après plus de quinze années au pouvoir, une politique de défense profondément transformée. Cette « révolution militaire », pour reprendre l’expression de Pierre Messmer, son principal orchestrateur aux côtés du général de Gaulle, se fondait sur la volonté de tourner la page de la guerre d’Algérie et d’asseoir le statut de grande puissance de la France25Maurice Vaïsse, La grandeur. Politique étrangère du général de Gaulle, 1958-1969, Paris, Fayard, 1998.. Ses quatre piliers en étaient la dissuasion nucléaire, cœur stratégique de la défense nationale et dont l’arsenal était dorénavant complet avec la mise à l’eau récente des premiers sous-marins lanceurs d’engins (SNLE) ; une industrie d’armement forte, représentant désormais plus de 3% du commerce extérieur français ; le maintien de la conscription, jugée essentielle pour les besoins de l’armée et pour préserver un lien fort entre celle-ci et la population ; un système d’alliance, enfin, fondé sur un atlantisme réticent depuis la sortie de la France du commandement intégré de l’OTAN26Olivier Schmitt, “The Reluctant Atlanticist: France’s Security and Defence Policy in a Transatlantic Context”, Journal of Strategic Studies, n°40/4, juin 2017, pp. 463-474..

Contempteurs de la politique du général de Gaulle depuis 1958, les partis de la gauche de gouvernement pouvaient difficilement contredire ces piliers essentiels de la politique de défense qui engageaient lourdement la continuité de l’État et sa place dans le monde. Ils contribuaient à garantir l’indépendance nationale, un principe devenu central pour la politique étrangère de la France27Maxime Launay, La rose et le glaive : les socialistes et la défense dans les années 1970, Fondation Jean-Jaurès, 2018.. Valéry Giscard d’Estaing et François Mitterrand l’avaient bien compris, eux qui rivalisaient pour en être le champion lors de l’élection présidentielle de 1974 afin de donner des gages de sérieux et de capter les voix gaullistes en déshérence après l’échec de Jacques Chaban-Delmas au premier tour. Aux yeux du premier secrétaire du Parti socialiste, la conquête du pouvoir supposait un consensus minimum sur les affaires militaires.

Avec seulement 425 000 voix de retard sur les 26 millions exprimées face au candidat de la droite et du centre lors du second tour, la gauche comprend que l’alternance est possible. Au cours des années qui suivent, socialistes et communistes se rallient à la dissuasion nucléaire et s’attachent à se tenir éloignés de l’antimilitarisme.

Des visions opposées de l’institution militaire entre la gauche de gouvernement et la gauche extra-parlementaire

L’antimilitarisme est donc porté essentiellement par la gauche extra-parlementaire tandis que la gauche de gouvernement prend ses distances à mesure que la crise antimilitariste s’amplifie. Il y a en effet loin entre les propositions socialistes, qui promettent une réforme du service national fondée principalement sur une réduction de sa durée de douze à six mois, et celles, par exemple, des anarchistes, qui prônent l’objection de conscience et soutiennent le droit à l’insoumission. Dans une situation intermédiaire, le Parti socialiste unifié (PSU) et la petite organisation trotskiste de l’Alliance marxiste révolutionnaire (AMR) incarnent un antimilitarisme réformiste, axé sur les droits et libertés dans les casernes et promouvant, en lien avec la CFDT, le modèle syndical adopté par l’Europe du Nord.

Si des ponts sont maintenus entre ces deux gauches, notamment pour dénoncer la répression contre les appelés contestataires et faire ponctuellement œuvre de solidarité lors de manifestations unitaires ou de procès retentissants contre des antimilitaristes, il reste que les divergences d’interprétation sont fondamentales entre ceux qui, prônant un antimilitarisme révolutionnaire, souhaitent la destruction de l’« armée bourgeoise », et ceux qui considèrent que l’armée est une institution républicaine et promeuvent simplement sa réforme28Voir la brochure de la LCR : Qu’est-ce que l’antimilitarisme révolutionnaire ?, Montreuil, PEC, 1981. LC, O Pièce 58167.. L’affaire de Draguignan en fournit très vite l’exemple.

