La régulation du football, un combat commun pour la gauche en Europe

Le système football est le terrain de jeu du libéralisme le plus dérégulé. Il est à ce titre le parfait laboratoire pour expérimenter le début d’une régulation économique. Et si ce sujet était un combat commun pour la gauche à l’occasion des prochaines élections européennes ? C’est ce que proposent, pour l’Observatoire du sport de la Fondation Jean-Jaurès, Richard Bouigue et Pierre Rondeau. 

Les élections européennes se dérouleront le 26 mai prochain et la gauche avance en ordre dispersé. Pas moins de cinq listes (PS-Place publique-Nouvelle Donne, Génération.s, La France insoumise, le Parti communiste, Europe Écologie-Les Verts) seront en lice, en dépit des proximités de certains de leurs électorats sur les questions européennes, idéologiques ou politiques, comme le rappelait récemment Gilles Finchelstein pour les électorats du Parti socialiste, de EE-LV et de Génération.s.

Cette division de la gauche française est d’autant plus regrettable à l’heure des crises climatiques et sociales et en plein mouvement des « gilets jaunes ». Elle pourrait même être une erreur politique fatale au moment où les sondages lui prédisent un score total historiquement bas. Nombre de nos concitoyens ne semblent plus en effet comprendre ce qu’est la gauche, ni ce qu’elle propose : elle serait ainsi en train de disparaître de l’échiquier politique français.

L’enjeu pour la gauche, c’est de trouver un nouveau souffle, un nouvel élan, de nouveaux desseins et de nouveaux objectifs. S’engager dans des combats communs et redonner de la consistance à une espérance qui semble s’éteindre inexorablement.

En 2017, nous avons tenté d’y contribuer en faisant émerger un nouveau discours sur… le football. Pourquoi ne pourrions-nous pas réunir le peuple de gauche autour du sport le plus populaire du monde ? Avec plus de 3 milliards de fans, près de 300 millions de pratiquantes et de pratiquants répartis dans les 211 fédérations de la FIFA, le football connaît des audiences exceptionnelles, une portée médiatique incommensurable et une force de frappe redoutable.

Mais connaît-on vraiment l’iceberg football ? Alors que ce sport vit une hyper-croissance depuis vingt ans, réalisant un chiffre d’affaires total de plus de 20 milliards de dollars en 2018, il connaît en même temps des disparités et des inégalités importantes, en comparaison plus importantes même que dans la société (taux de chômage, taux de suicide, taux de dépression…).

La majorité des footballeuses et des footballeurs, des entraîneuses et des entraîneurs ne vivent pas grand train, la précarité règne, le chômage et l’incertitude sont le quotidien de ces athlètes pleinement concentrés sur leur passion mais encore insuffisamment aidés et accompagnées par les autorités.

Le système football est en réalité le terrain de jeu du libéralisme le plus dérégulé. Il est à ce titre le parfait laboratoire pour expérimenter enfin sa régulation. C’est à la gauche de prendre à bras-le-corps ce sujet, d’expliquer ce fonctionnement, d’apporter des réponses et des propositions : lutter contre les inégalités et la pauvreté, favoriser la formation et la réinsertion, améliorer la régulation et le partage des richesses, encourager le dialogue avec les supporters qui ne sont pas des hooligans.

Des outils existent déjà et gagneraient à être mis en œuvre à échelle européenne ! 

Nous proposons aujourd’hui à la gauche de s’emparer de cette cause : la régulation du système-football, qui est réalité celle du capitalisme, de ses défaillances et de ses externalités. Il s’agit ici d’œuvrer à la construction d’un système plus juste et durable.

Être de gauche, ce n’est pas mépriser un sport richissime, c’est comprendre son fonctionnement, mettre en exergue ses enjeux, faire des propositions pour l’améliorer. Être de gauche, c’est appliquer au football ce qu’on souhaiterait appliquer à l’ensemble de la société.

Et si la régulation du football était un combat commun pour la gauche en Europe ?

 

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