Repenser nos sociétés à l’aune des ODD : regards sociétaux pour un avenir durable

Alors que l’épidémie due au coronavirus questionne notre modèle économique et sociétal, cette crise et ces épreuves doivent être l’occasion de transformer notre société pour préserver notre humanité et rétablir l’équilibre de notre planète. Pour y parvenir, l’Agenda 2030 est un outil à exploiter, par la concertation et par une prise de conscience collective. C’est ce que proposent Jennifer De Temmerman et Alain Dubois en s’appuyant sur les expertises d’une vingtaine de personnalités ; celles-ci sont à retrouver dans quatre rapports dont le troisième, présenté ici, apporte des regards sociétaux sur un avenir durable.

Retrouvez:

  • le premier rapport Gouvernance et développement durable (6 novembre 2020)
  • le deuxième rapport Économie et finances durables (13 novembre 2020)
  • le quatrième rapport Préservation durable de notre patrimoine naturel (27 novembre 2020)

 

Table des matières

Préface
Introduction

Justice sociale et pouvoir de vivre, quels regards ?
Laurent Berger
Les voies de sortie possible
Le niveau local est-il le niveau le plus pertinent pour agir ?
Quel rôle des syndicats pour le changement souhaité de notre société ?
Des leviers économiques à développer pour demain
En bref, les propositions

 

 

La culture : corriger l’oubli du confinement​
Stéphane Boucherie, Philippe Le Claire
Des acteurs et un secteur à l’épreuve de la crise sanitaire et de la digitalisation
Quelques leviers à actionner pour soutenir la culture

 

 

L’inclusion numérique : quelles réalités pour quel avenir ?​
Emmanuel Vandamme, Pierre Verlyck
Concilier transitions numérique et écologique
L’inclusion numérique : un enjeu social et sociétal
La médiation numérique au service de l’inclusion
Penser les besoins pour gagner en efficacité
Quelques initiatives intéressantes
Développer la formation
Continuité d’action et perspectives
En bref, les propositions

 

 

Conclusion

 

Les coordinateurs :

Jennifer De Temmerman est députée du Nord – 15ème circonscription, membre de la commission des finances à l’Assemblée nationale et de la commission des affaires sociales, de la santé et du développement durable à l’Assemblée, parlementaire du Conseil de l’Europe.

Alain Dubois est président des Acteurs régionaux du développement durable et membre du Comité 21. Il a été secrétaire national des Amis de la Terre (1983-1992), chargé de mission au ministère du Développement durable (1992-2006), conseiller développement durable au cabinet du maire de Valenciennes (2006-2010) et délégué RSE Orange Nord-de-France (2010-2017).

 

Les intervenants :

Laurent Berger : secrétaire général de la CFDT.

Stéphane Boucherie : formé aux conservatoires de Lille et de Roubaix puis avec les Russes du Gitis de Moscou et les Américains de l’Actor’s Studio, comédien permanent à La Rose des vents à Villeneuve-d’Ascq. En 1989, il intègre une première compagnie, le Théâtre du monde, puis une seconde en 2000, l’Embellie Cie. Il met en scène des textes de Duras, Delerm, Lemahieu, Bobrowski, Hyvernaud. En 2006, il entreprend de créer pour la jeunesse en mettant en scène des textes de Mike Kenny, Nathalie Papin… En 2012, il s’associe avec l’autrice Sarah Carré et leur collaboration permet au texte et à la mise en scène de s’enrichir mutuellement. Ils créent Screens, Une cosmonaute est un souci dans notre galaxie, Babïl, à destination de la jeunesse, et, plus récemment, Les lieux où j’ai repris le goût de nous.

Philippe Le Claire : passionné de culture, directeur fondateur du Centre André-Malraux à Hazebrouck. Il a également été le directeur de l’Agence régionale « Spectacle vivant en Picardie » entre 2008 et 2012. Aujourd’hui, il est membre de nombreux collectifs : le réseau Chainon, dont il a été le président pendant six ans, qui compte plus de 250 diffuseurs à travers la France, le Collectif Jeune public Hauts-de-France et le réseau Hauts-de-France en Scène.

