L’école dans les territoires ultramarins : les problématiques de la non-scolarisation 

L’accès à l’école est-il le même sur l’ensemble du territoire français ? Jeanne Belanyi, directrice de l’Observatoire des outre-mer de la Fondation Jean-Jaurès, et Antoine Plancke, professeur de lycée professionnel en lettres et histoire-géographie à Saint-Laurent du Maroni en Guyane, montrent dans cette première note les fortes disparités d’accès à la scolarisation qui sont à l’œuvre en outre-mer, notamment en Guyane et à Mayotte.

« L’enfant, en Guyane, est une plante sauvage qui doit se suffire à elle-même, croître sur elle-même, se développer par ses propres moyens, sans qu’elle soit à l’abri des intempéries. […] Il ne suscite aucune attention, bien qu’il soit le sel et l’os des générations présentes et à venir1Léon-Gontran Damas, Retour de Guyane, Paris, édition José Corti, 1938 (rééd. Jean-Michel Place, 2003, p. 110. ». 

La métaphore date de 1938, elle s’exprime par la voix de Léon-Gontran Damas, grand poète de la négritude et dix ans plus tard député de la Guyane. Dans quelle mesure se vérifierait-elle aujourd’hui encore ? Ou au contraire serait-elle contredite par une évolution heureuse des politiques publiques en matière d’éducation et de protection de l’enfance, au fil d’une décolonisation toujours tâtonnante ? Si les réponses sont nécessairement multiples et nuancées, un premier constat s’impose, éloquent en soi : la question demeure, et elle peut se poser dans la plupart des territoires dits d’outre-mer, induisant des inégalités entre ceux-ci et l’Hexagone ; entre les outre-mer eux-mêmes, loin de présenter une réalité uniforme ; et à une échelle plus fine, au sein même de chacun de ces territoires. Allons plus loin : au-delà des inégalités et de leurs spécificités, les outre-mer français ne tendraient-ils pas finalement un miroir grossissant à l’Hexagone, reflétant des problématiques nationales et concernant également d’autres territoires aux marges de la République ?

Fin 2023, les représentants des branches ultramarines de la FSU-Snuipp, principal syndicat du premier degré, lançaient une campagne axée sur l’enseignement scolaire dans les départements et régions d’outre-mer (DROM), dont l’intitulé ne laissait guère de place à la nébulosité : « École en sous-France ». Pointant des problèmes sociaux, sanitaires, sécuritaires ou encore d’effectifs, mais également des infrastructures déficientes car souvent inadaptées aux conditions météorologiques, entravant dès lors le droit pour les élèves à bénéficier d’un environnement d’apprentissage sûr et confortable, ils appelaient à la mise en place d’une politique volontariste qui ferait passer l’égalité républicaine du statut de dogme à celui de matérialité tangible.

Au travers de cette alerte du monde enseignant, la question qui s’impose s’émancipe d’un cadre qui se limiterait aux frontières ultramarines : la société française est-elle en mesure d’offrir à chacun les mêmes chances de réussite ?

Alors que la trajectoire financière de la France s’inscrit dans un cadre annoncé d’austérité budgétaire et qu’un rapport réalisé conjointement par l’Inspection générale des finances et l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche a récemment proposé de fermer massivement des classes pour réduire les coûts de l’Éducation nationale2Revue de dépenses : dispositifs en faveur de la jeunesse, IGESR et IGF, avril 2024., il est essentiel de rappeler que de fortes disparités d’accès à la scolarisation sont à l’œuvre en outre-mer.

Nous assumerons ici une part de subjectivité, appuyée sur le vécu de professeurs notamment en Guyane. Cependant, nous avons veillé à confronter l’expérience à l’expertise pléthorique sur le sujet. S’y plonger donne à voir toute l’étendue des recherches déjà effectuées, des constats étayés, des alertes répétées, des rapports publiés par différents acteurs depuis plusieurs années ; et des réponses pour le moins partielles qui ont été mises en œuvre. La présente note vise une approche globale en reliant des données souvent éparses, parfois contradictoires, et pose la question des leviers qui permettraient de sortir d’une relative incurie. L’enjeu politique est d’importance : il ne s’agit rien moins que de tenir enfin, soixante-dix-huit ans après le choix de départementaliser les « vieilles » colonies, la promesse républicaine d’égalité et d’émancipation pour tous. Si tous les territoires ultramarins sont concernés, la question se pose en des termes plus aigus dans les deux territoires les moins favorisés : Mayotte et la Guyane, également seuls DROM où la population scolaire augmente3Dans le premier degré, « [e]ntre les rentrées 2017 et 2022, les académies de Martinique et de Guadeloupe enregistrent de très fortes réductions d’effectifs (respectivement -14,1% et -14,3%), au contraire de la Guyane et de Mayotte dont les effectifs sont en hausse sensible (+9,5% et +14,6%). Les effectifs de l’académie de la Réunion baissent, mais de façon moins marquée (-3,6%). » Dans le second degré, « [d]epuis 2005, les effectifs augmentent de manière continue dans les académies de Guyane (+ 13 400 élèves) et surtout de Mayotte (+ 29 100). À l’inverse, sur la même période, les effectifs de La Réunion (- 2 300 élèves), et surtout de la Guadeloupe (- 11 500 élèves) et de la Martinique (- 16 300 élèves) sont en recul », cf. ministère de l’Éducation nationale, Repères et références statistiques 2023.. Aussi nous nous concentrerons souvent sur ces deux cas, pour mieux en souligner les parallèles comme les nuances.

Selon la sociologue Dominique Schnapper, « l’école commune à tous est l’institution de la République par excellence4Dominique Schnapper, « L’école vecteur des valeurs de la République », Le Monde, 24 novembre 2014. », au sein de laquelle « les élèves, comme les citoyens, sont traités de manière égale, indépendamment de leurs caractéristiques familiales et sociales5Ibid. ». Ainsi que le rappelle Alain Michel, depuis Condorcet, l’école a en effet été considérée comme une institution « essentielle à la constitution de la république », qui doit « former l’homme et le citoyen, développer sa capacité de jugement et son autonomie6Alain Michel, « École républicaine, école démocratique », Revue Humanisme, n°283, 2008. ».

Mais quel sens donner à « l’école de la République », désignée comme première priorité nationale7Article premier du code de l’éducation. et bien souvent au cœur des politiques publiques, dont la « mission première [est de faire] partager aux élèves les valeurs de la République8Loi n°2005-380 du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école. », alors même qu’elle semble, et ce, notamment au travers du prisme ultramarin, perpétuer les inégalités qu’elle prétend combattre et, de facto, impacter le sentiment d’appartenance collective à la société ?

En 2021, Guyane La Première posait le sujet sans équivoque : « En principe, l’accès à l’éducation est un droit fondamental, garanti par l’État à tous les enfants en France, sans condition d’origine ou de nationalité. De fait, en Guyane, une forme de sélection s’opère à l’entrée du système scolaire, puisqu’il n’y a pas assez de places pour accueillir l’ensemble des jeunes à scolariser9Jeanne Péru-Gelly,« En Guyane, trop d’enfants privés de leur droit fondamental à l’éducation », Guyane La Première, 8 juillet 2021. ».

