Dérives autoritaires et retour de l’autoritarisme en Afrique de l’Ouest

Que signifient les différents et récents « soubresauts » politiques en Afrique de l’Ouest – coups d’État, modifications constitutionnelles, etc. ? S’agit-il d’un retour de l’autoritarisme ? Le chercheur Hugo Logez propose une analyse de ce processus pour le moins régressif et inquiétant.

Le 5 septembre 2021, Mamadi Doumbouya, colonel de l’armée guinéenne, renversait le régime du président Alpha Condé, suspendait la constitution et annonçait la dissolution des institutions et du gouvernement en place1Anne-Cécile Robert, « Coup d’Etat en Guinée », Le Monde diplomatique, 6 septembre 2021.. Unanimement condamné par la communauté internationale, dont la France qui a immédiatement réclamé la libération du président déposé, le coup d’État a attiré l’attention des observateurs sur la dérive à l’œuvre dans le pays2« Guinée : la France condamne la tentative de putsch et appelle à la libération du président Alpha Condé », Franceinfo, 6 septembre 2021.. Le son de cloche a cependant été bien différent en Guinée, où le putsch a été suivi de scènes de liesse à Conakry, tandis que la plupart des formations politiques ont salué un acte libérateur. Ce coup d’État serait en effet venu sanctionner le tournant autoritaire pris par Alpha Condé ces dernières années, lui qui avait été réélu en octobre 2020 pour un troisième mandat très contesté, symbole des dysfonctionnements de la démocratie dans la région3Boubacar Sanso Barry, « Coup d’État en Guinée : la voix inaudible de la communauté internationale », Ledjeli, 6 septembre 2021.. La Guinée n’est en effet pas un cas isolé parmi les pays d’Afrique de l’Ouest qui semblaient pourtant bien avancés dans les processus démocratiques. Les pays francophones en particulier ont été marqués par de nombreuses crises politiques au cours des deux dernières années, du coup d’État du 18 août 2020 au Mali à celui du 5 septembre en Guinée, en passant par les troisièmes mandats trustés par Alpha Condé et Alassane Ouattara fin 20204Art. cit.. Plus que des convulsions passagères, ces crises politiques sont le résultat d’un malaise politique plus profond. Les démocraties francophones font aujourd’hui face à des dérives autoritaires qui malmènent les processus électoraux, le pluralisme, le fonctionnement du gouvernement, la participation politique et les libertés civiles5Ce sont là les critères principaux retenus par The Economist Intelligence Unit sur lesquels nous nous appuyons. « Global democracy has another bad year », The Economist, 22 janvier 2020.. Mais le basculement est-il réel ou s’agit-il d’un simple effet d’optique ? Certains indicateurs viennent en tout cas appuyer la tendance d’un retour de l’autoritarisme : selon le classement établi par Freedom House en 2019, cinq des douze pays ayant le plus régressé sur le plan démocratique étaient situés en Afrique de l’Ouest, quatre d’entre eux étaient francophones (Bénin, Burkina Faso, Mali et Guinée)6« West African Security and Democracy. Stepping forward or moving back ? », Solace Global, décembre 2020.. Ce recul est d’autant plus inquiétant qu’il semble faire tache d’huile, si bien que le logiciel démocratique serait aujourd’hui « en panne » dans l’ensemble de la région, selon les mots de l’analyste Gilles Yabi7Gilles Yabi, « En Afrique de l’Ouest, le processus de consolidation démocratique est en panne », Le Monde, 26 mars 2021.. En outre, de nombreux espoirs avaient été placés dans les démocraties ouest-africaines francophones au cours de la dernière décennie, ainsi que dans les leaders issus de la génération des opposants historiques comme Alpha Condé, Alassane Ouattara voire Ibrahim Boubacar Keïta, finalement devenus des figures de la dérive présidentielle.

Ces pays prétendent pourtant au titre de démocratie, et tous organisent des élections multipartites depuis les conférences nationales souveraines des années 1990. Depuis, les qualificatifs se sont multipliés pour désigner les démocraties africaines aux accents autoritaires : démocrature, démocratie autoritaire, ou démocratie hybride n’en sont qu’un échantillon8Patrick Quantin, « La démocratie en Afrique à la recherche d’un modèle », Pouvoirs, n°129, 2009, p. 65-76.. Cette inflation des termes en dit long sur la résilience de l’autoritarisme hérité des périodes coloniale et postcoloniale, et témoigne également de la difficulté à catégoriser ces régimes et à saisir les ressorts du regain autoritaire qui se joue aujourd’hui.

Les signes d’un retour autoritaire en Afrique de l’Ouest

Plus de trente ans après le nouvel élan politique amorcé par les Conférences nationales souveraines, la démocratie élective n’a pas répondu à tous les espoirs placés en elle. Au contraire, la trajectoire politique de nombreux pays ouest-africains semble s’être inversée. Depuis quelques années, les signes d’un retour de l’autoritarisme dans la région se sont multipliés, le plus révélateur étant la propension des dirigeants à contourner la limitation des mandats à coup de révisions constitutionnelles. Ces « révisions déconsolidantes » sont devenues un moyen pratique de remettre artificiellement les compteurs à zéro pour les présidents peu enclins à quitter le pouvoir9Ismaïla Madior Fall, Les révisions constitutionnelles au Sénégal : révisions consolidantes et révisions déconsolidantes de la démocratie sénégalaise, Dakar, CREDILA, 2012.. Si ces coups d’État constitutionnels sont monnaie courante sur le continent, l’Afrique de l’Ouest semblait épargnée par de telles dérives, à l’exception du Togo où Gnassingbé Eyadéma fut l’un des premiers à recourir à ce procédé en 2002. Les tentatives avortées de coups constitutionnels au Nigeria en 2006, au Sénégal en 2011 et au Burkina Faso en 2014 avaient pourtant laissé entrevoir des institutions et une société civile capables d’enrayer les inclinations autoritaires des présidents sortants10Candace Cook, Joseph Siegle, « En Afrique, le contournement des limites de mandats fragilise la gouvernance », Centre d’études stratégiques de l’Afrique, 14 septembre 2020.. Au Nigeria, le sénat avait rejeté un amendement proposé par Olusegun Obasanjo lui permettant de viser un troisième mandat, tandis qu’au Sénégal et au Burkina Faso, les mouvements « Y’en a marre » et « Le Balais citoyen » avaient joué un rôle important dans les départs respectifs d’Abdoulaye Wade et de Blaise Compaoré11Bernard Coovi, « Démocratie : la tentation autoritaire en Afrique de l’Ouest », Neo Africa News, 27 mai 2020..

Or, la voie du troisième mandat semble peu à peu s’imposer dans la région. En Guinée, Alpha Condé, en poste depuis 2011, avait organisé le 22 mars 2020 un référendum constitutionnel lui permettant de briguer un troisième mandat controversé lors de l’élection présidentielle d’octobre, qu’il remporte avec 59,49% des suffrages12« Alpha Condé proclamé vainqueur de l’élection présidentielle en Guinée », Le Monde, 24 octobre 2020.. En Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara, élu en 2010 et réélu en 2015, a profité de la nouvelle Constitution adoptée en 2016 pour briguer et remporter sa troisième élection en novembre 202013« En Côte d’Ivoire, le Conseil constitutionnel valide la réélection d’Alassane Ouattara pour un 3e mandat », Le Monde, 9 novembre 2020.. Les troisièmes réélections coup sur coup d’Alpha Condé et d’Alassane Ouattara à l’automne 2020, au mépris des lois fondamentales guinéenne et ivoirienne prévoyant un maximum de deux mandats consécutifs, font peser la menace d’une contagion dans les autres démocraties ouest-africaines. Au Sénégal, par exemple, Macky Sall laisse planer le doute quant à ses intentions pour 2024, suscitant l’inquiétude et la colère de l’opposition et d’une partie de la société civile sénégalaise, qui rejoue dix ans après l’opposition du Mouvement du 23 juin 2011 au « ticket présidentiel » d’Abdoulaye Wade14Justine Brabant, « Le militant sénégalais Fadel Barro : ‘‘Il fallait que ça explose’’ », Mediapart, 17 mars 2021.. La Gambie est quant à elle confrontée à une situation différente : le projet de nouvelle constitution, censé rétablir l’État de droit après plus de deux décennies de dictature, a été rejeté en septembre 2020 par les soutiens du président Adama Barrow et les députés de l’ancien président Yahya Jammeh. Dans le camp de Barrow, c’est notamment la limitation à deux mandats présidentiels de cinq ans qui a provoqué le refus15Report of the Secretary-General on the activities of the United Nations Office for West Africa and the Sahel, United Nations Security Council, 24 décembre 2020.. Ces derniers mois, le Niger fait presque figure d’exception, Mahamadou Issoufou laissant la place à Mohamed Bazoum au terme de ses deux mandats, pour ce qui a été la première transition démocratique entre deux présidents dans l’histoire nigérienne (ce qui a notamment valu à l’ancien président le prix Ibrahim 2020)16« Le président sortant du Niger, Mahamadou Issoufou, reçoit le prix Ibrahim 2020 », Le Monde, 8 mars 2021..