Emmanuel Vandamme : président du « hub » numérique inclusif des Hauts-de-France, une entreprise sociale qui impulse, teste et passe à l’échelle des projets transformateurs au service d’une société numérique plus inclusive et créative. Il y coordonne les activités (POP School, POP Up, POP Café et le « hub » numérique inclusif Les Assembleurs) et intervient sur le montage de projets innovants et le design de projets et de politiques publiques en matière de transition numérique dans les territoires.

Pierre Verlyck : directeur général de POP School, un organisme de formation aux métiers du numérique à destination de toutes et tous. POP School forme des personnes éloignées de l’emploi et de la formation à des métiers porteurs du numérique (développement, UX Design, cybersécurité, etc.). Auparavant, Pierre Verlyck a occupé le poste de directeur du développement de l’Institut Choiseul, think tank dédié aux questions économiques, et a travaillé au ministère de l’Économie et des Finances sur les enjeux numériques. Il est également président de Digicode, une association nouvellement créée ayant pour ambition de faire du numérique une chance pour tous.

 

 

Préface : Remettons ensemble notre monde en question pour mieux construire demain
Jennifer De Temmerman et Alain Dubois

 

Depuis plusieurs mois, la France, comme la plupart des pays, est soumise au rythme du coronavirus.

La pandémie qui frappe le monde depuis la fin 2019 a bouleversé nos quotidiens. Nos frontières ne sont que constructions chimériques et personne n’est réellement épargné. Partout, les soignants, les forces de l’ordre et de sécurité, toute sorte de personnels auxiliaires souvent « invisibles » sont en première ligne. Les producteurs, les artisans, les transporteurs et les commerçants assurent la continuité de l’approvisionnement. Mais dans quelles conditions ?

Des premières alertes lancées par la Chine en décembre 2019 à la déclaration de pandémie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) début mars 2020, notre société a été ébranlée par l’émergence de cette menace invisible, jusqu’à l’état de confinement comme une parenthèse improbable de nos certitudes. Ce confinement pourrait d’ailleurs être une nouvelle fois imposé, comme en Israël.

Alors que chacun a tenté, depuis, de s’adapter à sa manière, le coronavirus a mis en lumière nos fragilités autant que nos forces. Nous voyons encore aujourd’hui des réseaux d’entraide se créer et l’humanité révéler le meilleur d’elle-même. Mais nous constatons aussi, malheureusement, une fois encore le manque de résilience de notre organisation sociétale et la fragilité de nos modèles économiques et financiers. Nous ne savons pas quand nous en aurons fini avec cette crise.

Pourtant, ce n’est pas la première épidémie à portée internationale. Ces dernières décennies ont été marquées par les virus H1N1, Ebola et Zika, mais la propagation est demeurée relativement restreinte à certains continents et les autorités sanitaires ont souvent réussi à les circonscrire à certaines espèces animales avant la transmission (possible toutefois) à l’homme sur nos territoires. D’autres épidémies nous sont tellement familières qu’elles ne sont plus perçues comme telles (grippe ou sida).

Aussi ces menaces n’ont-elles peut-être pas suffisamment été prises au sérieux comme le suggérait pourtant l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe en 2016 à travers la voix de Sílvia Eloïsa Bonet, rapporteure, parlementaire de la principauté d’Andorre : « Certains experts sont convaincus que la prochaine menace de contamination à l’échelle internationale proviendra d’un autre virus, très probablement transmis par voie respiratoire ou aérienne comme le SRAS, et susceptible de se propager sur de grandes distances et plus rapidement, à l’image de la flambée épidémique survenue en République de Corée en mai 2015, avec un schéma comportemental totalement différent de l’épidémie d’Ebola. »

Cet extrait aux accents prophétiques souligne malheureusement une fois encore le manque de crédit accordé par les autorités politiques, et parfois l’opinion publique, à la parole des experts et scientifiques. Il en est de même pour les alertes lancées depuis des décennies au sujet de l’urgence climatique ou, plus récemment, sur la perte de biodiversité.