Le 10 septembre 1974, une centaine d’appelés du contingent du 19e régiment d’artillerie de Draguignan, dans le Var, décide de manifester dans les rues de la ville afin de revendiquer de meilleures conditions dans la caserne, la liberté syndicale et politique et la fin du racisme contre les appelés antillais incorporés dans ce régiment29Robert Pelletier et Serge Ravet, Le mouvement des soldats. Les comités de soldats et l’antimilitarisme révolutionnaire, Paris, Maspero, 1976.. Cette troupe juvénile en treillis militaire, scandant des slogans le poing levé, est sans doute inconsciente de la gravité de son acte et de l’écho médiatique à venir de ce qui devient aussitôt un événement national. Trois appelés, désignés par les autorités militaires comme les meneurs, sont aussitôt mis aux arrêts. Parmi eux, Robert Pelletier, surveillant d’externat syndiqué au SGEN-CFDT, militant aguerri de la Ligue communiste et membre du comité de soldats local. Un procès retentissant s’ensuit à Marseille, où les soutiens de tout ce que compte la gauche se font remarquer en faveur des inculpés. Le procès devient celui de l’armée et des dérives du service militaire. Les condamnés reçoivent des peines de principe, couvrant la durée de leur détention préventive.

L’affaire de Draguignan est allée bien au-delà du projet de la Ligue communiste : profitant du climat du moment, d’un concours de circonstances, elle est un coup d’audace loin d’être parfaitement préparé et maîtrisé et témoigne d’une certaine insouciance de cette jeunesse révolutionnaire face à une institution d’ordre comme l’armée. Draguignan prend pourtant valeur d’exemple : d’autres manifestations éclatent durant les mois qui suivent à Karlsruhe (RFA), Nancy, Verdun et Lunéville. Les actions collectives prennent diverses formes : s’abstenir de déjeuner au réfectoire et faire une sortie en masse, hors du quartier consigné ; se rendre en vêtements civils à la levée des couleurs ou refuser d’y assister ; refuser de participer aux activités militaires de la journée ; refuser de reprendre le travail ou encore occuper des locaux.

L’année 1974 marque donc l’apparition massive des comités de soldats. Si leur principale activité consiste en la réalisation d’un bulletin ronéotypé dans chaque caserne où ils sont implantés, les membres de ces comités clandestins s’expriment aussi publiquement, au gré des événements, multipliant les communiqués destinés à la presse, les tracts, les motions de soutien en faveur des luttes locales ou des déserteurs et insoumis poursuivis devant la justice. Si les membres des comités de soldats viennent surtout de la Ligue communiste, on y trouve aussi des socialistes unifiés, des membres du groupe Révolution !, des anciens de l’organisation maoïste de la Gauche prolétarienne, des communistes et des socialistes, même si leur direction nationale s’y oppose.

Pour réussir, ces militants aguerris cherchent à étendre leur mobilisation à des appelés souvent indifférents à la politique, de jeunes paysans et travailleurs. Tout l’enjeu pour ces militants révolutionnaires qui perçoivent le service militaire comme un terrain propice pour « aller au peuple30Julie Pagis, Mai 68, un pavé dans leur histoire. Événements et socialisation politique, Paris, Presses de Sciences Po, 2014. » est, pour reprendre leur expression, de faire « progresser la conscience de classe » du contingent. La distance pouvait en effet être grande dans la chambrée entre les partisans de la révolution qui puisaient leurs références chez Lénine et Che Guevara et ceux, bien plus nombreux parmi cette nouvelle génération d’appelés, qui partageaient l’ambiance pacifiste et non violente de l’époque et rêvaient surtout d’échapper au service national. S’il serait schématique et excessif de parler d’une synthèse, et moins encore d’une alliance, entre des hippies peace and love adeptes du macramé et des antimilitaristes déterminés à user de la violence par les armes, la cristallisation dans les régiments d’appelés dit combien un sentiment de révolte caractérise dans les années 1968 une jeunesse qui, pour une partie d’entre elle, veut encore être révolutionnaire. La morne plaine des casernes n’attend en effet qu’une étincelle : qu’il s’agisse d’un accident lors d’une manœuvre ou d’un exercice, d’une faute de commandement, d’une nouvelle vexation, d’un ordinaire dégradé par de mauvais repas ou des retards de train pendant les permissions, les raisons sont nombreuses d’allumer l’incendie de la contestation. Les contraintes pesantes de la vie militaire et les brimades d’un petit encadrement encore marqué par les méthodes de commandement en vigueur lors des conflits indochinois et algérien paraissent désormais moins acceptables pour la nouvelle génération qui effectue son service.