La tentation du troisième mandat n’est cependant pas l’unique indicateur du retour des autoritarismes dans la région, elle va de pair avec la mise au pas de l’opposition politique. Au Sénégal, Ousmane Sonko, principal opposant au pouvoir, avait été arrêté pour viols présumés début mars 2021. Sonko a été relâché au bout de quelques jours sous la pression de ses partisans et du mouvement M2D (Mouvement de défense de la démocratie), après plusieurs jours d’affrontements d’une ampleur inconnue depuis plusieurs années au Sénégal17« Sénégal : l’opposant Ousmane Sonko relâché, le président Macky Sall appelle au calme », Le Monde, 8 mars 2021.. En Côte d’Ivoire, l’ancien Premier ministre Guillaume Soro, candidat à l’élection présidentielle d’octobre 2020 aujourd’hui en exil, avait déjà été condamné en avril 2020 à vingt ans de prison et cinq ans d’inéligibilité pour recel de détournement de deniers publics (dans un procès aux airs de règlement de compte politique), avant d’être à nouveau condamné à perpétuité en juin 2021 pour atteinte à la sûreté de l’État18« Côte d’Ivoire : l’ex-premier ministre Guillaume Soro condamné à la prison à perpétuité pour ‘‘atteinte à la sûreté de l’État’’ », Le Monde, 23 juin 2021.. Entre août et octobre 2020, au moins 41 personnes ont été arrêtées dans tout le pays pour avoir manifesté contre le troisième mandat d’Alassane Ouattara19« Côte d’Ivoire. Les autorités doivent veiller au respect des droits humains avant, pendant et après l’élection », Amnesty International, 30 octobre 2020.. Au Bénin, l’opposant Sébastien Ajavon aujourd’hui réfugié politique en France, déjà condamné en 2018 à vingt ans de prison pour trafic de cocaïne, a été à nouveau condamné par contumace à cinq ans supplémentaires de prison pour faux, usage de faux et escroquerie20« Au Bénin, Sébastien Ajavon à nouveau condamné et deux autres opposants incarcérés », Le Monde, 3 mars 2021.. La Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) a demandé à la Côte d’Ivoire et au Bénin de suspendre les jugements et mandats d’arrêt à l’encontre de Guillaume Soro et Sébastien Ajavon. En réponse, les deux pays se sont retirés en avril 2020 du protocole instituant la CADHP, dénonçant une ingérence de la Commission dans leurs affaires intérieures21Bernard Coovi, « Démocratie : la tentation autoritaire en Afrique de l’Ouest », Neo Africa News, 27 mai 2020.. Difficile de ne pas voir dans ces affaires l’éviction de l’opposition politique, pratique également observée en Guinée à quelques jours des élections d’octobre 2020, lorsque plusieurs figures majeures de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), Cellou Baldé, Ousmane Gaoual Diallo, Abdoulaye Bah et Étienne Soropogui, ont été incarcérées pour « atteinte aux intérêts de la nation »22Laurent Larcher, « En Guinée, la dérive autoritaire d’Alpha Condé », La Croix, 18 novembre 2020..

Plus globalement, c’est la liberté politique qui est en régression, les ressources coercitives de l’État (police, armée, tribunaux) devenant les instruments de la dérive autoritaire. En période électorale, les répressions à l’encontre de la société civile sont encore habituelles, comme en Guinée où, selon l’opposition, au moins 46 personnes auraient été tuées par les forces de sécurité après le scrutin présidentiel23Laurent Larcher, « En Guinée, la dérive autoritaire d’Alpha Condé », La Croix, 18 novembre 2020.. La liberté d’expression n’est pas épargnée non plus : au Sénégal, Me Moussa Diop, directeur de la compagnie étatique Dakar Dém Dikk, a été mis à pied par le président Macky Sall après avoir qualifié de « coup d’État constitutionnel » la possibilité d’un troisième mandat24Ousmane Djiby Sambou, « Les institutions démocratiques ont-elles failli ? Ivoiriens, Guinées, et Sénégalais à l’épreuve des troisièmes mandats qu’ils rejettent », Afrobarometer, Dépêche 390, 15 septembre 2020.. À l’échelle de la région, les récentes périodes électorales ont été marquées par des coupures d’accès à internet, notamment en Guinée à l’occasion du référendum constitutionnel du 22 mars 2020, mais également à la suite de l’élection présidentielle d’octobre. Cette censure numérique ponctuelle est accompagnée de nouvelles régulations des plateformes numériques, jugées attentatoires à la liberté d’expression25Astou Diouf, « La régulation des plateformes numériques et la liberté d’expression en Afrique de l’Ouest », Heinrich Böll Stiftung, mai 2021.. Ces législations sont en effet régulièrement instrumentalisées pour faire taire les opposants et museler la liberté de la presse. Au Bénin notamment, un Code numérique adopté en 2017, introduit pour lutter contre la cybercriminalité, a permis l’arrestation de 17 Béninois à ce jour, dont le journaliste Ignace Sossou26« Bénin. Au moins 17 personnes poursuivies en moins de deux ans », Amnesty International, 20 janvier 2020.. De fait, la justice ne semble pas non plus échapper à l’instrumentalisation politique dans de nombreux pays ouest-africains. Déjà en 2019, des magistrats ivoiriens alertaient sur l’emprise du pouvoir exécutif sur leur fonction et les régulières violations du cadre légal27André Silver Konan, « Côte d’Ivoire : se disant victimes de pressions politiques, des magistrats en appellent à Ouattara », Jeune Afrique, 18 janvier 2019.. Au Bénin, à quelques jours de l’élection présidentielle d’avril, un juge de la Cour de la répression des infractions économiques et du terrorisme (CRIET) dénonçait les pressions politiques subies par l’institution judiciaire béninoise. Créée en 2018, cette cour spéciale, qui a notamment ordonné les condamnations des opposants Reckya Madougou, Sébastien Ajavon et du constitutionnaliste Joël Aïvo, est accusée d’être un instrument judiciaire au service du gouvernement28« Bénin : un juge dénonce des pressions politiques à quelques jours de l’élection présidentielle », Franceinfo Afrique, 6 avril 2021 ; Pierre Lepidi, Francis Kpatindé, « Au Bénin, ‘‘le Professeur’’ Joël Aïvo reste en prison », Le Monde, 14 juillet 2021..

