Lutter contre le décrochage scolaire pour atteindre une égalité réelle

Afin de renforcer la lutte contre le décrochage scolaire, dont les chiffres sont inquiétants, il est nécessaire d’adopter une approche éducative et sociale, pensée sur le long terme. Guillaume Balas propose ainsi de mettre en place des politiques publiques à partir des besoins des plus faibles.

La fragilité du système français, démontrée par plusieurs études nationales et internationales, se traduit notamment par une tendance à la déscolarisation : selon l’OCDE, entre 1995 et 2009, le taux de scolarisation dans l’ensemble des pays membres a augmenté de près de 10 % alors qu’en France celui-ci diminuait de 5 % (chiffres de 2011-2012). La définition française du décrochage scolaire, qui désigne la sortie des jeunes de plus de seize ans du système scolaire sans diplôme ni qualification, serait, de ce point de vue, incomplète. En effet, elle néglige, entre autres, l’origine de ce phénomène, son caractère dynamique et la singularité de la France eu sein de l’Europe.
Entre 20 et 25% des jeunes Français sont concernés par la déscolarisation et notamment ceux issus de milieux défavorisés. De nombreuses études concluent que l’école en France est moins juste et moins efficace que celle de nombreux pays d’Europe. Les élus socialistes au sein du Conseil régional d’Ile-de-France ont ainsi adopté comme objectif politique affirmé la lutte contre le décrochage scolaire, dont la précarité est une des principales conséquences.
Afin de renforcer la lutte contre le décrochage, il est nécessaire d’adopter une approche éducative et sociale, pensée sur le long terme. Si d’un côté l’Etat est le maillon essentiel de ce projet, la lutte contre le décrochage passe également par une meilleure articulation entre ce qui se fait dans et en dehors de l’école. Il faut également adopter une approche territoriale car les problématiques de ce phénomène varient en fonction des réalités sociales locales.
Si les acteurs privés profitent de la fragilisation de l’Education nationale, le rôle des corps intermédiaires est central dans la lutte contre le décrochage. Les équipes pluridisciplinaires constituées par les Programmes de réussite éducative (PRE) à cette intention illustrent cette idée. Prévenir le décrochage scolaire, c’est s’engager dans une approche globale et concertée des difficultés d’un enfant.
Le système scolaire français est élitiste et inégalitaire dans la mesure où ce qui détermine en grande partie l’avenir des jeunes est le poids du diplôme et non les autres capacités et expériences acquises hors du parcours scolaire. Cette importance attribuée au diplôme est incompatible avec l’idée même de République car elle produit une fossilisation de la société et des élites. Or, l’apprentissage relève de la complémentarité entre l’éducation formelle (savoir scolaire) et informelle (en dehors de l’école).
Le diplôme déterminant le statut social, la rigidité de l’éducation ne permet pas à certaines personnes de reprendre le chemin de l ‘apprentissage ni de voir leurs initiatives entrepreneuriales ou associatives valorisées.
L’égalité des chances ici s’oppose à l’égalité réelle, puisque cette notion n’engagerait que la possibilité pour quelques-uns d’atteindre une position sociale supérieure à celle d’origine. Certaines expériences de démocratisation des grandes écoles, qui consistaient à intégrer des élèves provenant de zones d’éducation prioritaire, s’inscrivent dans une logique de promotion de l’égalité des chances, mais ce mouvement n’intègre pas l’objectif de vraie transformation sociale.
Il s’agirait ici de transformer la société afin de réduire les inégalités entre les différentes positions sociales. Il faut donc refonder le système éducatif à partir ce postulat. Mettre en place des politiques publiques à partir des besoins des plus faibles représenterait de ce fait un progrès pour l’ensemble de la société.

Du même auteur

Sur le même thème