À ce titre, l’ombre portée par ce que l’on continue de qualifier d’« événements », et non de guerre d’Algérie, pèse encore de tout son poids douze ans après la fin du conflit. Si le silence règne pour une large part dans les rangs d’une armée française épurée de ses éléments les plus radicaux, les souvenirs douloureux du départ d’Algérie et les controverses mémorielles qui n’ont cessé de scander l’actualité participent d’une interminable sortie de guerre31Raphaëlle Branche, La guerre d’Algérie : une histoire apaisée ?, Paris, Seuil, 2005.. La sortie en 1973 du film R.A.S. d’Yves Boisset en est un bon indice : l’évocation des méthodes de l’armée française pour mettre au pas les jeunes soldats en Algérie est symptomatique de la forte défiance en laquelle est alors tenu le monde militaire.

Soulignons à cet égard l’intense vie culturelle antimilitariste, faite de festivals de films et de conférences publiques partout en France, relayées par des organisations politiques et des intellectuels. Au côté du cinéma, la chanson joue un rôle de premier ordre avec Maxime Le Forestier (auteur de la chanson Le Parachutiste en 1972), vedette de la jeunesse des années 1970. Il rejoint de nombreux chanteurs engagés qui, de Boris Vian (Le Déserteur, 1955) à Léo Ferré (Les Vigiles, 1947, Mon Général, 1947, Miss guéguerre, 1961, Pacific Blues, 1967) en passant par Georges Brassens (La Mauvaise Réputation, 1952), entretiennent le désamour pour l’armée. Croqué par les dessins de Charlie Hebdo, l’antimilitarisme est avant tout un phénomène générationnel, celui d’une « rebelle jeunesse32Henri Weber, Rebelle jeunesse, Paris, Robert Laffont, 2018. » pour reprendre le titre d’un ouvrage d’Henri Weber, figure de 1968 passée par le trotskisme avant de rejoindre le PS.

Si les comités de soldats et l’antimilitarisme continuent de se déployer tout au long de l’année suivante, les effets combinés de la répression de la contestation et des réformes du service national entreprises par Valéry Giscard d’Estaing affaiblissent fortement le mouvement des soldats, de sorte que, après avoir connu un pic en 1975, la contestation décline progressivement, à l’image du reflux plus général de l’extrême gauche dans la vie politique française. L’ambiance soixante-huitarde s’évanouit progressivement.

En 1981, la victoire électorale des socialistes trouve la lutte antimilitariste dans un état moribond, sans qu’elle ait définitivement disparu. Les mesures prises par le gouvernement Mauroy (abandon du projet d’extension du camp militaire au Larzac, nouvelles réformes du service national et de la discipline, remplacement de la Sécurité militaire, suppression de la justice militaire et de la Cour de sûreté de l’État), si elles furent jugées insuffisantes par tous ceux qui voulaient voir un changement radical de modèle militaire, neutralisèrent l’influence des derniers comités qui surgissaient encore ici et là33Maxime Launay, La gauche et l’armée en France. De Mai 68 à nos jours, Paris, Nouveau Monde éditions, à paraître..

Conclusion

La crise antimilitariste des années 1970 vient rappeler combien l’institution militaire, et à travers elle le ministère de la Défense, avait une dimension très politique à cette période. Le fait est connu pour le ministère de l’Intérieur incarné au même moment par Raymond Marcellin, mais c’est aussi très largement vrai pour les questions militaires et de défense très investies par les gaullistes depuis les débuts de la VRépublique.