Les dérives autoritaires ne sont pas une nouveauté en Afrique de l’Ouest. Au cours de la dernière décennie, certains observateurs alertaient sur l’érosion progressive des principes de l’État de droit et de la liberté d’expression, particulièrement dans les « démocraties modèles » sénégalaise et béninoise29Étienne Smith, « Présidentielle au Sénégal, les faux semblants d’un ‘‘démocratie modèle’’ », The Conversation, 4 mars 2019 ; Richard Banégas, « L’autoritarisme à pas de caméléon ? Les dérives de la révolution passive démocratique au Bénin », Afrique contemporaine, n°249, janvier 2014, p. 99-118.. Les signes d’un retour de l’autoritarisme sont pourtant aujourd’hui bien visibles, un autoritarisme nouveau qui semble très bien s’accommoder des exigences du système électoral, et incite à un changement de perspective.

L’illusion électorale

Les scrutins africains sont d’ordinaire considérés par les observateurs comme des moments révélateurs de l’état des démocraties, particulièrement les élections présidentielles en Afrique francophone, tradition juridique française oblige. Pourtant, les nouveaux autoritarismes ouest-africains jouent à un jeu électoral dont ils maîtrisent tous les codes. Car les partis de la majorité présidentielle n’ont pas nécessairement recours à la fraude pour gagner, mais plutôt aux avantages d’encadrement hérités des partis-États. C’est donc essentiellement par la voie légale que se jouent aujourd’hui les dérives dans la région, les pouvoirs en place ayant parfaitement domestiqué les processus électoraux et les juridictions attenantes.

Parmi ceux-ci, la réforme des codes électoraux par les pouvoirs en place occupe une place importante. Au Burkina Faso, en Guinée au Niger, au Bénin et au Sénégal, ces réformes ont soit augmenté drastiquement le montant des droits d’inscription pour les candidats, soit instauré un système restrictif de parrainage par d’autres acteurs politiques30Nadia Adam, David Zounmenou, « Les ‘‘réformes électorales’’ étouffent la démocratie en Afrique de l’Ouest », Institut d’études et de sécurité, 25 mars 2021.. De telles mesures prétendent améliorer les processus électoraux en luttant contre l’inflation du nombre de formations politiques. En réalité, elles permettent surtout aux dirigeants de disqualifier leurs opposants ou de se débarrasser des vieilles gardes politiques, encourageant du même coup le développement d’un modèle ploutocratique et une fermeture de l’espace politique. C’est peut-être au Bénin (où le système de partis est particulièrement atomisé – plus de 200 formations politiques) que ce procédé a été le plus visible, la caution de dépôt de candidature passant d’une dizaine de millions de FCFA à 250 millions (environ 380 000 euros) avec la réforme du code électoral en septembre 2018. Lors des élections législatives de mai 2019, seules les deux listes favorables au président Talon, celles de l’Union progressiste et du Bloc républicain, étaient donc autorisées à participer aux scrutins. Après six mois de négociations, une nouvelle réforme (novembre 2019) abaisse finalement la caution à 50 millions de FCFA, mais introduit pour les candidats à la présidence un parrainage obligatoire par 10% des maires et des députés, tous acquis au camp présidentiel depuis les élections législatives tronquées de 2019. Ainsi, à l’approche du scrutin présidentiel de 2021, huit candidatures ne respectant pas le nouveau code électoral sont rejetées, faute de cautions ou de parrainages suffisants. Seuls deux candidats seront retenus pour affronter Patrice Talon, Corentin Kohoué (Les Démocrates) et Alassane Soumanou (Forces cauris pour un Bénin émergent). Presque inconnus du grand public, ces deux candidats ont été désignés par la majorité présidentielle au Parlement et désavoués par l’opposition31Frédéric Lejeal, Francis Kpatindé, « Au Bénin, un cycle de régression démocratique sans précédent », IRIS, 30 mars 2021.. Patrice Talon a ainsi été facilement réélu le 11 avril 2021 au premier tour, avec 86,3% des suffrages en sa faveur.

Ce sont cependant les juridictions en charge de l’application de ces codes électoraux et de l’organisation des scrutins qui sont le plus sujettes aux récupérations politiques : les commissions électorales dites « indépendantes ». Ces commissions, qui ont essaimé dans de nombreux pays (ouest-)africains depuis les années 1990, prennent des noms différents selon les pays : Commission électorale nationale indépendante (CENI) en Guinée, au Mali (supprimée en 2020), au Togo, au Niger, au Burkina Faso ou encore au Nigeria, Commission électorale nationale autonome (CENA) au Sénégal et au Bénin (où elle a été remplacée par un nouveau Conseil électoral à l’été 2021), ou tout simplement Commission électorale indépendante (CEI) en Côte d’Ivoire. Derrière ces appellations se trouvent des organismes dont les principales missions consistent à superviser et contrôler, en toute indépendance, les processus électoraux. Les premières sont apparues dans les années 1990, le Bénin faisant une nouvelle fois figure de pionnier avec la première CENA créée en 1995 dans le sillage de sa Conférence nationale. Si les modalités de désignation des membres de ces commissions peuvent varier selon les pays, la majorité a privilégié un système permettant d’y représenter équitablement le parti présidentiel, l’opposition et éventuellement la société civile. Parmi les pays francophones d’Afrique de l’Ouest, seul le Sénégal a fait le choix d’écarter les acteurs politiques de la CENA en y admettant uniquement des personnalités indépendantes. C’est également le choix privilégié par la plupart des pays anglophones (Gambie, Ghana, Nigeria, Sierra Leone et Liberia) ; on entrevoit ainsi les contours d’un système électoral francophone très spécifique dans la région, exception faite du Sénégal32Mathias Hounkpé, Ismaïla Madior Fall, Les commissions électorales en Afrique de l’Ouest. Analyse comparée, Abuja, Friedrich-Ebert-Stiftung, 2010..

Prévues pour assurer des élections libres, honnêtes et transparentes, ces commissions se retrouvent pourtant constamment dans la tourmente lors des périodes électorales, les résultats présentés étant la plupart du temps contestés par les perdants. Ce fut par exemple le cas de Cellou Dalein Diallo, opposant principal d’Alpha Condé lors de l’élection présidentielle d’octobre 2020, qui dénonçait un « hold-up » orchestré par le pouvoir présidentiel avec le concours de l’organe électoral33« Alpha Condé proclamé vainqueur de l’élection présidentielle en Guinée », Le Monde, 24 octobre 2020.. C’est l’indépendance même de ces organes qui est régulièrement mise en cause, comme au Togo en août dernier lorsque Nathaniel Olympio, président du Parti des Togolais, dénonçait l’iniquité d’une commission majoritairement composée de sympathisants du président Faure Gnassingbé34« Togo : l’opposition divisée sur les propositions de réformes de la concertation », RFI, 8 août 2021.. De même, en août 2020, le bruit court en Côte d’Ivoire que la CEI a radié des listes certains opposants sans raison apparente ; celle-ci répondra avoir seulement fait appliquer la loi électorale35« Côte d’Ivoire : la Commission électorale indépendante au centre de l’arène », Le Point Afrique, 5 août 2020.. Aussi n’est-il pas rare de voir les membres des partis d’opposition déserter ces commissions en signe de protestation, comme en Côte d’Ivoire justement, où les membres du Front populaire ivoirien (FPI) et de la Ligue du mouvement pour le progrès (LMP) refusaient de siéger à la CEI, à quelques semaines du scrutin présidentiel d’octobre 2020, dénonçant la « mascarade électorale » entretenue par la commission36« Côte d’Ivoire : le FPI se retire de la Commission électorale », RFI, 1er octobre 2020.. Pourtant, déjà en 2016, la CADHP avait rendu un arrêt jugeant la commission électorale ivoirienne déséquilibrée et demandait au gouvernement d’en modifier la composition. Force est donc de constater que la réforme effectuée avant le scrutin de 2020 n’a pas changé la donne37Saikou Oumar Balde, « Les chemins ambigus de la démocratie ouest-africaine entre progrès et dérives autoritaires. La Côte d’Ivoire, la Guinée et le Mali à la croisée des chemins », Sens public, 18 juin 2021..