La question se pose en des termes d’autant plus sensibles quand le profil des jeunes non scolarisés est très marqué géographiquement et socialement, au sein d’un même territoire. Ainsi que le relève l’Insee en 2020, il est particulièrement marqué dans l’ouest et l’est de la Guyane, qui concentrent plus de difficultés sociales ; et plus encore dans les communes isolées. « En 2020, la part des enfants âgés de 3 à 16 ans non scolarisés s’élève à 7% en Guyane, soit 6 207 enfants. Elle est deux fois plus élevée qu’en France hexagonale. La non-scolarisation est plus marquée en Guyane non routière. La proportion d’enfants non scolarisés nés à l’étranger est trois fois plus élevée que celle des enfants nés en France. Le taux de non-scolarisation des enfants ayant des parents inactifs est deux fois plus élevé que ceux ayant des parents actifs. La non-scolarisation concerne plus souvent les enfants vivant dans une famille monoparentale (8%) que ceux vivant dans une famille de couple (6%). Enfin, les enfants vivant dans des logements ayant accès à l’eau ou encore à l’électricité ont un taux de non-scolarisation quatre fois plus faible que ceux vivant dans des logements n’y ayant pas accès10Maurice Bilioniere, Gwenaëlle Taupe, « En Guyane, 6 200 enfants âgés de 3 à 16 ans ne sont pas scolarisés en 2020 », Insee, 2020.. » Alors que d’indéniables efforts sont faits pour enrayer cette tendance, « entre 2013 et 2020, le taux de non-scolarisation des enfants âgés de 3 à 16 ans reste stable en Guyane11Ibid. ».

À la racine du phénomène, une démographie toujours croissante, et une réponse politique souvent insuffisante.

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Aux sources de la surpopulation scolaire : démographie, fécondité et natalité

Un phénomène sans commune mesure avec l’Hexagone et les autres outre-mer

Mayotte et la Guyane présentent une caractéristique commune : une forte croissance démographique, essentiellement portée par des indices de fécondité et des taux de natalité nettement plus élevés que la moyenne nationale.

En Guyane, la population totale a augmenté de 30% en dix ans, entre 2009 et 201912« En Guyane, tous les enfants n’ont pas accès à l’école », Outre-mer La Première avec AFP, 5 septembre 2022.. L’indice conjoncturel de fécondité est de « 3,5 enfants par femme en 2021 contre 3,7 en 2020. C’est plus qu’en Guadeloupe (2,1), qu’en Martinique (1,9) et qu’en France métropolitaine (1,8). Combiné à un nombre important de femmes en âge de procréer, il en résulte un fort taux de natalité », qui « se situe à 27,7‰, le plus élevé des régions françaises13Et le plus élevé des Amériques., après Mayotte (34,0‰). En France métropolitaine ce taux est de 10,7‰ 14Chiffres de 2021, voir Emmanuel Thioux, « En 2021, la population continue d’augmenter en Guyane avec plus de naissances et de décès », Insee, 2021. ».

Les conséquences sur la population scolaire sont évidentes : selon un rapport parlementaire de juin 202315Rapport d’information n°1331 présenté par Mme Géraldine Bannier et M. Jérôme Legavre, députés, enregistré le 7 juin 2023, sur l’évaluation de la loi n°2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, porté par Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale (et ancien recteur de l’académie de Guyane)., « en 2019, lors du dernier recensement, 32,4% de la population guyanaise était âgée de moins de quatorze ans, contre une moyenne nationale de 18,5%. […] L’augmentation des effectifs scolaires se poursuit à un rythme soutenu : dans le premier et le second degré, ils sont passés de 76 493 à 88 665 élèves entre 2012 et 2022, soit une hausse de 16% » en dix ans, avec « 2000 élèves supplémentaires, à chaque rentrée », soit selon le SNES-FSU une hausse annuelle moyenne de « 3% d’élèves en plus16Jessy Xavier/CL,« Rentrée scolaire en Guyane : le recteur Dulbecco assure que les postes manquants seront comblés par des contractuels », Guyane La Première, 30 août 2023. » et 4,7% dans l’ouest du département17En Guyane, tous les enfants n’ont pas accès à l’école, Outre-mer La Première avec AFP, op. cit.. À Mayotte, « les effectifs scolaires représentent 35 à 40% de la population, contre une moyenne nationale de 18%. La moitié des Mahorais sont âgés de moins de dix-huit ans, soit une proportion plus de deux fois supérieure à la moyenne (22%) […] La croissance annuelle des effectifs scolaires a atteint 6,9% en 2019, soit une augmentation plus rapide que celle de la population de Mayotte, dont la hausse était en moyenne de 4% par an au cours de la dernière décennie18Rapport d’information 2023 sur l’évaluation de la loi pour une école de la confiance, op. cit.. »

Cette tendance de fond est loin de marquer le pas : en Guyane, le taux de natalité en 2021 était en hausse de 2 points par rapport à 2014 ; l’indice de fécondité en 2023 (3,32 enfants par femme), en baisse de 0,2 point par rapport à 2021, est néanmoins marqué sur le long terme par une hausse générationnelle : pour les femmes de 30 ans et moins, il était de 1,8 enfant pour celles nées dans les années 1960, contre 2,1 pour celles nées dans les années 198019Ludmïa Lewis et Karl Constable, « Les chiffres clés de la population guyanaise relevés dans l’étude « Migration, Famille et Vieillissement » », Guyane La Première, 15 décembre 2023.. À Mayotte, « d’ici 2027, 15 000 élèves supplémentaires sont attendus » et, en Guyane, « la croissance de la population scolaire est appelée à se poursuivre au cours des années à venir. Ainsi, selon les projections réalisées par l’Insee en 2016, les effectifs de l’enseignement scolaire devraient atteindre 120 000 élèves en 2030 – dont 65 000 dans le premier degré – soit une hausse de 35% par rapport à 202220Rapport d’information 2023 sur l’évaluation de la loi pour une école de la confiance, op. cit. ».

Dans certains territoires, le phénomène est encore accentué par des naissances toujours en hausse. Dans l’ouest guyanais, à Saint-Laurent du Maroni (deuxième commune de Guyane), la population a décuplé en cinquante ans, passant de quelque 5000 habitants à la fin des années 1970 à au moins 50 000 à ce jour. Et si le rythme de croissance a connu son pic dans les années 1980 avant de décroître progressivement, il reste soutenu. 2500 naissances étaient déclarées en 2022 à Saint-Laurent du Maroni contre 1785 en 2014, soit une hausse de +40% en huit ans21Insee, 2023-2024, Dossier complet – Commune de Saint-Laurent du Maroni..  

Enfin, le phénomène des grossesses dites précoces reste important, voire croissant : « 29% des femmes des générations 1990-99 déclarent avoir eu un enfant avant 20 ans, soit un nombre supérieur à celui des générations précédentes22« 27% pour la génération née en 1950-59, 26% pour celle de 1960-69 et 25% pour celle de 1970-79. » ».

Fécondité et grossesses « précoces »

Outre la question de la hausse continue de la population scolaire que cela induit, la communauté scolaire est régulièrement confrontée à ces cas de jeunes filles enceintes, parfois dès le collège : 15% des jeunes déscolarisés en Guyane le sont à la suite d’une grossesse ou d’une mise en couple23Maurice Bilionière, Gwenaelle Taupe (Insee), Élodie Floury, Angus Lottin (Ined et Université de Strasbourg), « En 2020, les jeunes natifs de Guyane sont moins mobiles qu’il y a dix ans », Insee, 9 juillet 2024..

