De la guerre contre les drogues à une politique de réduction des risques. Les leçons de ce qu’il faut cesser d’appeler les « salles de shoot »

Face à l’explosion du narcotrafic et de la consommation de drogues sur le territoire français, les pouvoirs publics actuels semblent ne vouloir privilégier que la répression, alors que celle-ci ne peut être efficace sans une action de prévention et d’accompagnement. À ce titre, il faut tirer les leçons des expérimentations menées dans le cadre des espaces de consommation supervisée s’inscrivant dans une politique de réduction des risques qui mérite aujourd’hui d’être fortement assumée et soutenue, comme elle a pu l’être par le passé.

Dans ce rapport, Gustav Fiere, expert associé à la Fondation, démontre ainsi qu’une intransigeance à l’égard du narcotrafic peut et doit cohabiter avec des mesures de réduction des risques. Reconnaître l’utilité des espaces de consommation supervisée et les pérenniser serait le signe qu’une telle politique à l’écoute de la science et du terrain se met en place.

Table des matières

Synthèse
Introduction

L’implantation complexe des espaces de consommation supervisés (ECS) soulève le paradoxe français des drogues
L’expérimentation des ECS s’ancre dans la « double » politique française des drogues
Les ECS font face à l’incohérence politique et à la polarisation sur les drogues en France

Comprendre le fonctionnement des ECS : un défi français pour mener une politique des drogues cohérente 
Les ECS : un maillon essentiel pour répondre aux enjeux de santé et de sécurité liés aux drogues
Changer de paradigme : assumer une politique des quatre piliers en France et mieux accompagner la pérennisation des ECS

Conclusion
Bibliographie
Annexes

Synthèse

En 2025, la France est amenée à décider de la pérennisation des espaces de consommation supervisée (ECS), dispositifs dans lesquels il est possible pour des usagers de drogue de venir consommer des produits dans des conditions sanitaires propres sous la supervision de professionnels. Loin d’être de simples « salles de shoot », les ECS s’intègrent pleinement dans la politique historique française de réduction des risques (RdR). Elles proposent une véritable ré-inclusion dans le soin médico-social à des usagers fortement désaffiliés et souvent sans domicile fixe, tout en améliorant la tranquillité publique d’un quartier en réduisant la consommation de rue et constituant un point de contact pour les riverains.

Les ECS ont toutefois subi de plein fouet une forme d’essentialisation. Malgré les évaluations scientifiques et administratives positives des centres, les pouvoirs publics n’ont pas véritablement soutenu leur diffusion ou leur pérennisation jusqu’à parfois empêcher l’ouverture de nouveaux espaces. Ce manque de clarté à l’échelle nationale met en exergue le paradoxe dans lequel se trouve la France qui compte une des législations les plus répressives sur les drogues et, en parallèle, une politique de RdR bien implantée et acceptée par les Français, mais demeurant méconnue et jamais mise en avant contrairement au bras répressif de l’État. Ce manque de reconnaissance se matérialise sur le terrain où des contestations très vives de certains riverains à l’égard de structures de RdR adviennent encore aujourd’hui.

Face à l’explosion du narcotrafic et de la consommation de drogues sur son territoire, la France enclenche une nouvelle étape de réflexion quant à sa gestion des drogues et soulève notamment l’absence de véritable soutien à une politique préventive quant à l’usage. Cette volonté politique doit impérativement se reposer sur la cinquantaine d’années d’expérience de la RdR, une politique qui a su trouver sa place au sein de la politique répressive française, mais qui mérite aujourd’hui d’être fortement assumée et soutenue comme elle l’a été par les figures politiques historiques que furent Michèle Barzach etSimone Veil.

Les pouvoirs publics français gagneraient à ne jamais penser leur action répressive sans une action de prévention et d’accompagnement. Le modèle des quatre piliers en Suisse forme un exemple d’une telle mise en place, preuve qu’une intransigeance à l’égard du narcotrafic peut et doit cohabiter avec des mesures de RdR. Reconnaître l’utilité des ECS et les pérenniser serait le signe qu’une telle politique à l’écoute de la science et du terrain se met en place.

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