Le cas guinéen donne un bon aperçu des modalités d’instrumentalisation des commissions électorales par le pouvoir en place. La Guinée s’est dotée d’une CENI en 2007, alors que l’opposition était entrée dans une logique de contestation systématique des élections. La CENI guinéenne est depuis chargée d’établir le fichier électoral, d’organiser et de superviser le déroulement des opérations de vote, et de proclamer les résultats provisoires. Mais depuis sa création, les partis politiques majoritaires au sein de la commission n’ont jamais perdu un scrutin. Le constat s’impose de lui-même : contrôler la CENI, c’est s’assurer la victoire électorale, à tel point qu’elle est devenue un enjeu de luttes politiques acharnées entre le parti présidentiel et l’opposition38Art. cit.. En 2019, Alpha Condé était justement parvenu à renforcer son contrôle sur la commission grâce à une nouvelle loi plus restrictive sur les modalités de sa composition. Cette loi prévoyait une commission composée de deux membres désignés par les organisations de la société civile, un par l’administration et quatorze issus des différents partis politiques. Pour pouvoir proposer des membres, les partis devaient remplir deux critères : avoir participé aux dernières élections législatives et présidentielles précédant la mise en place de la nouvelle commission, et avoir au moins deux députés à l’Assemblée nationale guinéenne. Or, l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), principal parti d’opposition, avait boycotté les législatives de mars 2020, se retrouvant sans députés. De fait, le Rassemblement du peuple de Guinée (RPG) du président Condé avait été le seul parti à mandater des membres à la commission, s’octroyant ainsi le contrôle total de l’élection. Dans ces conditions, le risque était alors grand de voir la CENI devenir un organe au service de l’exécutif et un instrument de manipulation électorale39Saikou Oumar Balde, « Les conséquences d’un changement constitutionnel sur le cadre électoral et l’alternance démocratique en Guinée », Sens public, 29 juillet 2020.. De telles craintes n’ont pas été déjugées par le scrutin présidentiel d’octobre, lors duquel le nombre de votants était dans certaines régions supérieur au nombre d’inscrits sur les listes40Saikou Oumar Balde, « Les chemins ambigus de la démocratie ouest-africaine entre progrès et dérives autoritaires. La Côte d’Ivoire, la Guinée et le Malin à la croisée des chemins », Sens public, 18 juin 2021.. Le cas guinéen n’est pourtant pas isolé, partout où les acteurs politiques sont autorisés à y siéger, les commissions électorales sont en effet minées par les instrumentalisations diverses et les conflits de partis, perdant ainsi en crédibilité auprès des électeurs41Pierre Jacquemot, De l’élection à la démocratie en Afrique (1960-2020), Paris, Fondation Jean-Jaurès, juin 2020, p. 26..

En plus des commissions électorales, la même instrumentalisation est à l’œuvre au sein des cours constitutionnelles, celles-ci permettant notamment aux pouvoirs en place d’étouffer les recours habituellement engagés par les candidats malheureux ou recalés. Les candidats éliminés par les commissions électorales ont en théorie la possibilité de jouer les prolongations faces aux cours constitutionnelles, souvent pour y dénoncer les abus de ces mêmes commissions. Mais à nouveau, le jeu semble faussé et les mécanismes de recours extravertis par le pouvoir présidentiel. En Côte d’Ivoire, ce n’est pas moins de 40 candidatures, dont celle de Laurent Gbagbo, qui ont été rejetées par le Conseil constitutionnel en août 202042« Côte d’Ivoire. Les autorités doivent veiller au respect des droits humains avant, pendant et après l’élection », Amnesty International, 30 octobre 2020..

Au Bénin, tous les recours des candidats aux élections présidentielles recalés par la CENA ont été rejetés par la Cour constitutionnelle43« Présidentielle au Bénin : la Cour constitutionnelle rejette les recours des candidats recalés », RFI, 18 février 2021., une Cour accusée par l’opposition d’être partisane depuis que sa présidence a été confiée à Joseph Djogbenou, ancien avocat de Patrice Talon44Morgane Le Cam, « Au Bénin, une démocratie qui chancelle et inquiète, à cinq mois de la présidentielle », Le Monde, 24 novembre 2020.. En Guinée, l’opposition a pu participer au scrutin d’octobre 2020, c’est donc dans un second temps qu’est intervenue la Cour constitutionnelle, le camp de l’opposant Cellou Dalein Diallo l’avait alors saisie pour contester les résultats annoncés par la CENI guinéenne, sans succès, l’institution étant inféodée au camp présidentiel45Agnès Faivre, « En Guinée, l’opposition conteste l’élection côté Cour », Libération, 2 novembre 2020.. En effet, si la Cour constitutionnelle guinéenne était autrefois indépendante, la nouvelle constitution adoptée en mars 2020 a remis en cause cette indépendance en la plaçant sous le contrôle direct de l’exécutif46Saikou Oumar Balde, « Les conséquences d’un changement constitutionnel sur le cadre électoral et l’alternance démocratique en Guinée », Sens public, 29 juillet 2020..

Ces récents exemples laissent penser que, en ce qui concerne les processus électoraux, les pays francophones d’Afrique de l’Ouest marchent dans les pas de la République démocratique du Congo, où la CENI et la Cour constitutionnelle sont régulièrement accusées de faire le jeu du pouvoir47« RDC : les élections de tous les dangers. Note 1 : La politisation des institutions chargées du processus », Congo Research Group, octobre 2018.. Derrière de solides vitrines constitutionnelles se cache un nouvel « autoritarisme électoral » qui a apprivoisé les scrutins et instrumentalise ses institutions48Patrick Quantin, « La démocratie en Afrique à la recherche d’un modèle », Pouvoirs, n°129, 2009, p. 65-76.. Pire, l’élection est devenue un moyen de légitimation des pouvoirs autoritaires, un rituel bien rodé dont les résultats verrouillés d’avance sont trop souvent avalisés par la communauté internationale. Dans ce processus, c’est notamment le rôle des commissions électorales, véritables machines à faire voter, de perpétuer l’érosion démocratique à travers les scrutins. La description de ces mécanismes permet en outre d’identifier les modalités particulières du retour de l’autoritarisme dans les démocraties francophones : la politisation des commissions électorales et le contrôle par l’exécutif des cours et conseils constitutionnels sont au cœur des dérives autoritaires qui se jouent lors des scrutins. De quoi renverser le paradigme de la démocratisation par l’élection : peut-être ne faut-il plus apprécier l’élection comme le symbole du fonctionnement de la démocratie, mais bien comme un observatoire des dérives autoritaires en Afrique de l’Ouest.

Les ressources de l’autoritarisme

Au cours de la dernière décennie, les manipulations constitutionnelles et le dévoiement des élections se sont soldés par un divorce entre une partie de la société civile et la politique : les scrutins ne semblent plus être désormais le rendez-vous de la nation dans nombre de pays ouest-africains. C’est particulièrement le cas en Côte d’Ivoire où les élections législatives de 2016 ont enregistré un taux de participation de 34%, de même qu’au Bénin où le scrutin de 2019 n’a pu compter que sur 25% des électeurs49Pierre Jacquemot, De l’élection à la démocratie en Afrique (1960-2020), Paris, Fondation Jean-Jaurès, juin 2020, p. 57.. Dans ces deux pays, même les scrutins présidentiels ne rassemblent plus autant, à peine plus de la moitié des votants s’étaient déplacés jusqu’aux urnes en Côte d’Ivoire en 2020 et au Bénin en 2021 (contre des participations supérieures à 80% lors des élections présidentielles respectives de 2010 et 2011).