Quand une élève est enceinte, hors sa famille, c’est souvent vers un professeur qu’elle va se tourner pour faire état de sa situation. Celui-ci peut renvoyer vers un infirmier ou une infirmière scolaire et un assistant sociale ou une assistante sociale – quand le poste est pourvu et que ceux-ci, le plus souvent partagés entre plusieurs établissements, sont présents. L’enjeu est alors multiple : s’assurer que l’élève vit globalement bien sa situation, n’a pas subi d’agression sexuelle, qu’elle est bien suivie médicalement, connaît ses droits à l’IVG (qu’elle envisage rarement, contredisant le taux de recours très important en Guyane24« La Guyane est la région française avec le taux de recours à l’IVG le plus élevé (43,1 interruptions pour 1000 femmes âgées de 15 à 49 ans) après la Guadeloupe (43,3%) alors qu’il est de 14,9% en France métropolitaine. Ce taux a augmenté de 12 points entre 2016 et 2021 en Guyane », dans Insee, En 2021, la population continue d’augmenter en Guyane avec plus de naissances et de décèsop. cit.), que sa famille et/ou son partenaire l’accompagnent dans sa grossesse et l’accueil de l’enfant ; mieux l’informer sur les méthodes de contraception auxquelles elle peut avoir recours2529% des Guyanaises n’utilisent aucun moyen de contraception, proportion bien plus élevée que dans les autres DROM (en Martinique : seulement 12%) ; idem pour la pilule : seules 26% la prennent (49% en Guadeloupe). Cf. Insee, En 2020, les jeunes natifs de Guyane sont moins mobiles qu’il y a dix ansop. cit. ; enfin indiquer le chemin pour que l’élève poursuive sa scolarité après la naissance, ce qui est fort aléatoire. Une variable, très courante, joue à plein en la matière : la possibilité pour la mère de la jeune fille de l’aider pour la garde et l’éducation du nouveau-né, suivant un modèle de structure familiale où la solidarité intergénérationnelle demeure très prégnante, notamment entre les femmes.

Le phénomène contribue évidemment à la surpopulation scolaire et au besoin de construire toujours plus d’écoles et de recruter toujours plus de professeurs. Outre l’accès aux moyens de contraception, les travaux de démographes tels qu’Hervé Le Bras ont montré que c’est précisément quand la puissance publique se donne réellement les moyens de faire progresser la scolarisation secondaire des jeunes filles que l’on peut observer une évolution du taux de natalité, les maternités étant plus tardives et davantage choisies26« La solution passe en effet par les femmes et tient en deux mots : éducation et autonomie. Pas l’éducation primaire, mais secondaire : il faut que les filles continuent d’aller à l’école une fois qu’elles sont nubiles. Elles y apprennent les bases du planning familial, et surtout cela les protège d’un mariage précoce. L’autonomie, cela signifie que c’est à elles et non aux hommes de décider de leur fécondité. Dans les pays très pauvres du Sahel, un enfant de plus, c’est un travailleur de plus. Les hommes continuent donc de vouloir beaucoup d’enfants. Mais les quelques enquêtes menées avec les femmes montrent qu’elles sont plus réalistes – ne serait-ce que parce qu’elles veulent, comme dans le reste du monde, accéder à l’emploi et à la vie publique. » Cf. Hervé Le Bras, propos recueillis par Catherine Vincent et Stéphane Foucart, « 10 milliards d’humains, et alors ? », Le Monde, 7 décembre 2017. ; il précise que cette évolution prend aujourd’hui le temps d’une génération, quand elle a mis un siècle à s’imposer en Occident27« En Asie, au Proche-Orient ou au Maghreb, les femmes ont pris conscience que leur avenir et leur participation à l’espace public dépendaient aussi d’une fécondité maîtrisée donc modérée. En Occident, ces baisses de fécondité se sont étalées sur plus d’un siècle ; aujourd’hui, les pays vivent cette transition démographique en moins d’une génération. » Cf. Hervé Le Bras, interview par Catherine CalvetLibération, 14 février 2013.. Il n’en demeure pas moins que l’application de la loi de 2001 pour les cours d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle, insuffisante partout en France, a ici des conséquences plus importantes. Sa mise en œuvre requerrait une vraie prise en compte des spécificités culturelles, comme le font déjà autant que possible des infirmières scolaires, des associations de Planning familial et des sage-femmes de la Croix-Rouge.

L’une d’elles, présente quelques heures par semaine dans un établissement de l’ouest guyanais et investie de longue date sur le territoire, a pu observer les premiers signaux faibles d’une évolution possible concernant les grossesses précoces et le nombre d’enfants par femme. Selon elle, de plus en plus de jeunes filles, qui ont vu leur propre mère se débattre dans l’éducation de fratries de dix ou douze enfants, sont plus conscientes des difficultés induites ; elles seraient donc de plus en plus nombreuses à prendre garde à ne pas avoir d’enfant avant la fin de leurs études ou, à tout le moins, à en avoir moins. Une tendance faible, qui se vérifiera ou non dans les indices de fécondité que l’on pourra mesurer dans les vingt ans à venir.

Migrations : discours ambiants, réalités factuelles et impact sur la scolarisation

L’autre versant de ce discours relève souvent d’une xénophobie qui ne dit pas son nom : la croissance démographique serait une « explosion » due à l’installation illégale d’étrangers immigrés en Guyane, qui arriveraient avec leurs enfants, de surcroît perpétuant eux-mêmes une surfécondité. Une croyance bien ancrée et pourtant démentie par les faits.

D’abord, « le dynamisme démographique guyanais reste fondé sur un solde naturel très excédentaire. En effet, les naissances sont bien plus nombreuses que les décès (+ 7000). La jeunesse de la population soutient, en effet, à la fois un taux de natalité élevé et un taux de mortalité faible28Marcelle Jeanne-Rose, En 2020, la natalité reste élevée malgré la crise sanitaire. Bilan démographique de la Guyane en 2020, Insee, 14 décembre 2021. ». L’autre composante de l’évolution de la population, le solde migratoire, « excédentaire jusqu’en 2015, c’est-à-dire qu’il y avait davantage d’entrées sur le territoire que de sorties, […] est déficitaire depuis et s’élève à environ -3500 par an sur les années récentes29Le Blog de l’Insee, Le dynamisme démographique de la Guyane est-il sous-estimé ?, 15 mars 2024. ».