Le temps semble suspendu, mais il ne s’agit pas de refaire le passé et de s’étendre sur ce qui n’a pas été fait, même si l’on peut le regretter. Il s’agit au contraire de tirer des leçons de ces échecs et de mettre à profit cette situation inédite pour réfléchir au monde de demain.

Si nous ne devions avoir qu’une certitude, ce serait qu’il ne faut surtout pas reprendre la course antérieure. Les scientifiques alertent. Les associations, les organisations syndicales, de nombreuses personnalités multiplient les interventions en ce sens. Nous devons faire bloc face à l’ennemi invisible. Le confinement et son après doivent être mis au profit de la réflexion. Aucune épidémie ne nous prendra notre liberté de penser. Refusons les théories de l’effondrement et du désespoir. Remettons ensemble notre monde en question pour mieux construire demain.

Ce qui est sûr, c’est que cette épidémie met en lumière nos faiblesses : inégalités sociales, territoriales, fragilité de notre système de santé en raison du manque de moyens, fracture numérique, dépendance énergétique ou sanitaire, interdépendance de nos systèmes économiques et de nos appareils de productions, conséquences néfastes de la désindustrialisation.

Elle met aussi en valeur la solidarité des populations au niveau local avec la mise en place de réseaux de couturières pour produire des masques en tissu, ou encore l’organisation autour des sans-abri qui n’ont plus eu de lieu pour s’approvisionner en eau durant le confinement. Au niveau international, on peut noter le don par Taiwan de 10 millions de masques aux pays les plus touchés par la Covid-19.

Cette épidémie questionne notre modèle économique et sociétal. Une fois encore, comme lors de la crise de 2008, nos gouvernements sont obligés de prendre des mesures économiques fortes afin de préserver l’emploi et les entreprises. Pour la première fois, les ministres européens des Finances ont décidé d’activer la clause dérogatoire générale prévue par le Pacte de stabilité et de croissance et qui permet de déroger pendant un temps limité à la célèbre règle de 3% de déficit public et de 60 % de dette publique. Ce qui n’avait jamais été envisagé pour l’urgence écologique alors que les conditions climatiques, les bouleversements de la biodiversité ou encore la déforestation sont identifiés depuis des années comme des facteurs pouvant favoriser l’apparition et accélérer la propagation de potentielles épidémies, capables de mettre à mal l’économie.

Le coronavirus marque une crise dans notre société. L’histoire est jalonnée de crises qui ont accompagné des tournants et qui ont permis l’émergence du pire comme du meilleur. La Révolution française, avec sa part d’horreurs et de vicissitudes, a construit en partie notre modèle démocratique. La Première Guerre mondiale a conduit à une seconde guerre, bien pire. Mais celle-là a donné naissance à de grandes institutions internationales, comme le Conseil de l’Europe, gardien des droits humains sur notre continent, et l’ONU.

Cette crise et ces épreuves doivent être l’occasion pacifique de transformer notre société pour préserver notre humanité et rétablir l’équilibre de notre planète. Pour y parvenir, nous devons profiter de cet outil fabuleux qu’est l’Agenda 2030.

Cela se fera par la concertation et par une prise de conscience collective. De nombreux spécialistes et chercheurs ont déjà commencé à explorer les pistes et à élaborer des plans. De nombreux citoyens, individuellement ou réunis en associations, portent leurs propres propositions et actions quotidiennes. Nous avons souhaité, au travers des « Rendez-vous de la transition », en recueillir quelques-unes pour les rassembler et les mettre en lumière afin qu’elles puissent éclairer nos décideurs et chaque acteur qui voudra bien construire l’avenir.

Les paroles d’experts que nous vous proposons ne traitent pas les sujets de la transformation nécessaire dans son entièreté, mais ils cherchent à éclairer sur des questions essentielles. Puissent-elles vous éclairer et enrichir vos propres retours d’expériences et d’opinion.

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