Les partis politiques, aujourd’hui incapables de jouer le rôle de contre-pouvoirs crédibles, ont également leur part de responsabilité dans cette fatigue du vote. D’abord parce que dans certains pays ils ne fonctionnent que comme des « clubs électoraux », créés afin d’organiser des élections et des négociations post-électorales, sans autre but véritable que l’obtention et le partage du pouvoir. C’est particulièrement le cas du Bénin où, jusqu’aux réformes de 2018, les quelques 250 partis étaient captés par les leaders politiques à l’approche des grands scrutins ; c’est l’une des raisons pour lesquelles tous les présidents béninois depuis 1990 ont été élus sans être membre d’un parti politique50Expédit B. Ologou, « Democracy Capture in Benin », dans Democracy Capture in Africa. Benin, Ghana, Kenya, Mozambique, Nigeria, Accra, Ghana Center for Democratic Development, 2021, p. 33-56.. Plus généralement, les partis d’opposition traditionnels, représentants d’une classe politique vieillissante, ont raté l’encadrement des masses, particulièrement des jeunes et des femmes, et sont aujourd’hui bien incapables de garantir aux populations l’accès aux ressources de l’État51Alan Doss, « Sauvegarder la démocratie en Afrique de l’Ouest », Centre d’études stratégiques de l’Afrique, 29 septembre 2020..

Aussi ces partis sont-ils de plus en plus souvent dépassés ou remplacés par des mouvements citoyens ou des groupes religieux, plus à même de mobiliser massivement autour de thèmes socio-économiques ou politiques, à l’image des emblématiques mouvements « Y’en a marre » et « Le Balais citoyen » au Sénégal et au Burkina Faso lors de la dernière décennie52Laurent Fourchard, « Luttes et imaginaires démocratiques en Afrique », Libération, 18 février 2016.. C’est également ce qu’on a pu observer au Mali en 2019 et 2020, lorsque le Haut Conseil islamique malien, sous l’égide de l’imam Mahmoud Dicko, réunissait des milliers de manifestants pour forcer la démission du président Ibrahim Boubacar Keïta. Le déplacement du centre de gravité des contre-pouvoirs viendrait ainsi sanctionner l’échec des oppositions partisanes, impuissantes et dévitalisées. Cependant, la majorité des mouvements populaires, à la différence des partis traditionnels, n’ont pas les ressources nécessaires pour peser durablement contre les dérives autoritaires53Victor Magnani, Thierry Vircoulon, « Vers un retour de l’autoritarisme en Afrique ? », Politique étrangère, 2019, p. 11-23.. En effet, aucun mouvement de ce type n’a su empêcher Condé ou Ouattara de briguer un troisième mandat. Aurait-on surestimé, en faisant des exemples passés sénégalais et burkinabés la norme plutôt que l’exception, les capacités des mouvements populaires à contrecarrer les manœuvres anti-démocratiques des leaders ouest-africains ? Il semble en tout cas que la société civile et ses acteurs aient de plus en plus de mal à jouer le rôle de garde-fous démocratiques. À ce titre, l’évolution de la situation au Sénégal d’ici 2024, date de la prochaine échéance présidentielle, pourrait nous en dire beaucoup sur ce qu’il reste du Mouvement du 23 juin 2011 face aux ambitions latentes de Macky Sall.

Rien d’étonnant dans cette configuration à voir certains leaders ouest-africains prendre le virage autoritaire, et ainsi se complaire dans un système électoral et politique défectueux qui leur assure une rente politique facile. Comment font-ils cependant pour garder la main sur une partie de la société civile ? Probablement en jouant la carte de la séduction – identitaire parfois, économique souvent – en promettant l’accès aux ressources que les partis d’opposition ne sont justement plus en mesure d’assurer. De fait, le populisme est sans doute devenu un des ressorts principaux de ces autoritarismes. Un populisme ouest-africain qui, s’il a déjà été une réponse aux désagrégations économiques et politiques par le passé, combinerait aujourd’hui l’autoritarisme décisionnel du chef, le discours nationaliste et la rhétorique de la modernisation et du développement par le bas54Naomi Chazan et al., « Regimes in Independent Africa », dans Naomi Chazan et al., Politics and Society in Contemporary Africa, Boulder, Lynne Rienner, 1999.. Le développement par l’autoritarisme, en vogue dans les années 1970, connaît un retour en grâce parmi les présidents ouest-africains, probablement inspirés par les apparents succès de Paul Kagame au Rwanda55Nic Cheeseman, Jeffrey Smith, « The Retreat of African Democracy. The Autocratic Threat is Growing », Foreign Affairs, 17 janvier 2019.. Ce développementalisme exacerbé, incarné par quelques présidents partisans de la modernisation à tout prix, est pour Béatrice Hibou un mécanisme simultané de légitimation et de domination, qui évacue du même coup le politique en le reléguant à une question de gestion des ressources56Béatrice Hibou, Anatomie politique de la domination, Paris, La Découverte, 2011.. L’argument économique, porté par certains chefs d’État comme par les élites, n’échappe pas non plus à une rhétorique nationaliste teintée d’anticolonialisme, à même de cristalliser les frustrations et revendications populaires vis-à-vis de l’ancienne puissance coloniale57Ousman Blondin Diop, « De quoi la ‘‘francophobie africaine’’ est-elle vraiment le nom ? », Jeune Afrique, 7 avril 2021.. Paradoxalement, certains observateurs analysent le retour autoritaire et le désir d’hommes forts comme le symptôme d’un cruel manque de leadership, et la direction de politiques populistes comme une fuite en avant permettant d’amadouer la société civile58Sabine Cessou, « Où sont les leaders en Afrique de l’Ouest ? », Le Monde diplomatique, 9 septembre 2019.. Ce populisme, amalgamant personnalisation du pouvoir et nationalisme aux accents modernisateurs, laisse finalement entrevoir les relations ambiguës entre les régimes autoritaires et des populations capables d’accepter ponctuellement la domination pour des raison sécuritaires et/ou économiques.

On ne peut pas non plus négliger l’importance de la conjoncture internationale dans le regain de popularité des autoritarismes. Du côté européen, les sanctions prises contre les manipulations constitutionnelles sont inefficaces et souvent sélectives : certains pays, dont la France, s’accommodant très bien des autocrates dès lors que leurs intérêts économiques ou sécuritaires sont menacés, faisant du même coup le lit des discours populistes prompts à dénoncer des interférences néocoloniales. Au niveau régional, la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) semble globalement incapable d’empêcher les dérives autoritaires. Si elle avait exigé le départ de Laurent Gbagbo en 2010 (Côte d’Ivoire) ou celui de Yahya Jammeh en 2017 (Gambie), la gestion des crises malienne (2018) et guinéenne (2020) interroge. L’institution économique semble en effet plus préoccupée par le sauvetage des présidents, ou par l’application de sanctions après coup (d’État), que par l’empêchement ou la résolution des crises. Dans le même temps, d’autres acteurs plus présents sur le continent, la Russie et la Chine au premier plan, se posent aujourd’hui comme des alternatives politiques et économiques aux démocraties libérales occidentales. La réussite économique de la Chine en particulier semble inspirer de nombreux pays africains sur les avantages d’un système de gouvernance plus autoritaire. Le discours prononcé en 2019 par l’ambassadeur russe en Guinée, en faveur d’un troisième mandat d’Alpha Condé, allait dans ce même sens59Victor Magnani, Thierry Vircoulon, « Vers un retour de l’autoritarisme en Afrique ? », Politique étrangère, 2019, p. 11-23..

Ce n’est peut-être pas un hasard si ces autoritarismes renaissants adoptent un discours faisant la part belle au développement économique, mais plutôt le résultat de décennies de subversion de la sphère politique et des ressources de l’État par des acteurs économiques. Les programmes d’ajustement structurel des années 1980 avaient déjà entraîné un premier démantèlement des services de l’État (santé, instruction), tout en creusant d’avantage les inégalités sociales entre les plus démunis et les élites économiques. Les démocratisations des années 1990 n’ont pas inversé la tendance et ont permis à ces élites de se perpétuer dans de nombreux pays. Pire, l’ouverture politique et la libéralisation économique imposée par les transitions démocratiques ont presque partout accentué la diminution des prérogatives de l’État, par l’affaiblissement de ses capacités administratives et la privatisation progressive des fonctions régaliennes60Achille Mbembe, « Esquisse d’une démocratie à l’africaine », Le Monde diplomatique, octobre 2000.. Depuis les années 1990, l’envahissement des sphères administratives et politiques par des acteurs privés a amorcé une progressive « captation de la démocratie » dans de nombreux pays du continent, soit le détournement de la démocratie (de ses institutions et de ses acteurs) au profit d’intérêts non étatiques61Democracy Capture in Africa. Benin, Ghana, Kenya, Mozambique, Nigeria, Accra, Ghana Center for Democratic Development, 2021..