Du côté des militants révolutionnaires, si l’objectif de déstabiliser l’institution militaire a été atteint, celui de l’immobiliser complètement ne l’a pas été. Il existait non seulement une différence irréductible entre ceux qui prônaient un antimilitarisme révolutionnaire et un sentiment plus diffus de lassitude au sein du contingent, mais, plus encore, le cœur des forces armées, fondé sur des unités déjà largement professionnalisées et de hautes technologies, n’a pas été touché.

Du côté de l’État, il apparaît paradoxalement que c’est l’institution militaire qui a été la grande bénéficiaire de cette crise antimilitariste. Elle a eu certes à souffrir sur le moment d’être le réceptacle des mouvements contestataires post-68 qui s’opposaient à un pouvoir gaullo-pompidolien accusé de préférer le maintien de l’ordre social à sa transformation mais, face aux critiques, elle y a gagné un engagement plus important à ses côtés des autorités civiles et elle a été poussée à s’adapter au besoin d’une plus forte horizontalité dans les relations sociales. Plus fondamentalement, le processus de civilianisation dans laquelle elle était engagée s’observait par une décorrélation de plus en plus nette entre la citoyenneté et le port des armes. De ce point de vue, il faut resituer cette crise antimilitariste dans le cadre d’un cycle plus large de déprise du fait militaire débuté avec la fin des guerres de décolonisation et qui ne s’achève qu’avec la suspension du service national en 1997.

En procédant à son aggiornamento, l’armée a fortement changé et sa popularité n’a pas cessé de croître jusqu’à aujourd’hui. Il est à ce titre frappant de constater combien, en cinquante ans, ce passage de l’antimilitarisme au plébiscite actuel des armées dit beaucoup des mutations de la société française.

