Héritiers de l’avenir : Lionel Jospin

La Fondation recueille les témoignages de celles et ceux qui furent les principaux acteurs de l’histoire du Parti socialiste, les réunissant sous un titre emprunté à Pierre Mauroy, « Héritiers de l’avenir ». Cette collection constitue une source précieuse de compréhension des enjeux et des débats qui ont traversé la gauche depuis cinquante ans. Retrouvez l’entretien avec Lionel Jospin, ancien Premier ministre, ancien premier secrétaire du Parti socialiste, interrogé par Émeric Bréhier, ancien député, directeur de l’Observatoire de la vie politique de la Fondation Jean-Jaurès.

 

Premier secrétaire du Parti socialiste, Premier ministre, candidat déçu à l’élection présidentielle, Lionel Jospin a incarné une certaine idée du socialisme de 1971 jusqu’à son retrait de la vie politique en 2002. Dans cette première partie de l’entretien accordé à la Fondation Jean-Jaurès, il nous fait découvrir, à travers son itinéraire personnel, le Parti socialiste des années 1970. Acteur et observateur privilégié du dialogue PS-PC, il revient sur la relation entre les deux partis et les stratégies respectives qui les ont animés. Les relations entre les socialistes et les chrétiens de gauche – principalement, la CFDT et le PSU – sont également riches d’enseignements pour comprendre comment l’union de la gauche, bien qu’elle ne soit pas dénuée d’embûches, a permis l’infatigable progression du parti de François Mitterrand tout au long de cette décennie. Lionel Jospin évoque aussi, au-delà de la stratégie électorale, les batailles internes entre courants. Mitterrandiens, proches du CERES, soutiens de Rocard, tous ont cherché à prendre – ou à garder – la mainmise sur l’appareil d’Épinay, qui au fur et à mesure du temps prenait en importance. Secrétaire national à de multiples reprises, avant de devenir le premier secrétaire dès la déclaration de candidature de François Mitterrand en janvier 1981, Lionel Jospin a participé de la formation, et de la diffusion, d’une véritable « identité socialiste », qui alliait marxisme et républicanisme démocratique. Moins atlantiste, moins européen, plus tourné vers le tiers-monde, le parti d’Épinay a fait preuve d’audace théorique : prôner une véritable rupture avec le capitalisme tout en assumant des positions progressistes sur les questions de société.

 

 

Dans la seconde partie de l’entretien accordé à la Fondation Jean-Jaurès, Lionel Jospin survole ses années politiques à partir de la victoire présidentielle de François Mitterrand le 10 mai 1981. À cette date, il est déjà premier secrétaire du Parti socialiste, place privilégiée s’il en est pour aborder le lien entre l’organisation partisane et le pouvoir politique qui s’articule entre l’Élysée et Matignon. Le président de la République refuse une trop grande proximité entre le parti et le gouvernement, mais attend du premier une association en vue du bon fonctionnement du second. Aucun ministre n’est autorisé à rester membre de la direction du parti. François Mitterrand reçoit Lionel Jospin une fois par semaine, en compagnie du Premier ministre, dans ce qui devient en période de cohabitation un tête-à-tête hebdomadaire entre le président et le premier secrétaire du Parti socialiste. Il revient sur les choix faits par le gouvernement, son soutien qu’il assume, bien qu’ils aient pu être perçus par beaucoup comme des ruptures majeures à la promesse socialiste. Il ne parle pas de « tournant de la rigueur » mais de « tournant réaliste » et défend vigoureusement ce choix politique qui a permis, selon lui, à la gauche de l’emporter à nouveau en 1988. Enfin l’échange se termine par sa lecture personnelle de la Constitution de la Ve République, le rôle d’un Premier ministre, et son soutien à l’instauration du quinquennat, visant à affermir la démocratie en France.

 

La collection « Héritiers de l’avenir » expliquée par Gilles Finchelstein, directeur général de la Fondation Jean-Jaurès 

Des mêmes auteurs

Sur le même thème