Par ailleurs, la part des nouveau-nés de mère française en Guyane est en léger recul mais demeure beaucoup plus importante que celle des autres nationalités, rassemblant près de la moitié des naissances ; la part des nouveau-nés de mère surinamienne (21,6%) ou brésilienne (6,3%), minoritaires, est également en recul, dans les mêmes proportions (autour de -3 points) ; seuls la part de nouveau-nés de mère haïtienne augmente notablement30Insee, En 2021, la population continue d’augmenter en Guyane avec plus de naissances et de décès, op. cit. 49,7% de mère française en 2011 → 46,8% en 2021 ; 24,1% de mère surinamaise en 2011 → 21,6% en 2021 ; 11,8% de mère haïtienne en 2011 → 22,3% en 2021 ; 9,5% de mère brésilienne en 2011 → 6,3% en 2021 ; 4,8% de mère d’autres nationalités en 2011 → 3% en 2021. – phénomène discontinu depuis 1975, et qui ne renvoie pas nécessairement à une fécondité plus élevée dans cette communauté, mais plus sûrement aux vagues de réfugiés à la suite du tremblement de terre de 2010 et de la crise politique, sociale et sécuritaire dans laquelle le pays s’enfonce, provoquant des flux migratoires entre autres vers la Guyane (mais dans des proportions bien moins élevées que dans d’autres pays américains). Notons au passage que l’intégration des Haïtiens se confronte moins que d’autres nationalités aux barrières linguistiques, la plupart étant francophones31« Pour les jeunes nés à l’étranger et arrivés après l’âge de 3 ans dont le français n’est pas la langue de référence, le niveau de français au moment de leur installation en Guyane est plus élevé qu’il y a dix ans. En 2020, 23% possède un niveau élevé de connaissance du français contre seulement 12% en 2010, ce qui peut s’expliquer par la proportion plus élevée de jeunes nés à Haïti dans cette population (50% en 2020 contre 30% en 2010). ».

Loin de « l’opportunisme » qu’on leur prête parfois, la plus grande part des immigrés « ont rejoint la Guyane principalement pour retrouver ou accompagner un membre de leur famille ou pour fuir les problèmes de leur pays (46%) », selon l’Insee32Ibid..

Les Guyanais sont issus de plusieurs vagues de peuplement au fil des siècles : autochtones amérindiens33Six peuples : Kali’na, Wayana, Lokono, Palikur, Teko, Wayãpi., créoles guyanais et d’origines antillaises, Bushinengés34Descendants du marronnage important chez les esclaves de Guyane hollandaise, l’actuel Suriname. On distingue six peuples, dont quatre se sont aussi établis sur la rive française du Maroni depuis le XVIIIe siècle, et lors de la guerre civile au Suriname (1986-1992) : Djuka, Pamaka, Boni / Aluku, Saamaka., « métros », Chinois, Indiens et Libanais, Hmong… Parmi les natifs de Guyane, l’Insee indiquait en 2020 qu’« une part grandissante […] ont une mère née à l’étranger (59% en 2020 soit 15 points de plus en dix ans)35Insee, En 2020, les jeunes natifs de Guyane sont moins mobiles qu’il y a dix ans, op. cit. », plus du double de ce qu’on observe au niveau national36Insee, Naissances selon la nationalité et le pays de naissance des parents – Données annuelles de 1998 à 2022septembre 2023.. Aux natifs s’ajoutent les immigrés, qui représentent à ce jour 40% de la population37Matthieu Cornut, Éric Mével, Les difficultés d’insertion sur le marché de l’emploi rencontrées par les immigrés s’atténuent pour les descendants d’immigrés, Insee, 21 décembre 2023., contre 10,7% sur la France entière38InseeL’essentiel sur… les immigrés et les étrangers, 29 août 2024. et sont issus la plupart d’Amérique du Sud, des Caraïbes, de l’Hexagone et des autres territoires d’outre-mer. Enfin, « entre 2014 et 2019, le nombre d’immigrés âgés de 15 à 64 ans progresse un peu plus vite que l’ensemble de la population de 15 à 64 ans ».

Le phénomène progresse donc encore relativement, mais n’a rien de nouveau ni de momentané : « en moyenne, les immigrés de 15 à 64 ans sont présents en Guyane depuis 19 ans […] les hommes originaires du Suriname sont présents en moyenne depuis 26 ans, tandis que la durée moyenne de présence des femmes originaires d’Haïti est de 15 ans39Insee, Les difficultés d’insertion sur le marché de l’emploi rencontrées par les immigrés s’atténuent pour les descendants d’immigrés, op. cit. ». Globalement, « parmi les jeunes nés hors de la Guyane et arrivés après l’âge de 16 ans, huit sur dix envisagent leur séjour actuel comme une installation durable ou définitive40Insee, En 2020, les jeunes natifs de Guyane sont moins mobiles qu’il y a dix ans, op. cit. ». La question de leur intégration se pose donc depuis longtemps, et la scolarisation de leurs enfants est un enjeu d’importance et de long terme pour le territoire.

Malgré le principe républicain de droit à l’école pour tous les enfants présents sur le territoire national, l’origine de ceux-ci a un lien direct avec le taux de non-scolarisation : « Les enfants nés à l’étranger sont trois fois plus touchés par la non-scolarisation (20%) que ceux nés en France (6%). Ils représentent 31% des enfants non scolarisés en Guyane. De nombreux obstacles contribuent à la non-scolarisation de ces enfants notamment d’ordre administratif : les documents exigés à l’inscription peuvent paraître longs et compliqués à obtenir. La barrière de la langue peut également constituer un frein à l’inscription des enfants nés à l’étranger. En France hexagonale, la proportion d’enfants non scolarisés nés à l’étranger est de 5%, soit une part quatre fois moins élevée qu’en Guyane41Insee, En Guyane, 6 200 enfants âgés de 3 à 16 ans ne sont pas scolarisés en 2020op. cit. ». Le phénomène concerne d’abord les Surinamais : « En Guyane, trois enfants nés au Suriname sur dix sont non scolarisés. Les enfants nés à Haïti et au Brésil ont également des taux de non-scolarisation supérieurs à la moyenne de la région, avec respectivement 18% et 16%42Ibid. ».

La non-scolarisation, aussi marquée socialement, est également en butte à un chiffrage encore trop flou, empêchant de prendre le problème à bras-le-corps.

Non-scolarisation : un phénomène mal évalué, aux causes multiples, insuffisamment combattu

Des difficultés de chiffrage

Face au défi démographique et aux besoins de scolarisation consécutifs, sur le long terme des progrès énormes ont pu être réalisés : « le nombre d’enfants scolarisés à Mayotte a été multiplié par dix entre 1980 – date à laquelle l’archipel comptait 10 000 élèves – et 2020 – 102 000 enfants ayant fait leur rentrée cette année-là43Rapport d’information 2023 sur l’évaluation de la loi pour une école de la confiance, op. cit. ».

Il n’en demeure pas moins que si, dans les territoires ultramarins comme pour l’ensemble du territoire national, l’éducation est un droit pour chaque enfant, de fortes disparités d’accès à la scolarisation y sont à l’œuvre. Elles sont renforcées par une forme d’invisibilisation des enfants concernés, conséquence de l’absence d’institution ou de dispositif national qui serait chargé du dénombrement des enfants éloignés de l’école, ainsi que de données nationales concernant le nombre d’enfants non scolarisés. Et ce, en dépit des articles 28 et 29 de la Convention internationale des droits de l’enfant qui garantissent à chacun le droit à l’éducation.

La difficulté d’un tel chiffrage en l’absence de tout dispositif national a été mise en exergue par Unicef France. Revenant sur des travaux mis en place en 2022-2023 par le rectorat de Guyane et l’Insee dans l’objectif de recenser les enfants non scolarisés du territoire, l’agence relevait que ces travaux faisaient état de la difficulté d’aboutir à une documentation fiable des situations de non-scolarisation, du fait de l’absence d’une méthode unique de recensement. C’est ainsi que l’Insee faisait alors état de 5898 enfants non scolarisés, quand le rectorat n’en comptabilisait de son côté que 2282. L’Unicef recensait en 2021, quant à elle, 10 000 enfants hors de l’école en Guyane en s’appuyant sur des données de la Cour des comptes.