L’évolution du paysage politique béninois depuis la Conférence nationale pionnière de 1990 donne un bon aperçu de ladite captation. Dès les élections législatives de 1995, la jeune démocratie béninoise est confrontée à une pratique nouvelle vouée à se généraliser : la distribution d’argent durant la campagne par Adrien Houngbédji, leader du Parti du renouveau démocratique (PRD). Deux ans plus tard, l’entrepreneur Sefou Fagbohoun fonde son propre parti politique, ouvrant la voie à l’invasion de l’échiquier politique par les hommes d’affaires. De fait, l’ouverture au multipartisme ne s’est pas traduite par un système de financement public des partis, les hommes d’affaires sont ainsi devenus les principaux sponsors des formations politiques62Jan Niklas Engels, « Les partis et les systèmes des partis en Afrique. Cas du Bénin », Friedrich Ebert Stiftung, 2008.. Ces deux événements marqueraient le début de la marchandisation du jeu électoral et politique béninois, les scrutins suivants démontrant que la richesse d’un candidat était devenue une condition nécessaire à sa réussite. Cependant, si les milieux d’affaires ont bien embrassé l’espace politique, l’inverse est tout aussi vrai : les différents chefs d’État depuis 1991 ont promu ou destitué de grands entrepreneurs au sommet des industries nationales. L’actuel président Patrice Talon avait d’ailleurs été placé à la tête de l’industrie cotonnière par le président Nicéphore Soglo (1991-1996). En 2006, c’est dans ce contexte et en tant que grand magnat du coton qu’il s’est affirmé publiquement, en soutenant la candidature du futur président Boni Yayi, faisant ainsi la démonstration de l’influence des entrepreneurs sur la sphère politique grâce à leur capacité de financement63Richard Banégas, « L’autoritarisme à pas de caméléon ? Les dérives de la révolution passive démocratique au Bénin », Afrique contemporaine, 2014..

Comme ses prédécesseurs, l’actuel président s’appuie sur d’autres entrepreneurs pour gouverner, à l’image de son bras droit Olivier Boko, à la fois représentant officiel des intérêts des entreprises et ministre officieux du président64Vincent Duhem, « Bénin : Olivier Boko, l’ami dans l’ombre de Patrice Talon », Jeune Afrique, 13 mars 2017.. De fait, il y aurait aujourd’hui un véritable État parallèle au Bénin (shadow state dans la littérature anglophone), les ministères ayant été doublés dans leurs prérogatives par de nouvelles agences dépendantes de la présidence65Expédit B. Ologou, « Democracy Capture in Benin », dans Democracy Capture in Africa. Benin, Ghana, Kenya, Mozambique, Nigeria, Accra, Ghana Center for Democratic Development, 2021, p. 33-56.. Ce dédoublement des procédures et des institutions étatiques et administratives n’est pas une exception béninoise, dans de nombreux pays africains il fait partie de ce qu’Achille Mbembe nomme le « gouvernement privé indirect »66Achille Mbembe, De la postcolonie. Essai sur l’imagination politique dans l’Afrique contemporaine, Paris, La Découverte, 2020, p. 153..

Au nom d’une plus grande efficacité, cette « agencification » de la gouvernance affaiblit l’administration et trouble la traçabilité des dépenses publiques. Car sans surprise, les marchés publics, principaux canaux par lesquels circule l’argent de l’État, sont la première cible de ces captations et l’enjeu de luttes entre les politiques, les hauts fonctionnaires et les hommes d’affaires (ces catégories n’étant pas exclusives). Au cœur de ces luttes se trouve un « gentleman agreement » informel sur le pourcentage que toute entreprise verse à la chaîne politique et administrative qui lui attribue un marché (il se situerait aujourd’hui au-dessus de 10% au Bénin)67Marc Dossou Dokoui, Passation des marchés publics communaux en République du Bénin : Quelles stratégies pour freiner la corruption et asseoir une bonne gouvernance locale ?, Mémoire de master, Université Senghor, 2011, p. 9.. Depuis les années 1990, l’attribution des marchés publics béninois est émaillée de scandales, le plus médiatisé est sans doute celui de la construction du siège du Parlement sous la présidence de Boni Yayi. Le siège en question demeure inachevé en raison des faramineuses commissions dues à la cohorte d’intermédiaires (autorités gouvernementales, parlementaires, hauts fonctionnaires et hommes d’affaires) impliquée dans l’attribution du marché68Expédit B. Ologou, « Democracy Capture in Benin », dans Democracy Capture in Africa. Benin, Ghana, Kenya, Mozambique, Nigeria, Accra, Ghana Center for Democratic Development, 2021, p. 33-56 ; « Bénin : des ministres poursuivis », BBC News Afrique, 25 février 2013.. Ainsi, le cas béninois illustre la manière dont un écosystème politico-économique a pu profiter du processus de démocratisation pour subvertir progressivement l’État et réorienter les institutions démocratiques vers les intérêts de quelques-uns, rejouant ainsi la politique du ventre dans un système néolibéral aux accents autoritaires69Jean-François Bayart, L’État en Afrique. La politique du ventre, Paris, Fayart, 1989..

Les démocratisations et l’ouverture au multipartisme en Afrique de l’Ouest se seraient finalement soldées par l’aggravation des luttes pour la conquête et la conservation du pouvoir, et par la captation de la démocratie au profit d’intérêts non étatiques. Pour le politiste Jean-François Bayart, il y a un lien étroit entre cette privatisation progressive de l’État, bien visible au Bénin, et les rhétoriques nationalistes agitées par les populistes, comme celle de l’« ivoirité » qui pointe à chaque crise politique en Côte d’Ivoire. Ce double mouvement, d’ouverture à la logique néolibérale et de repli identitaire, serait à l’origine d’un courant « national-libéral » qui couve depuis les années 1970, renforce les capacités répressives des gouvernants et menace l’État de droit70Jean-François Bayart, L’impasse national-libérale. Globalisation et repli identitaire, Paris, La Découverte, 2017.. Pour autant, dans la lignée de cette captation de la démocratie, la place des pratiques informelles, et particulièrement de la criminalisation de l’État, dans les restaurations autoritaires actuelles reste encore à mesurer71Jean-François Bayart, Stephen Ellis, Béatrice Hibou, La criminalisation de l’État en Afrique, Bruxelles, Éd. Complexe, 1997. Amin Allal, Marie Vannetzel, « Des lendemains qui déchantent ? Pour une sociologie des moments de restauration », Politique africaine, 2017, p. 5-28..

Conclusion : une décompression autoritaire

Le centre de gravité de la violence politique en Afrique semble se déplacer vers l’ouest. Le détournement des constitutions et des élections, la dévitalisation des oppositions politiques et la captation des ressources de l’État peuvent nous aider à comprendre le virage autoritaire pris par ces pays. Dans les pays francophones en particulier, le legs institutionnel et juridique français – États centralisés ayant le monopole des opportunités économiques, cours constitutionnelles sous tutelles et scrutins présidentiels rythmant la vie politique de la nation – ainsi que la politisation des commissions électorales (dans tous les pays francophones à l’exception du Sénégal) ont facilité les dérives. Dans la plupart de ces pays, l’élection est devenue l’arbre qui cache la forêt, elle ne garantit plus l’efficacité du processus démocratique et devient au contraire un instrument de légitimation privilégié de l’autoritarisme. Dans le même temps, l’impuissance des oppositions et les discours populistes sont peut-être en train d’achever le désenchantement démocratique des populations et la résignation de la société civile.

