Portée par une mutation culturelle de grande ampleur, l’Inde vient de connaître deux décennies de progrès. A quelques jours du voyage de François Hollande dans ce pays, Philippe Humbert revient sur la transition politique, économique et sociale vécue par ce pays.
Depuis le milieu des années 1980, l’Inde a connu deux décennies de progrès, bénéficiant à la fois d’une croissance économique soutenue et d’une vie politique stable. C’est un pays en pleine mutation qui aborde ses élections générales, prévues au printemps 2014.
I/Une transition politique, économique et sociale
Un paysage politique qui se fragmente et se régionalise
Depuis l’indépendance, la scène politique indienne se caractérise par une bipolarisation entre deux grands partis nationaux : le Parti du Congrès et le Bharatiya Janata Party (BJP). Cette configuration politique est progressivement en train de changer, alors qu’émergent plusieurs partis régionaux dont le soutien au Congrès devient donc de plus en plus prisé.
Le ralentissement du rythme de développement de l’économie
Le secteur économique connaît lui aussi actuellement quelques remous. Le taux de croissance, qui avait atteint près de 9 % en 2010, est retombé à + 5/6 % en 2012/2013, le taux le plus bas depuis dix ans. De la crise économique que traversent actuellement les Etats-Unis et l’Europe à la politique monétaire restrictive menée par la Reserve Bank of India pour combattre une inflation jugée excessive, les facteurs explicatifs de ce ralentissement sont divers.
Une crise de leadership au niveau de l’Union
Le Parti du Congrès – au pouvoir depuis les élections de 2009 – s’est heurté ces dernières années à une stratégie obstructionniste systématique de la part du BJP, ainsi qu’à un manque de loyalisme des membres de sa propre coalition. En ont résulté une certaine paralysie du Parlement et un blocage plusieurs lois importantes.
II/ Les stratégies des partis en vue des élections générales de 2014 et les scénarios possibles
Le monde politique indien est aujourd’hui plus effervescent que jamais. L’élément majeur de cette période pré-électorale concerne la nouveauté des thèmes abordés : les inégalités et la corruption polarisent l’attention, bien plus que les questions identitaires ou religieuses. La bonne gouvernance, considérée comme le sésame du développement, tend ainsi à devenir le levier du succès électoral pour tous les partis politiques en lice.
Le Parti du Congrès a commencé à se mettre en ordre de bataille pour les dix-huit mois qui restent avant le terme normal de la législature. Dans cette optique, le 28 septembre 2012, un remaniement ministériel important a permis de promouvoir une nouvelle génération de responsables politiques. Plus récemment, en janvier 2013, Rahul Gandhi a été élevé à la position de vice-président du Parti du Congrès.
Le scénario le plus probable, en vue des prochaines élections, est celui d’une coalition de ce Parti du Congrès rajeuni avec ses alliés actuels (Nationalist Congress Party, Dravida Munnetra Kazhagam, Rashtriya Lok Dal, etc.). De son coté, le BJP, emmené par son leader Narendra Modi, s’efforcera de constituer une coalition concurrente. Une troisième voie, qui verrait les deux grands partis nationaux privés du pouvoir, semble pour l’heure exclue.
Si les perspectives électorales pour 2014 restent donc incertaines au niveau de l’Union, la séquence politique qui s’annonce marquera une nouvelle phase dans la décentralisation du pouvoir au profit des partis régionaux, des échelons démocratiques locaux et d’une société civile de mieux en mieux connectée.