L’économie allemande résiste, en ces temps de crise, mieux que les autres et, désormais, tous les discours semblent s’articuler autour de ce modèle économique. En disséquant les propositions des deux principaux candidats à l’élection présidentielle française, on constate pourtant deux stratégies bien différentes vis-à-vis de ce modèle allemand.
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Alors que l’Allemagne n’a jamais été dans une stratégie économique aussi divergente avec la France, la droite et la gauche françaises s’inspirent, chacune à sa manière, du modèle allemand. Nicolas Sarkozy s’est ainsi lié avec la rigueur de la CDU allemande, toutes ses réformes du marché du travail (RSA, auto-entreprenariat, restructuration des organismes et allocations chômage) ont été inspirées par les réformes Hartz (I-II-III-IV).
Ses propositions pour 2012 seront un durcissement de ces réformes, une flexibilisation du temps de travail et de la contractualisation par entreprise. Il prendra également pour cible principale la réforme de l’assurance maladie et de la protection sociale. Copier le modèle allemand, ce serait aussi affilier 10 % des ménages les plus aisés à des systèmes privés d’assurance maladie, en grande partie liée aux institutions des branches ou des grandes entreprises, avec les crises de financement conséquentes pour le système de régime général. Les propositions du candidat-président font néanmoins l’impasse sur tout un pan du modèle allemand sur lequel il est personnellement en difficulté : un dialogue social omniprésent et une coopération historique au sein de son modèle économique.
La conversion de la droite française au modèle allemand a débuté depuis le début de la mandature de Nicolas Sarkozy ; elle a sans doute atteint le 18 janvier 2012 pour le sommet de l’emploi son paroxysme avec les discussions sur le chômage partiel et les accords compétitivité-emploi. Finalement, avec le rajout de 140 millions d’euros et un accord des partenaires sociaux sur le chômage partiel, la France sera encore très loin des 6 milliards d’euros dépensés par le gouvernement allemand pour sauver une partie de son industrie. De même, les accords de compétitivité sont bien mal partis, un achoppement viendra du mode de contractualisation entre les partenaires sociaux. Si le gouvernement passe en force avec la loi, cela ne ressemblera plus guère au modèle allemand.
C’est une autre vision du modèle allemand que François Hollande importe au travers de ses propositions pour le prochain quinquennat. Avec son slogan « travailler tous, travailler mieux », le candidat socialiste s’était déjà positionné dans une ligne industrielle et progressiste durant la primaire citoyenne. Ainsi, son programme reprend les principales omissions du candidat-président, pour en faire les lignes de force de son programme d’alternance : un dialogue social promu et responsabilisé, un modèle de financement de l’économie soutenu et coopératif, une fiscalité exigeante pour tous types de revenus et un allégement du coût du travail, de nouveaux instruments pour réguler la gouvernance des entreprises.
Quel que soit le président élu en 2012, les chantiers inscrits à l’agenda sont nombreux : l’emploi des jeunes et le maintien des seniors en activité, la renégociation des retraites en 2013 et plus particulièrement celle de la pénibilité, les plans de reconversions industrielles et d’aides sectorielles face à la crise.