La participation démocratique

Pour « Demain les banlieues », Philippe Doucet, député du Val-d’Oise, évoque avec Réda Didi les projets menés aux Etats-Unis et en France pour réconcilier le politique et les citoyens dans les villes et les perspectives qu’ils offrent à la gauche.

Philippe Doucet reçoit pour Demain les banlieues, son groupe de travail au sein de la Fondation Jean-Jaurès, Réda Didi, spécialiste de la politique de la ville, fondateur de Graines de France, think tank dédié aux quartiers populaires, et ancien membre du cabinet de Patrick Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports. Il évoque son expérience de la participation des citoyens dans les quartiers populaires. Quel bilan peut-on en dresser ?

 

La réaction de Philippe Doucet

Depuis près de quatre ans, la loi Lamy sur la participation citoyenne a permis la mise en place de Conseils citoyens qui donnent des résultats intéressants, notamment dans la capacité à faire participer des habitants qui n’ont pas l’habitude de choisir pour eux-mêmes. La participation et les Conseils citoyens ont pour objectifs de permettre aux citoyens de se faire un avis, d’avoir un regard, de donner des directions sur les différentes politiques qui seront menées sur leur territoire, notamment en ce qui concerne la rénovation urbaine. Ces Conseils citoyens ont parfois posé des problèmes à certains élus locaux. Mais c’est une forme de dialogue social qui permet d’avoir un échange plus régulier avec des citoyens qui ont désormais un cadre pour réfléchir et faire des propositions concrètes.

Ce qui se passe aux Etats-Unis n’est pas directement transposable en France. Le Community Organizing a d’abord concerné la communauté polonaise, avant la communauté afro-américaine. L’idée était de faire avancer les droits sociaux des travailleurs. On ne peut calquer les processus américains de communautarisation en France. Mais le concept de territoire et celui de quartier nous reconduisent à l’idée de communauté. L’objectif est d’améliorer le cadre de vie. Dans les quartiers où les habitants appartiennent à des catégories socioprofessionnelles supérieures, il n’y a aucun problème d’organisation. Les habitants savent interpeller les élus ou les médias quand ils veulent contester un projet sur leur territoire. Dans les quartiers populaires, cela est plus difficile. Il faut des animateurs, des éducateurs pour encadrer la mobilisation de la population. L’idée de donner des outils, des moyens à des populations qui se trouvent sur un territoire, qui font communauté par leur territoire, pour qu’ils agissent et améliorent leurs conditions de vie, est centrale. Elle permettra aux citoyens de participer un peu plus à la vie publique, à la politique. 

Les Conseils citoyens devraient pouvoir faire émerger des leaders pour mobiliser la population, pour prendre la parole en public, argumenter à partir d’une stratégie. Cela demande de la formation. Par ailleurs, les élus doivent comprendre qu’il est plus intéressant de faire face à des groupes organisés plutôt qu’à des groupes non organisés. Cela peut permettre d’éviter les mobilisations négatives. Cela recoupe la question qui s’est posée dans les entreprises sur l’intérêt d’avoir un syndicat.

Sur la citoyenneté dans les quartiers, au regard des taux faibles de participation aux élections, il faut voir que les individus ont besoin de politiques qui fassent évoluer leur quotidien, qui le changent de façon directe, visible. Les citoyens retourneront voter dès lors qu’ils se sentiront pris en compte, dans leur vie de tous les jours, dans la vie pratique de leur quartier. Les responsables politiques ont donc à identifier les problèmes spécifiques des territoires. Et, pour cela, il faut libérer la parole des citoyens pour qu’ils puissent donner leurs priorités pour leur quotidien sur leur territoire.

A cela s’ajoute la défiance de la représentation politique. C’est ainsi qu’il est important de faire émerger de nouveaux leaders pour aller dans le sens d’une plus juste représentation.

La gauche a fait beaucoup de choses pour permettre aux citoyens de s’exprimer, notamment à travers les primaires. Mais la démarche n’a pas été suivie jusqu’au bout. Or, il faut permettre à ceux qui ont participé de prendre des responsabilités ensuite. La gauche doit s’ouvrir davantage à la société civile.

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