Sortie de crise : état des lieux de la confiance des Français

Cette année encore, la Fondation Jean-Jaurès est partenaire du Baromètre de la confiance politique. Pour cette vague 12 bis de mai 2021, il s’est agi de mesurer la confiance que les Français ont dans leurs institutions et dans la démocratie, au moment où la tendance est à l’amélioration des indicateurs sanitaires.

Voir les résultats du Baromètre de la confiance

La confiance personnelle et dans les institutions 

Si les Français ont été durement impactés pendant l’épidémie, il semblerait que l’horizon d’une sortie de crise améliore leur état d’esprit actuel. En effet, selon le Baromètre de la confiance politique réalisé entre le 3 et 11 mai 2021, malgré un sentiment encore très répandu de lassitude (sentiment cité par 40% des personnes interrogées), la morosité s’est moins fait ressentir par rapport à janvier 2021 (baisse de 7 points) tandis que l’enthousiasme des Français a augmenté de six points (même si ce sentiment ne touche encore que 11% des personnes interrogées seulement).

Ce relatif enthousiasme lié à un début de retour à la normale s’est accompagné d’une plus grande confiance dans certaines organisations, qu’elles soient publiques – telles que la police nationale (73% de Français disent lui faire confiance) ou les grandes entreprises publiques (54%) – ou privées comme les grandes entreprises privées (50%).  

Le rapport à la vaccination 

Une nouvelle problématique a émergé ces dernières semaines avec l’ouverture progressive de la vaccination contre la Covid-19. En effet, depuis le 12 mai, toutes les personnes majeures peuvent prendre rendez-vous dans un centre de vaccination si le vaccin est injecté le jour même ou le lendemain. À partir du 31 mai, la vaccination sera ouverte à toute la population, sans condition. Cette nouvelle perspective a eu un certain impact sur la population française car le pourcentage de personnes ayant l’intention de se faire vacciner a augmenté de 16 points par rapport à janvier 2021. Ainsi, aujourd’hui, 65% des personnes interrogées ont l’intention de se faire vacciner ou l’ont déjà fait. En effet, la grande majorité de ces personnes « pro-vaccin » considèrent qu’il s’agit de la seule manière de lutter contre la contagion et de revenir à une vie normale (73%) et que la vaccination est essentielle pour protéger les autres et notamment les plus fragiles (49%). 

La part des personnes n’ayant pas l’intention de se vacciner (20%) ou étant encore indécise (13%) reste cependant élevée, à cause du « manque de recul sur la maladie et le vaccin » (pour 65% des personnes interrogées) ou encore de la « peur des effets secondaires » (pour 55% des personnes interrogées). 

Une chose intéressante dans cette enquête concerne le rapport des Français au type de vaccin injecté. En effet, les différentes polémiques autour des vaccins ont pu susciter une certaine méfiance à leur égard. Le vaccin AstraZeneca par exemple, qui a été suspendu pendant quelques jours puis finalement interdit aux personnes de moins de 55 ans, a entraîné de la méfiance parmi la population. Le Baromètre de la confiance le montre à nouveau : 54% des Français n’accepteraient pas de se faire vacciner par n’importe quel vaccin, 28% seraient même prêts à refuser catégoriquement un vaccin s’il ne s’agit pas de celui qu’ils souhaitent. 

Pour autant, il semblerait que le bénéfice collectif de la vaccination l’emporte sur les réticences qu’elle entraîne pour 73% des personnes interrogées qui estiment ainsi que cela vaut la peine de se faite vacciner contre la Covid-19.

Ces données n’effacent pas l’inquiétude engendrée par l’épidémie notamment depuis la découverte des variants anglais, sud-africains ou encore, plus récemment, indien puisque 63% des personnes interrogées se disent inquiètes pour elles et leurs proches et 71% se disent inquiètes d’un manque de contrôle de l’épidémie.  

La responsabilité et la décision dans la crise sanitaire 

Si la vaccination et la possibilité d’une sortie de crise ont permis de rassurer les Français et de mesurer une plus grande confiance dans certaines organisations, la majorité des personnes interrogées estiment que l’amélioration de la situation s’est faite d’abord grâce aux citoyens eux-mêmes (30%), puis grâce aux scientifiques (22%) devant les ministres concernés (22%), le président de la République (10%) ou encore les élus locaux (4%). 

Perception de sa situation sociale et de la reconnaissance dans la société 

Il semblerait que la perception des Français quant à leur situation sociale n’ait pas été aggravée par la crise. En effet, peu d’entre eux considèrent qu’ils exercent une profession en déclin (11% contre 40% qui estiment exercer une population stable) et une majorité d’entre eux – 40% – sont satisfaits de la perspective des années à venir. Par rapport à janvier 2019, les Français semblent donc plus confiants face à l’avenir (hausse de 10 points).  