Le recteur de Guyane parle lui-même d’un « phénomène réel mais difficile à traiter sans chiffres précis […] Nous sommes en grande difficulté face à lui car nous ne le connaissons pas assez bien44En Guyane, tous les enfants n’ont pas accès à l’école, Outre-mer La Première avec AFP, op. cit. ». Les difficultés de chiffrage persistent. L’académie, qui a activé l’Observatoire de la scolarisation et de la réussite scolaire (OSRE)45Créé en 2005, il était resté une « coquille vide » de 2008 à 2018. demandé depuis des années par les associations et le Défenseur des droits, a comptabilisé, en 2023-2024, 1863 enfants non scolarisés46Anaïs Bernadine, « Jour d’évaluation pour l’Observatoire de la scolarisation et de la réussite éducative », MoNews, 14 mars 2024. : ce serait donc un progrès notable par rapport aux 2300 dénombrés l’année précédente, mais qui n’étaient « qu’une estimation47Estimation basée « sur les demandes de scolarisation qui n’ont pas pu être satisfaites ainsi que sur les sorties du système scolaire observées à travers les différentes bases de données disponibles comme les listes d’attente des mairies pour le premier degré, les données du Centre académique pour la scolarisation des élèves allophones nouvellement arrivés de familles itinérantes et de voyageurs, du Service académique d’information et d’orientation et du service de statistiques académiques »indique le rectorat. Cf. Relancé, l’Observatoire de la scolarisation devra répondre aux enjeux d’accès à l’école, Guyaweb, op. cit. ». On est loin des données de l’Insee, qui en dénombrait 5900 en 2019 et 6200 en 2020. « Un trou important dans la raquette reconnu par l’administration, qui concède que « la référence en ce qui concerne les données sur la non-scolarisation en Guyane » reste les données de l’Insee « consolidées et basées sur une méthodologie éprouvée »admettant ainsi que ses propres chiffres sont incomplets48Ibid. ».

Culture scolaire, « refus-guichet », moyens alloués aux collectivités : des causes multiples

Notons au passage que pour expliquer ce phénomène persistant, l’administration renvoie au choix de familles qui ne scolariseraient pas leurs enfants, pour des raisons de transport ou de culture scolaire49« Nous avons des familles qui refusent de mettre leur enfant de trois ans dans une pirogue. [Autre] explication, du côté brésilien la scolarisation obligatoire va jusqu’à 14 ans et 12 ans au Suriname. On remarque une baisse de la scolarisation dans ces tranches d’âge », dans Gérôme Guitteau, Éducation. Les nouveautés de la rentrée, France-Guyane, 30 août 2024..

D’autres facteurs jouent pourtant à plein. D’abord le retard chronique en matière de construction d’établissements scolaires, comme le souligne un rapport sénatorial en 2022 : « le taux de scolarisation est de 77,9% à Mayotte et de 77,7% en Guyane. Il est principalement dû aux tensions sur le bâti scolaire50Rapport d’information n° 543 de Mme Annick Billon, M. Max Brisson et Mme Marie-Pierre Monier, Bilan des mesures éducatives du quinquennat, Sénat, 23 février 2022. », tensions évaluées à un « retard de dix ans dans la construction d’écoles, de collèges et de lycées51En Guyane, trop d’enfants privés de leur droit fondamental à l’éducation, Guyane La Premièreop. cit. » en Guyane.

Ensuite les « refus-guichets » : en 2009, « un collectif pour la scolarisation de tous les enfants en Guyane, le collectif Migrants outre-mer et des Fédérations de syndicats avaient sollicité le Défenseur des droits sur les mesures discriminatoires en matière de droit à l’éducation à l’égard d’enfants étrangers et des peuples des forêts et des fleuves52Yvette Mathieu, Accès aux droits et aux services publics en Guyane – Compte rendu du déplacement du Défenseur des droits en octobre 2016, Défenseur des droits, décembre 2016, p. 16.. » En 2016, « le Défenseur des droits rappelle aux communes que l’inscription à l’école se fait sur présentation de justificatifs d’identité et d’un certificat de vaccination DT polio. L’exigence de tout autre document aboutit à une différence de traitement qui pourrait revêtir un caractère discriminatoire (délibération du Défenseur des droits, MDE 2013-92 du 7 mai 2013)53Ibid. ». En 2021, l’Unicef continue de dénoncer « des difficultés d’inscription scolaire pour de nombreuses familles, qui font face à des exigences illégales de pièces administratives et des « refus-guichet » en particulier pour de nombreux enfants étrangers ou vivant dans des quartiers informels54Grégory Bériet, Silvia Lopes Macedo, Abdelkah Qribi, Alexandra Vié (coord.), Guyane, les défis du droit à l’éducation, Association Migr’En Soi, rapport de recherche commandé par Unicef France, financement Unicef France, Défenseur des droits, 2021. ». Le phénomène est également constaté à Mayotte : « Ainsi, le Défenseur des droits a fait état de réticences de la part de certaines municipalités à inscrire sur les listes scolaires les enfants de nationalité étrangère, hébergés au domicile de tiers ou dans des quartiers d’habitat informel. Dans plusieurs décisions, le juge administratif a établi l’existence de pratiques discriminatoires consistant à exiger, pour la scolarisation d’enfants étrangers, des pièces justificatives non prévues par le code de l’éducation55Rapport d’information 2023 sur l’évaluation de la loi pour une école de la confiance, op. cit. ».

À cela s’ajoute le problème de parents maîtrisant insuffisamment le français pour effectuer les démarches administratives d’inscription de leurs enfants à l’école ; et en face d’eux, « le personnel de l’État […] pas formé pour traiter les demandes d’usagers ne maîtrisant pas le français56En Guyane, trop d’enfants privés de leur droit fondamental à l’éducation, Guyane La Premièreop. cit. ».

Quoi qu’il en soit, il faut prendre la mesure de l’inégalité en la matière entre les données nationales et celles qui ont pu être avancées, de longue date, en Guyane : « Selon l’Insee (recensement 2012), le taux de non-scolarisation pour les élèves âgés de 6 ans était de 4,3% contre 1,8% en métropole et, pour les adolescents âgés de 16 ans, le taux de non-scolarisation était de 10% contre 3,6% en métropole ; sans doute un taux encore plus élevé si on tient compte des difficultés d’inscription, en particulier, lorsque des pièces administratives sont abusivement demandées par des communes pour inscrire les enfants ou lorsque des correspondances sont considérées « destinataire introuvable », situation fréquente dans les zones d’habitat spontané57Accès aux droits et aux services publics en Guyane, op. cit., Défenseur des droits, p. 15. ».