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    Michelle Zancarini-Fournel, Le moment 68. Une histoire contestée, Paris, Seuil, 2008 ; Geneviève Dreyfus-Armand, Robert Frank, Marie-Françoise Lévy et al. (dir.), Les années 68. Le temps de la contestation, Bruxelles, Complexe, 2000.
  • 2
    Je remercie vivement Chantal Dukers pour la relecture de ce texte.
  • 3
    Xavier Vigna, L’insubordination ouvrière dans les années 68. Essai d’histoire politique des usines, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007.
  • 4
    Bruno Benoit, Christian Chevandier, Gilles Morin et al. (dir.), À chacun son mai ? Le tour de France de mai-juin 1968, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2011 ; François Dubet, Le déclin de l’institution, Paris, Seuil, 2002 ; Elsa Génard, Mathilde Rossigneux-Méheust (dir.), Routines punitives. Les sanctions du quotidien, XIXe-XXsiècle, Paris, CNRS, 2023.
  • 5
    5,8% en moyenne entre 1959 et 1971. Dominique Lejeune, La France des Trente Glorieuses, 1945-1974, Paris, Armand Colin, 2015.
  • 6
    La première grande crise remonte au tournant du XXsiècle. Voir Éric Fournier et Arnaud-Dominique Houte (dir.), À bas l’armée ! L’antimilitarisme en France du XIXsiècle à nos jours, Paris, Éditions de la Sorbonne, 2023.
  • 7
    Éric Neveu, Sociologie politique des problèmes publics, Paris, Armand Colin, 2015.
  • 8
    Jean Rabaut (dir.), L’antimilitarisme en France. 1810-1975, faits et documents, Paris, Hachette, 1975 ; Alain Brossat et Jean-Yves Potel (dir.), Antimilitarisme et révolution. Anthologie de l’antimilitarisme révolutionnaire, Paris, Union générale d’éditions, 1976, 2 vol. ; Marc Angenot, L’antimilitarisme : idéologie et utopie, Saint-Nicolas, Presses de l’Université Laval, 2003.
  • 9
    Même si celui-ci est en pratique quasiment inexistant depuis la création des forces spécialisées en la matière, les CRS et la gendarmerie mobile, la répression des grèves de 1947-1948 faisant exception.
  • 10
    Mouvement d’action judiciaire, Les droits du soldat. Statut, discipline et justice militaire, Paris, Maspero, 1975.
  • 11
    Commission Armées-Jeunesse, « Le service national », note d’information, 1973. SHD, GR 2 T 168, EMAT : Directives du CEMAT, information et relations publique, conférences d’informations, Commission Armée-Jeunesse, presse, information sur les personnels féminins (1971-1979).
  • 12
    « L’histoire nous mord la nuque », disait l’un des dirigeants de la LC, Daniel Bensaïd. Voir Daniel Bensaïd et Henri Weber, Mai 1968 : une répétition générale, Paris, Maspero, 1968.
  • 13
    Le terme « subversion » est aussi utilisé comme notion savante, à l’exemple de Michael Hardt, The Subversive Seventies, New York, Oxford University Press, 2023.
  • 14
    Le rôle du contingent n’a pas été négligeable, mais davantage par son inertie. Voir Maurice Vaïsse, Comment de Gaulle fit échouer le putsch d’Alger, Paris, Odile Jacob, 2021 [Bruxelles, André Versaille, 2011].
  • 15
    « Une réunion de protestation contre l’incarcération de trois soldats du contingent est prévue pour jeudi à Rennes », Le Monde, 29 janvier 1970.
  • 16
    Didier Leschi et Robi Morder, Quand les lycéens prenaient la parole, Paris, Syllepse, 2018.
  • 17
    SHD, DE 2007 ZB 20 15, DSM, Synthèses mensuelles, 1968-1969.
  • 18
    Paru dans Rouge, Libération et Politique Hebdo le 16 mai 1974. Voir aussi note de la Direction de la sécurité militaire, « Fiche concernant l’Appel des Cent », 20 mai 1974. SHD, GR 1 R 1541, Appels nationaux et manifestations (1974-1981) : Appel des Cent.
  • 19
    Maud Chirio, « 1973. L’autre 11 septembre », dans Patrick Boucheron (dir.), Histoire mondiale de la France, Paris, Seuil, 2017, p. 707-711 ; Caroline Moine, « « Votre combat est le nôtre ». Les mouvements de solidarité internationale avec le Chili dans l’Europe de la Guerre froide », Monde(s), n°8, 2015, pp. 83‑104.
  • 20
    Michel Rocard, « Madrid, Athènes et Santiago », Le Monde, 22 septembre 1973.
  • 21
    Christophe Batardy, Le programme commun de la gauche, 1972-1977, Pessac, Presses universitaires de Bordeaux, 2021.
  • 22
    François Cochet et Olivier Dard (dir.), Subversion, anti-subversion et contre-subversion, Paris, Riveneuve, 2009.
  • 23
    Jacques Isnard, « “À la défense nationale, on veut substituer la démission nationale” déclare M. Robert Galley », Le Monde, 15 mai 1973.
  • 24
    François Mitterrand, Le coup d’État permanent, Paris, Plon, 1964.
  • 25
    Maurice Vaïsse, La grandeur. Politique étrangère du général de Gaulle, 1958-1969, Paris, Fayard, 1998.
  • 26
    Olivier Schmitt, “The Reluctant Atlanticist: France’s Security and Defence Policy in a Transatlantic Context”, Journal of Strategic Studies, n°40/4, juin 2017, pp. 463-474.
  • 27
    Maxime Launay, La rose et le glaive : les socialistes et la défense dans les années 1970, Fondation Jean-Jaurès, 2018.
  • 28
    Voir la brochure de la LCR : Qu’est-ce que l’antimilitarisme révolutionnaire ?, Montreuil, PEC, 1981. LC, O Pièce 58167.
  • 29
    Robert Pelletier et Serge Ravet, Le mouvement des soldats. Les comités de soldats et l’antimilitarisme révolutionnaire, Paris, Maspero, 1976.
  • 30
    Julie Pagis, Mai 68, un pavé dans leur histoire. Événements et socialisation politique, Paris, Presses de Sciences Po, 2014.
  • 31
    Raphaëlle Branche, La guerre d’Algérie : une histoire apaisée ?, Paris, Seuil, 2005.
  • 32
    Henri Weber, Rebelle jeunesse, Paris, Robert Laffont, 2018.
  • 33
    Maxime Launay, La gauche et l’armée en France. De Mai 68 à nos jours, Paris, Nouveau Monde éditions, à paraître.

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