Salvador Allende et François Mitterrand sont deux grandes figures du socialisme du XXIe siècle. Quarante ans après l’assassinat du premier, l’historienne Judith Bonnin explique pourquoi les deux hommes ont été comparés, au gré des années 1970 et 1980, bien que l’un ne fût jamais le modèle de l’autre.
Après sa mort, Allende est héroïsé par la gauche française et mondiale et devient une icône politique, tandis que les exilés chiliens sont pris en charge par un grand élan solidaire. Mitterrand, refusant explicitement toute comparaison, participe néanmoins pleinement à l’édification du « mythe Allende » et s’entoure de proches du défunt, même après mai 1981. En 1983, dix ans après le coup d’État, ce sont alors des plumes de droite qui reprennent la comparaison pour dénoncer ce qu’ils estiment être l’échec annoncé du mandat de Mitterrand. Finalement, cette comparaison est surtout le fait de commentateurs servant leurs propres intérêts politiques : il semble que François Mitterrand ne se soit jamais identifié à Salvador Allende et qu’il ne l’ait pas considéré comme un modèle au sens fort.