Cette question s’inscrit donc dans une problématique plus large : celle de recensements régulièrement contestés, car ne prenant pas suffisamment en compte l’importance des populations en situation irrégulière et/ou habitant des quartiers informels, parfois depuis plusieurs générations, et dont les enfants, français ou étrangers – parfois dans un flou total quant à leur nationalité – ont dans tous les cas droit à la scolarisation. Il en résulterait des dotations aux collectivités minorées et sans commune mesure avec les besoins réels des populations administrées, au premier chef en matière scolaire. Concrètement : des établissements en nombre insuffisant et dangereusement surpeuplés. Le taux de remplissage a dépassé les 100% « dans la quasi-totalité des établissements », relève Annie Robinson-Chocho, la vice-présidente de la Collectivité territoriale de Guyane (CTG) en charge de l’éducation. « Il y a un goulot d’étranglement à l’entrée à l’école. Toutes les mairies ont des listes d’attente », assure Florent Hennion, le secrétaire académique du Snes-FSU. « Mais cette problématique touche aussi le second degré58« En Guyane, tous les enfants n’ont pas accès à l’école », Outre-mer La Première avec AFP, op. cit. ».

Zoomons sur l’ouest guyanais avec Saint-Laurent du Maroni, deuxième ville de Guyane, commune frontalière du Suriname et territoire situé à la lisière des marges de la République s’il en est. « Aujourd’hui, la ville compte officiellement 50 000 habitants mais tout le monde sait que l’on est plus près de 80 000, souligne Sophie Charles, maire sans étiquette depuis 2018. […] On aurait besoin de 10 à 25 millions d’euros de plus dans notre budget pour assumer toutes nos prérogatives. Nos moyens ne sont pas adaptés, car la population réelle n’est pas retranscrite dans la dotation globale de fonctionnement59AFP, « Saint-Laurent-du-Maroni, en Guyane, bombe sociale à retardement », L’Express, 27 mai 2024. ».

Scolarisation en maternelle et en fin de secondaire : un enjeu décisif aux deux bouts de la chaîne

Outre le fait que le taux de non-scolarisation est sans doute sous-évalué, c’est surtout au début et à la fin de la scolarisation que le bât blesse. Penchons-nous un instant sur le premier bout du problème : selon l’Insee60Insee, 2023-2024, Dossier complet – Commune de Saint-Laurent du Maroni, op. cit., à Saint-Laurent du Maroni, 37% des 2-5 ans seraient non scolarisés, alors que nombre de chercheurs en sciences de l’éducation ont montré à quel point ces premières années de scolarisation sont décisives, notamment pour l’acquisition de vocabulaire61« Les trois années de maternelle sont une période cruciale pour l’apprentissage du langage. Lorsqu’ils reçoivent une stimulation appropriée, les enfants de 3 à 6 ans apprennent entre 10 et 20 mots par jour. Le niveau de vocabulaire joue un rôle clé dans la compréhension orale et dans l’apprentissage de la lecture en CP. C’est la compétence qui différencie le plus fortement les enfants selon leur milieu socio-économique d’origine à l’entrée à l’école, et le retard des enfants les moins stimulés persiste souvent tout au long de la scolarité » dans Ghislaine Dehaene-Lambertz (coord.), Liliane Sprenger-Charolles, Pascale Colé, Séverine Casalis, Stanislas Dehaene, Ranka Bijeljac-Babic, Comment faciliter l’acquisition du vocabulaire à l’école maternelle ? Synthèse de la recherche et recommandations, Conseil scientifique de l’éducation nationale, septembre 2023. – qui plus est sur un territoire où la majorité des enfants sont allophones : « Le Défenseur des droits souhaite que le dispositif d’intervenants en langue maternelle en zone amérindienne soit consolidé et que les efforts soient entrepris pour scolariser un enfant avant ses trois ans afin de permettre le plus tôt possible une meilleure acculturation à la langue française62Accès aux droits et aux services publics en Guyane, op. cit., Défenseur des droits. ». Leur non-scolarisation accentue les inégalités sociolinguistiques dont ils pâtissent déjà ; leur scolarisation contribuerait à les réduire.

La scolarisation dès l’âge de 3 ans, rendue obligatoire en 2019, est difficilement appliquée en Guyane et à Mayotte en raison de la saturation des écoles existantes. En Guyane, une stagnation (de 20 à 30% des enfants de 3 ans non scolarisés entre 2014 et 201963Laurent Marot, « En Guyane, la scolarisation obligatoire à 3 ans met les écoles sous pression », Le Monde, 7 septembre 2019.) aurait succédé à une phase de progression notable (« le taux de scolarisation à [3 ans] passe de 65% en 2007 à 80% en 201364Insee, L’état de l’école en Guyane : des progrès à poursuivre, 16 décembre 2014. »). Pour la tranche d’âge 3-5 ans, on suppose quelques progrès, qui maintiennent néanmoins la Guyane très en-deçà des moyennes nationales : en 2020, « avec 2556 enfants concernés, la tranche des 3 à 5 ans affiche le taux de non-scolarisation le plus élevé (14%). En France métropolitaine, cette tranche d’âge est également la plus concernée mais dans une moindre mesure (8%)65Insee, En Guyane, 6200 enfants âgés de 3 à 16 ans ne sont pas scolarisés en 2020op. cit. ».

Selon un rapport parlementaire66Rapport d’information 2023 sur l’évaluation de la loi pour une école de la confiance, op. cit., à Mayotte, où « l’obligation d’instruction […] n’est intervenue qu’en 1988 » et où « les premières écoles maternelles publiques ont ouvert en 1993 », les progrès ont été fulgurants pendant vingt ans : « La catégorie des enfants âgés de trois à cinq ans est celle dont le taux de scolarisation a le plus augmenté depuis les années 1990, après l’ouverture des premières écoles maternelles publiques. Cette proportion est ainsi passée de 41,1% en 1997 à 63,5% en 2002, avant d’atteindre 77,9% en 2019 ». Mais ils plafonnent : « Avant l’entrée en vigueur de la loi, la part d’enfants de trois à cinq ans non scolarisés atteignait, à Mayotte, le niveau le plus élevé de tous les départements français. En 2016, cette proportion était estimée à 21% par les services du ministère de l’Éducation nationale, contre une moyenne d’environ 1% sur l’ensemble du territoire67On relèvera ici un nouveau flou artistique dans les chiffres, y compris nationaux : dans le paragraphe précédent nous citions l’Insee qui en 2020 estime à 8% la part des enfants de 3 à 5 ans non scolarisés au niveau national ; et ce rapport parlementaire de 2023 l’estime quant à lui à 1%, chiffre lui-même basé sur le rapport de la Cour des comptes en 2020, Le système éducatif dans les académies ultramarines. ».