Plutôt que de voir dans le processus à l’œuvre la prétendue incompatibilité de l’Afrique et de la démocratie, les évolutions récentes démontrent finalement une parfaite domestication du modèle libéral adopté dans les années 1990, alors que ces « innovations » politiques semblent aller de pair avec une privatisation progressive des services de l’État. Ces régimes ont parfaitement compris les effets de légitimation et de réputation que permettent ces procédures de « décompression autoritaire », qui consistent à imiter le fonctionnement démocratique au profit d’une classe dirigeante aux velléités autoritaires72Jean-François Bayart, « La problématique de la démocratie en Afrique noire. ‘‘La Baule, et puis après ?’’ », Politique africaine, n°43, juin 2013, p. 5-20, cité par Jeanne Aisserge, Jean-Nicolas Bach, « L’Ethiopie d’Abiy Ahmed Ali : une décompression autoritaire », Observatoire Afrique de l’Est, note analyse 7, novembre 2018.. Voilà quel jeu ont joué certains leaders africains durant la dernière décennie, les mêmes qui avaient cristallisé les espoirs d’un renouveau démocratique par l’alternance. Pour paraphraser Barack Obama, peut-être l’erreur est-elle d’avoir cru en de nouveaux hommes forts plutôt qu’en des institutions fortes73« ’’L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts mais de fortes institutions’’. Principaux extraits du discours prononcé par Barack Obama, samedi 11 juillet au Ghana », Le Monde, 13 juillet 2009., seules capables de réguler le jeu politique et de résoudre les problèmes de légitimité des chefs d’État africains.

Par ailleurs, les coups d’État militaires au Mali (2020) et en Guinée (2021) ne doivent pas être sous-estimés ni isolés, et nous rappeler que les putschs peuvent être l’horizon politique à court ou moyen terme des autres pays où se multiplient les dérives autoritaires74Sabine Cessou, « Où sont les leaders en Afrique de l’Ouest ? », Le Monde diplomatique, 9 septembre 2019.. Par le passé, les militaires ont parfois démontré leur capacité à jouer les arbitres avant de remettre le pouvoir aux civils, comme ce fut le cas au Niger en 2010 après la destitution de Mamadou Tandja. Le pourrissement de la situation au Mali depuis un an montre cependant que l’alternative militaire est loin d’être viable75Comba Kane, « Sahel : ‘‘Les militaires ne peuvent pas être une alternative aux problèmes politiques de nos pays », Le Monde, 30 mai 2021.. À cet égard, l’évolution de la situation guinéenne dans les mois à venir pourrait bien être déterminante pour dessiner l’avenir politique de la région.