Cependant, cette perspective est relativisée par un certain défaitisme. Selon notre enquête, même si 72% des Français estiment que la réussite dépend de la capacité de chacun à saisir sa chance, 55% des Français considèrent que, malgré tous les efforts possibles, il est rare d’y arriver. Cette perception traduit une fracture sociale très présente que l’école ne semble pas résoudre : pour 51% des personnes interrogées, l’école ne donnerait pas la même chance de réussite à tout le monde. Une solution plus efficace pour réduire ces inégalités sociales serait ainsi de « prendre aux riches pour donner aux pauvres », selon 57% des Français. 

Pour autant, 22% des Français estiment être traités avec égalité par la société française et 15% estiment même l’être avec bienveillance. Mais une part plus importante des personnes interrogées considèrent tout de même être traitée avec mépris (29%) et injustice (24%). 

La perception de la démocratie

Concernant la perception de la démocratie, aujourd’hui 49% des Français la considèrent comme défaillante. Même si ce chiffre est important, il s’agit d’une nette amélioration de l’image de la démocratie en France depuis décembre 2018, période pendant laquelle ce taux atteignait 70%. 

L’attachement à la démocratie reste majoritaire quand il s’agit de la privilégier par rapport aux opportunités de s’enrichir mais devient moins important quand il s’agit de privilégier l’égalité et la justice sociale. En effet 58% des Français affirment qu’il vaut mieux une politique moins démocratique mais offrant de nombreuses opportunités de s’enrichir et réussir rapidement tandis qu’ils sont 57% à préférer un système assurant plus d’égalité et de justice sociale même si cela doit se faire au détriment de la démocratie. 

Les attitudes complotistes 

L’intention de se faire vacciner et la confiance dans les institutions n’a pourtant pas réduit les méfiances des Français sur certaines idées concernant la Covid-19. Par exemple, 29% des Français pensent que l’épidémie de Covid-19 a probablement été planifiée en secret par des agents puissants. Cette méfiance est surtout dirigée vers le gouvernement puisque 55% des Français pensent probable que nos dirigeants aient connaissance de choses très importantes concernant l’épidémie de coronavirus dont les citoyens de sont pas informés. Le risque de la surveillance de nos données est aussi souligné par l’enquête qui montre que de plus en plus de Français pensent probable l’idée selon laquelle la crise sanitaire fournit l’occasion au gouvernement de surveiller et contrôler les citoyens (47%, hausse de 5 points depuis janvier 2021). 

L’intérêt pour les prochains scrutins 

Malgré le souvenir des dernières élections municipales et le report des élections régionales à cause de la crise sanitaire, qui auront lieu en juin 2021, les Français restent intéressés par les élections à 54%. Cependant, une part relativement importante d’entre eux ne l’est pas du tout (9%). L’intérêt pour les élections présidentielles de 2022 est plus grand puisque 72% des personnes interrogées disent être intéressées par ce scrutin.

La proximité avec des candidats potentiels à la présidentielle 

Même si tous les candidats à la prochaine élection présidentielle ne se sont pas encore déclarés, l’enquête a voulu savoir pour qui les répondants comptaient voter aux prochaines élections. Il semblerait qu’un coude à coude se joue entre trois potentiels candidats : Emmanuel Macron (La République en marche, actuel président), Marine Le Pen (Rassemblement national) et Xavier Bertrand (Les Républicains). Selon l’enquête, 40% des Français ont répondu qu’il y avait une chance qu’ils votent pour Emmanuel Macron. Ce taux est très légèrement inférieur pour Marine Le Pen (39%) et Xavier Bertrand (38%). Jean-Luc Mélenchon, quatrième en 2017, se place cette fois-ci derrière Valérie Pécresse, Yannick Jadot et Anne Hidalgo : 26% des Français estiment qu’il y a une chance pour qu’ils votent pour lui. 

Les potentiels candidats à l’élection présidentielle de 2022 n’attirent cependant pas la sympathie des personnes interrogées puisque seulement 27% des Français ont de la sympathie pour Emmanuel Macron qui se place légèrement devant Xavier Bertrand et Marine Le Pen, tous les deux attirant la sympathie de 25% des Français interrogés. Jean-Luc Mélenchon, quant à lui, n’attire aucune sympathie pour 52% des Français, juste devant Marine Le Pen à 50%. 

Étude réalisée auprès d’un échantillon de 1832 personnes inscrites sur les listes électorales issu d’un échantillon de 2021 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. Ces personnes avaient répondu à la vague 12 du baromètre réalisé en janvier 2021.

Les interviews ont été réalisées du 3 au 11 mai 2021.

L’enquête a été réalisé avec le soutien de l’ANR qui a financé le terrain dans le cadre du projet ComingGen n°ANR 18-CE38-0007-01.

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