Trois ans après le vote de la loi, l’évolution laisse dubitatif. Selon le rectorat de Guyane cité dans le rapport parlementaire de 2023, le taux d’inscription des enfants de 3 ans « serait désormais proche de 95%68Ibid. ». Un an auparavant, un rapport sénatorial était plus mesuré69Sénat, Bilan des mesures éducatives du quinquennatop. cit. : « En Guyane et à Mayotte, la mise en œuvre de l’obligation d’instruction connaît une lente progression. […] L’objectif actuel du ministère est de renforcer progressivement la scolarisation pour qu’elle devienne effective pour tous les enfants d’ici 2025, soit plus de six ans après l’entrée en vigueur de la loi. Fait marquant, le taux de scolarisation des enfants de 3 à 5 ans a baissé en Guyane à la rentrée 2020 par rapport à la rentrée 2019. Aujourd’hui, le ministère estime le nombre d’enfants non scolarisés en maternelle à 2800 en Guyane et à 6200 à Mayotte. […] Le gouvernement estimait alors pour la rentrée 2020 le nombre d’enfants de maternelle restant à scolariser à 3518 en Guyane et à 3906 à Mayotte. Les rapporteurs constatent que près de 80% de ces enfants guyanais identifiés comme restant à scolariser ne le sont toujours pas. Quant à Mayotte, les estimations du ministère en 2019 sont largement sous-estimées. »

À l’autre bout de la chaîne, « la collectivité territoriale de Guyane et le rectorat constatent que la sortie du collège marque un tournant dans le parcours scolaire. Le taux de déscolarisation est alors de 4% en Guyane, soit trois fois plus qu’en métropole70Défenseur des droits, Accès aux droits et aux services publics en Guyane, op. cit., p. 15-16. ». Le constat est bien établi, qui doit d’autant plus nous interpeller sur les conséquences locales d’un choix du gouvernement sortant : l’obtention du brevet des collèges deviendrait la condition d’accès au lycée. Le nombre de jeunes concernés en Guyane serait sans commune mesure avec ce qui peut être observé dans l’Hexagone ; et, le cas échéant, les professionnels et les structures qui pourraient venir en renfort ou prendre le relais de l’école en Guyane sont déjà trop peu nombreuses et sous-dotées pour faire face à la situation actuelle, comme dans d’autres zones défavorisées en France. En moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, la suspension (et non l’abandon) de cette réforme vient juste d’être annoncée71Eléa Pommiers, « La réforme du brevet, mesure phare du « choc des savoirs » de Gabriel Attal, est abandonnée pour 2025 », Le Monde, 16 septembre 2024.. Il n’en demeure pas moins que cette précipitation (« une annonce par jour ») érigée en méthode de communication à la tête de l’État a des conséquences disproportionnées dans les outre-mer. Il serait pour le moins salutaire que les futurs gouvernements intègrent mieux et d’emblée les réalités ultramarines dans la conception de leurs politiques publiques nationales.