  • 1
    Anne-Cécile Robert, « Coup d’Etat en Guinée », Le Monde diplomatique, 6 septembre 2021.
  • 2
    « Guinée : la France condamne la tentative de putsch et appelle à la libération du président Alpha Condé », Franceinfo, 6 septembre 2021.
  • 3
    Boubacar Sanso Barry, « Coup d’État en Guinée : la voix inaudible de la communauté internationale », Ledjeli, 6 septembre 2021.
  • 4
    Art. cit.
  • 5
    Ce sont là les critères principaux retenus par The Economist Intelligence Unit sur lesquels nous nous appuyons. « Global democracy has another bad year », The Economist, 22 janvier 2020.
  • 6
    « West African Security and Democracy. Stepping forward or moving back ? », Solace Global, décembre 2020.
  • 7
    Gilles Yabi, « En Afrique de l’Ouest, le processus de consolidation démocratique est en panne », Le Monde, 26 mars 2021.
  • 8
    Patrick Quantin, « La démocratie en Afrique à la recherche d’un modèle », Pouvoirs, n°129, 2009, p. 65-76.
  • 9
    Ismaïla Madior Fall, Les révisions constitutionnelles au Sénégal : révisions consolidantes et révisions déconsolidantes de la démocratie sénégalaise, Dakar, CREDILA, 2012.
  • 10
    Candace Cook, Joseph Siegle, « En Afrique, le contournement des limites de mandats fragilise la gouvernance », Centre d’études stratégiques de l’Afrique, 14 septembre 2020.
  • 11
    Bernard Coovi, « Démocratie : la tentation autoritaire en Afrique de l’Ouest », Neo Africa News, 27 mai 2020.
  • 12
    « Alpha Condé proclamé vainqueur de l’élection présidentielle en Guinée », Le Monde, 24 octobre 2020.
  • 13
    « En Côte d’Ivoire, le Conseil constitutionnel valide la réélection d’Alassane Ouattara pour un 3e mandat », Le Monde, 9 novembre 2020.
  • 14
    Justine Brabant, « Le militant sénégalais Fadel Barro : ‘‘Il fallait que ça explose’’ », Mediapart, 17 mars 2021.
  • 15
    Report of the Secretary-General on the activities of the United Nations Office for West Africa and the Sahel, United Nations Security Council, 24 décembre 2020.
  • 16
    « Le président sortant du Niger, Mahamadou Issoufou, reçoit le prix Ibrahim 2020 », Le Monde, 8 mars 2021.
  • 17
    « Sénégal : l’opposant Ousmane Sonko relâché, le président Macky Sall appelle au calme », Le Monde, 8 mars 2021.
  • 18
    « Côte d’Ivoire : l’ex-premier ministre Guillaume Soro condamné à la prison à perpétuité pour ‘‘atteinte à la sûreté de l’État’’ », Le Monde, 23 juin 2021.
  • 19
    « Côte d’Ivoire. Les autorités doivent veiller au respect des droits humains avant, pendant et après l’élection », Amnesty International, 30 octobre 2020.
  • 20
    « Au Bénin, Sébastien Ajavon à nouveau condamné et deux autres opposants incarcérés », Le Monde, 3 mars 2021.
  • 21
    Bernard Coovi, « Démocratie : la tentation autoritaire en Afrique de l’Ouest », Neo Africa News, 27 mai 2020.
  • 22
    Laurent Larcher, « En Guinée, la dérive autoritaire d’Alpha Condé », La Croix, 18 novembre 2020.
  • 23
    Laurent Larcher, « En Guinée, la dérive autoritaire d’Alpha Condé », La Croix, 18 novembre 2020.
  • 24
    Ousmane Djiby Sambou, « Les institutions démocratiques ont-elles failli ? Ivoiriens, Guinées, et Sénégalais à l’épreuve des troisièmes mandats qu’ils rejettent », Afrobarometer, Dépêche 390, 15 septembre 2020.
  • 25
    Astou Diouf, « La régulation des plateformes numériques et la liberté d’expression en Afrique de l’Ouest », Heinrich Böll Stiftung, mai 2021.
  • 26
    « Bénin. Au moins 17 personnes poursuivies en moins de deux ans », Amnesty International, 20 janvier 2020.
  • 27
    André Silver Konan, « Côte d’Ivoire : se disant victimes de pressions politiques, des magistrats en appellent à Ouattara », Jeune Afrique, 18 janvier 2019.
  • 28
    « Bénin : un juge dénonce des pressions politiques à quelques jours de l’élection présidentielle », Franceinfo Afrique, 6 avril 2021 ; Pierre Lepidi, Francis Kpatindé, « Au Bénin, ‘‘le Professeur’’ Joël Aïvo reste en prison », Le Monde, 14 juillet 2021.
  • 29
    Étienne Smith, « Présidentielle au Sénégal, les faux semblants d’un ‘‘démocratie modèle’’ », The Conversation, 4 mars 2019 ; Richard Banégas, « L’autoritarisme à pas de caméléon ? Les dérives de la révolution passive démocratique au Bénin », Afrique contemporaine, n°249, janvier 2014, p. 99-118.
  • 30
    Nadia Adam, David Zounmenou, « Les ‘‘réformes électorales’’ étouffent la démocratie en Afrique de l’Ouest », Institut d’études et de sécurité, 25 mars 2021.
  • 31
    Frédéric Lejeal, Francis Kpatindé, « Au Bénin, un cycle de régression démocratique sans précédent », IRIS, 30 mars 2021.
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    Mathias Hounkpé, Ismaïla Madior Fall, Les commissions électorales en Afrique de l’Ouest. Analyse comparée, Abuja, Friedrich-Ebert-Stiftung, 2010.
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    « Togo : l’opposition divisée sur les propositions de réformes de la concertation », RFI, 8 août 2021.
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    « Côte d’Ivoire : la Commission électorale indépendante au centre de l’arène », Le Point Afrique, 5 août 2020.
  • 36
    « Côte d’Ivoire : le FPI se retire de la Commission électorale », RFI, 1er octobre 2020.
  • 37
    Saikou Oumar Balde, « Les chemins ambigus de la démocratie ouest-africaine entre progrès et dérives autoritaires. La Côte d’Ivoire, la Guinée et le Mali à la croisée des chemins », Sens public, 18 juin 2021.
  • 38
    Art. cit.
  • 39
    Saikou Oumar Balde, « Les conséquences d’un changement constitutionnel sur le cadre électoral et l’alternance démocratique en Guinée », Sens public, 29 juillet 2020.
  • 40
    Saikou Oumar Balde, « Les chemins ambigus de la démocratie ouest-africaine entre progrès et dérives autoritaires. La Côte d’Ivoire, la Guinée et le Malin à la croisée des chemins », Sens public, 18 juin 2021.
  • 41
    Pierre Jacquemot, De l’élection à la démocratie en Afrique (1960-2020), Paris, Fondation Jean-Jaurès, juin 2020, p. 26.
  • 42
    « Côte d’Ivoire. Les autorités doivent veiller au respect des droits humains avant, pendant et après l’élection », Amnesty International, 30 octobre 2020.
  • 43
    « Présidentielle au Bénin : la Cour constitutionnelle rejette les recours des candidats recalés », RFI, 18 février 2021.
  • 44
    Morgane Le Cam, « Au Bénin, une démocratie qui chancelle et inquiète, à cinq mois de la présidentielle », Le Monde, 24 novembre 2020.
  • 45
    Agnès Faivre, « En Guinée, l’opposition conteste l’élection côté Cour », Libération, 2 novembre 2020.
  • 46
    Saikou Oumar Balde, « Les conséquences d’un changement constitutionnel sur le cadre électoral et l’alternance démocratique en Guinée », Sens public, 29 juillet 2020.
  • 47
    « RDC : les élections de tous les dangers. Note 1 : La politisation des institutions chargées du processus », Congo Research Group, octobre 2018.
  • 48
    Patrick Quantin, « La démocratie en Afrique à la recherche d’un modèle », Pouvoirs, n°129, 2009, p. 65-76.
  • 49
    Pierre Jacquemot, De l’élection à la démocratie en Afrique (1960-2020), Paris, Fondation Jean-Jaurès, juin 2020, p. 57.
  • 50
    Expédit B. Ologou, « Democracy Capture in Benin », dans Democracy Capture in Africa. Benin, Ghana, Kenya, Mozambique, Nigeria, Accra, Ghana Center for Democratic Development, 2021, p. 33-56.
  • 51
    Alan Doss, « Sauvegarder la démocratie en Afrique de l’Ouest », Centre d’études stratégiques de l’Afrique, 29 septembre 2020.
  • 52
    Laurent Fourchard, « Luttes et imaginaires démocratiques en Afrique », Libération, 18 février 2016.
  • 53
    Victor Magnani, Thierry Vircoulon, « Vers un retour de l’autoritarisme en Afrique ? », Politique étrangère, 2019, p. 11-23.
  • 54
    Naomi Chazan et al., « Regimes in Independent Africa », dans Naomi Chazan et al., Politics and Society in Contemporary Africa, Boulder, Lynne Rienner, 1999.
  • 55
    Nic Cheeseman, Jeffrey Smith, « The Retreat of African Democracy. The Autocratic Threat is Growing », Foreign Affairs, 17 janvier 2019.
  • 56
    Béatrice Hibou, Anatomie politique de la domination, Paris, La Découverte, 2011.
  • 57
    Ousman Blondin Diop, « De quoi la ‘‘francophobie africaine’’ est-elle vraiment le nom ? », Jeune Afrique, 7 avril 2021.
  • 58
    Sabine Cessou, « Où sont les leaders en Afrique de l’Ouest ? », Le Monde diplomatique, 9 septembre 2019.
  • 59
    Victor Magnani, Thierry Vircoulon, « Vers un retour de l’autoritarisme en Afrique ? », Politique étrangère, 2019, p. 11-23.
  • 60
    Achille Mbembe, « Esquisse d’une démocratie à l’africaine », Le Monde diplomatique, octobre 2000.
  • 61
    Democracy Capture in Africa. Benin, Ghana, Kenya, Mozambique, Nigeria, Accra, Ghana Center for Democratic Development, 2021.
  • 62
    Jan Niklas Engels, « Les partis et les systèmes des partis en Afrique. Cas du Bénin », Friedrich Ebert Stiftung, 2008.
  • 63
    Richard Banégas, « L’autoritarisme à pas de caméléon ? Les dérives de la révolution passive démocratique au Bénin », Afrique contemporaine, 2014.
  • 64
    Vincent Duhem, « Bénin : Olivier Boko, l’ami dans l’ombre de Patrice Talon », Jeune Afrique, 13 mars 2017.
  • 65
    Expédit B. Ologou, « Democracy Capture in Benin », dans Democracy Capture in Africa. Benin, Ghana, Kenya, Mozambique, Nigeria, Accra, Ghana Center for Democratic Development, 2021, p. 33-56.
  • 66
    Achille Mbembe, De la postcolonie. Essai sur l’imagination politique dans l’Afrique contemporaine, Paris, La Découverte, 2020, p. 153.
  • 67
    Marc Dossou Dokoui, Passation des marchés publics communaux en République du Bénin : Quelles stratégies pour freiner la corruption et asseoir une bonne gouvernance locale ?, Mémoire de master, Université Senghor, 2011, p. 9.
  • 68
    Expédit B. Ologou, « Democracy Capture in Benin », dans Democracy Capture in Africa. Benin, Ghana, Kenya, Mozambique, Nigeria, Accra, Ghana Center for Democratic Development, 2021, p. 33-56 ; « Bénin : des ministres poursuivis », BBC News Afrique, 25 février 2013.
  • 69
    Jean-François Bayart, L’État en Afrique. La politique du ventre, Paris, Fayart, 1989.
  • 70
    Jean-François Bayart, L’impasse national-libérale. Globalisation et repli identitaire, Paris, La Découverte, 2017.
  • 71
    Jean-François Bayart, Stephen Ellis, Béatrice Hibou, La criminalisation de l’État en Afrique, Bruxelles, Éd. Complexe, 1997. Amin Allal, Marie Vannetzel, « Des lendemains qui déchantent ? Pour une sociologie des moments de restauration », Politique africaine, 2017, p. 5-28.
  • 72
    Jean-François Bayart, « La problématique de la démocratie en Afrique noire. ‘‘La Baule, et puis après ?’’ », Politique africaine, n°43, juin 2013, p. 5-20, cité par Jeanne Aisserge, Jean-Nicolas Bach, « L’Ethiopie d’Abiy Ahmed Ali : une décompression autoritaire », Observatoire Afrique de l’Est, note analyse 7, novembre 2018.
  • 73
    « ’’L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts mais de fortes institutions’’. Principaux extraits du discours prononcé par Barack Obama, samedi 11 juillet au Ghana », Le Monde, 13 juillet 2009.
  • 74
    Sabine Cessou, « Où sont les leaders en Afrique de l’Ouest ? », Le Monde diplomatique, 9 septembre 2019.
  • 75
    Comba Kane, « Sahel : ‘‘Les militaires ne peuvent pas être une alternative aux problèmes politiques de nos pays », Le Monde, 30 mai 2021.

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