  • 1
    Léon-Gontran Damas, Retour de Guyane, Paris, édition José Corti, 1938 (rééd. Jean-Michel Place, 2003, p. 110.
  • 2
  • 3
    Dans le premier degré, « [e]ntre les rentrées 2017 et 2022, les académies de Martinique et de Guadeloupe enregistrent de très fortes réductions d’effectifs (respectivement -14,1% et -14,3%), au contraire de la Guyane et de Mayotte dont les effectifs sont en hausse sensible (+9,5% et +14,6%). Les effectifs de l’académie de la Réunion baissent, mais de façon moins marquée (-3,6%). » Dans le second degré, « [d]epuis 2005, les effectifs augmentent de manière continue dans les académies de Guyane (+ 13 400 élèves) et surtout de Mayotte (+ 29 100). À l’inverse, sur la même période, les effectifs de La Réunion (- 2 300 élèves), et surtout de la Guadeloupe (- 11 500 élèves) et de la Martinique (- 16 300 élèves) sont en recul », cf. ministère de l’Éducation nationale, Repères et références statistiques 2023.
  • 4
    Dominique Schnapper, « L’école vecteur des valeurs de la République », Le Monde, 24 novembre 2014.
  • 5
    Ibid.
  • 6
    Alain Michel, « École républicaine, école démocratique », Revue Humanisme, n°283, 2008.
  • 7
    Article premier du code de l’éducation.
  • 8
    Loi n°2005-380 du 23 avril 2005 d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école.
  • 9
    Jeanne Péru-Gelly,« En Guyane, trop d’enfants privés de leur droit fondamental à l’éducation », Guyane La Première, 8 juillet 2021.
  • 10
    Maurice Bilioniere, Gwenaëlle Taupe, « En Guyane, 6 200 enfants âgés de 3 à 16 ans ne sont pas scolarisés en 2020 », Insee, 2020.
  • 11
    Ibid.
  • 12
    « En Guyane, tous les enfants n’ont pas accès à l’école », Outre-mer La Première avec AFP, 5 septembre 2022.
  • 13
    Et le plus élevé des Amériques.
  • 14
  • 15
    Rapport d’information n°1331 présenté par Mme Géraldine Bannier et M. Jérôme Legavre, députés, enregistré le 7 juin 2023, sur l’évaluation de la loi n°2019-791 du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, porté par Jean-Michel Blanquer, ministre de l’Éducation nationale (et ancien recteur de l’académie de Guyane).
  • 16
  • 17
    En Guyane, tous les enfants n’ont pas accès à l’école, Outre-mer La Première avec AFP, op. cit.
  • 18
    Rapport d’information 2023 sur l’évaluation de la loi pour une école de la confiance, op. cit.
  • 19
    Ludmïa Lewis et Karl Constable, « Les chiffres clés de la population guyanaise relevés dans l’étude « Migration, Famille et Vieillissement » », Guyane La Première, 15 décembre 2023.
  • 20
    Rapport d’information 2023 sur l’évaluation de la loi pour une école de la confiance, op. cit.
  • 21
  • 22
    « 27% pour la génération née en 1950-59, 26% pour celle de 1960-69 et 25% pour celle de 1970-79. »
  • 23
    Maurice Bilionière, Gwenaelle Taupe (Insee), Élodie Floury, Angus Lottin (Ined et Université de Strasbourg), « En 2020, les jeunes natifs de Guyane sont moins mobiles qu’il y a dix ans », Insee, 9 juillet 2024.
  • 24
    « La Guyane est la région française avec le taux de recours à l’IVG le plus élevé (43,1 interruptions pour 1000 femmes âgées de 15 à 49 ans) après la Guadeloupe (43,3%) alors qu’il est de 14,9% en France métropolitaine. Ce taux a augmenté de 12 points entre 2016 et 2021 en Guyane », dans Insee, En 2021, la population continue d’augmenter en Guyane avec plus de naissances et de décèsop. cit.
  • 25
    29% des Guyanaises n’utilisent aucun moyen de contraception, proportion bien plus élevée que dans les autres DROM (en Martinique : seulement 12%) ; idem pour la pilule : seules 26% la prennent (49% en Guadeloupe). Cf. Insee, En 2020, les jeunes natifs de Guyane sont moins mobiles qu’il y a dix ansop. cit.
  • 26
    « La solution passe en effet par les femmes et tient en deux mots : éducation et autonomie. Pas l’éducation primaire, mais secondaire : il faut que les filles continuent d’aller à l’école une fois qu’elles sont nubiles. Elles y apprennent les bases du planning familial, et surtout cela les protège d’un mariage précoce. L’autonomie, cela signifie que c’est à elles et non aux hommes de décider de leur fécondité. Dans les pays très pauvres du Sahel, un enfant de plus, c’est un travailleur de plus. Les hommes continuent donc de vouloir beaucoup d’enfants. Mais les quelques enquêtes menées avec les femmes montrent qu’elles sont plus réalistes – ne serait-ce que parce qu’elles veulent, comme dans le reste du monde, accéder à l’emploi et à la vie publique. » Cf. Hervé Le Bras, propos recueillis par Catherine Vincent et Stéphane Foucart, « 10 milliards d’humains, et alors ? », Le Monde, 7 décembre 2017.
  • 27
    « En Asie, au Proche-Orient ou au Maghreb, les femmes ont pris conscience que leur avenir et leur participation à l’espace public dépendaient aussi d’une fécondité maîtrisée donc modérée. En Occident, ces baisses de fécondité se sont étalées sur plus d’un siècle ; aujourd’hui, les pays vivent cette transition démographique en moins d’une génération. » Cf. Hervé Le Bras, interview par Catherine CalvetLibération, 14 février 2013.
  • 28
  • 29
  • 30
    Insee, En 2021, la population continue d’augmenter en Guyane avec plus de naissances et de décès, op. cit. 49,7% de mère française en 2011 → 46,8% en 2021 ; 24,1% de mère surinamaise en 2011 → 21,6% en 2021 ; 11,8% de mère haïtienne en 2011 → 22,3% en 2021 ; 9,5% de mère brésilienne en 2011 → 6,3% en 2021 ; 4,8% de mère d’autres nationalités en 2011 → 3% en 2021.
  • 31
    « Pour les jeunes nés à l’étranger et arrivés après l’âge de 3 ans dont le français n’est pas la langue de référence, le niveau de français au moment de leur installation en Guyane est plus élevé qu’il y a dix ans. En 2020, 23% possède un niveau élevé de connaissance du français contre seulement 12% en 2010, ce qui peut s’expliquer par la proportion plus élevée de jeunes nés à Haïti dans cette population (50% en 2020 contre 30% en 2010). »
  • 32
    Ibid.
  • 33
    Six peuples : Kali’na, Wayana, Lokono, Palikur, Teko, Wayãpi.
  • 34
    Descendants du marronnage important chez les esclaves de Guyane hollandaise, l’actuel Suriname. On distingue six peuples, dont quatre se sont aussi établis sur la rive française du Maroni depuis le XVIIIe siècle, et lors de la guerre civile au Suriname (1986-1992) : Djuka, Pamaka, Boni / Aluku, Saamaka.
  • 35
    Insee, En 2020, les jeunes natifs de Guyane sont moins mobiles qu’il y a dix ans, op. cit.
  • 36
  • 37
  • 38
  • 39
    Insee, Les difficultés d’insertion sur le marché de l’emploi rencontrées par les immigrés s’atténuent pour les descendants d’immigrés, op. cit.
  • 40
    Insee, En 2020, les jeunes natifs de Guyane sont moins mobiles qu’il y a dix ans, op. cit.
  • 41
    Insee, En Guyane, 6 200 enfants âgés de 3 à 16 ans ne sont pas scolarisés en 2020op. cit.
  • 42
    Ibid.
  • 43
    Rapport d’information 2023 sur l’évaluation de la loi pour une école de la confiance, op. cit.
  • 44
    En Guyane, tous les enfants n’ont pas accès à l’école, Outre-mer La Première avec AFP, op. cit
  • 45
    Créé en 2005, il était resté une « coquille vide » de 2008 à 2018.
  • 46
  • 47
    Estimation basée « sur les demandes de scolarisation qui n’ont pas pu être satisfaites ainsi que sur les sorties du système scolaire observées à travers les différentes bases de données disponibles comme les listes d’attente des mairies pour le premier degré, les données du Centre académique pour la scolarisation des élèves allophones nouvellement arrivés de familles itinérantes et de voyageurs, du Service académique d’information et d’orientation et du service de statistiques académiques »indique le rectorat. Cf. Relancé, l’Observatoire de la scolarisation devra répondre aux enjeux d’accès à l’école, Guyaweb, op. cit.
  • 48
    Ibid.
  • 49
    « Nous avons des familles qui refusent de mettre leur enfant de trois ans dans une pirogue. [Autre] explication, du côté brésilien la scolarisation obligatoire va jusqu’à 14 ans et 12 ans au Suriname. On remarque une baisse de la scolarisation dans ces tranches d’âge », dans Gérôme Guitteau, Éducation. Les nouveautés de la rentrée, France-Guyane, 30 août 2024.
  • 50
    Rapport d’information n° 543 de Mme Annick Billon, M. Max Brisson et Mme Marie-Pierre Monier, Bilan des mesures éducatives du quinquennat, Sénat, 23 février 2022.
  • 51
    En Guyane, trop d’enfants privés de leur droit fondamental à l’éducation, Guyane La Premièreop. cit.
  • 52
  • 53
    Ibid.
  • 54
    Grégory Bériet, Silvia Lopes Macedo, Abdelkah Qribi, Alexandra Vié (coord.), Guyane, les défis du droit à l’éducation, Association Migr’En Soi, rapport de recherche commandé par Unicef France, financement Unicef France, Défenseur des droits, 2021.
  • 55
    Rapport d’information 2023 sur l’évaluation de la loi pour une école de la confiance, op. cit.
  • 56
    En Guyane, trop d’enfants privés de leur droit fondamental à l’éducation, Guyane La Premièreop. cit.
  • 57
    Accès aux droits et aux services publics en Guyane, op. cit., Défenseur des droits, p. 15.
  • 58
    « En Guyane, tous les enfants n’ont pas accès à l’école », Outre-mer La Première avec AFP, op. cit.
  • 59
  • 60
    Insee, 2023-2024, Dossier complet – Commune de Saint-Laurent du Maroni, op. cit.
  • 61
    « Les trois années de maternelle sont une période cruciale pour l’apprentissage du langage. Lorsqu’ils reçoivent une stimulation appropriée, les enfants de 3 à 6 ans apprennent entre 10 et 20 mots par jour. Le niveau de vocabulaire joue un rôle clé dans la compréhension orale et dans l’apprentissage de la lecture en CP. C’est la compétence qui différencie le plus fortement les enfants selon leur milieu socio-économique d’origine à l’entrée à l’école, et le retard des enfants les moins stimulés persiste souvent tout au long de la scolarité » dans Ghislaine Dehaene-Lambertz (coord.), Liliane Sprenger-Charolles, Pascale Colé, Séverine Casalis, Stanislas Dehaene, Ranka Bijeljac-Babic, Comment faciliter l’acquisition du vocabulaire à l’école maternelle ? Synthèse de la recherche et recommandations, Conseil scientifique de l’éducation nationale, septembre 2023.
  • 62
    Accès aux droits et aux services publics en Guyane, op. cit., Défenseur des droits.
  • 63
    Laurent Marot, « En Guyane, la scolarisation obligatoire à 3 ans met les écoles sous pression », Le Monde, 7 septembre 2019.
  • 64
  • 65
    Insee, En Guyane, 6200 enfants âgés de 3 à 16 ans ne sont pas scolarisés en 2020op. cit.
  • 66
    Rapport d’information 2023 sur l’évaluation de la loi pour une école de la confiance, op. cit.
  • 67
    On relèvera ici un nouveau flou artistique dans les chiffres, y compris nationaux : dans le paragraphe précédent nous citions l’Insee qui en 2020 estime à 8% la part des enfants de 3 à 5 ans non scolarisés au niveau national ; et ce rapport parlementaire de 2023 l’estime quant à lui à 1%, chiffre lui-même basé sur le rapport de la Cour des comptes en 2020, Le système éducatif dans les académies ultramarines.
  • 68
    Ibid.
  • 69
    Sénat, Bilan des mesures éducatives du quinquennatop. cit.
  • 70
    Défenseur des droits, Accès aux droits et aux services publics en Guyane, op. cit., p. 15-16.
  • 71

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