Dans un monde de crises, la voie de l’économie sociale et solidaire

Face aux défis toujours plus nombreux auxquels nos sociétés sont confrontées, les organisations de l’économie sociale et solidaire sont l’une des réponses universelles possibles, parce qu’elles mettent la personne et le collectif au cœur de leur action. Yves Pellicier, président de la MAIF, plaide pour leur développement en France comme à l’échelle mondiale.

La loi relative à l’économie sociale et solidaire (ESS) adoptée en juillet 20141Loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire. fête cette année ses dix ans. Pour la première fois, en France, un texte législatif a fixé un cadre juridique précis à ce vaste secteur protéiforme en lui définissant un périmètre clair et des outils d’aide et de financement. Il aura donc fallu près d’un siècle et demi pour que la loi hisse les principes de l’ESS et ses acteurs à ce niveau de reconnaissance. Un siècle et demi au cours duquel associations, coopératives, fondations et mutuelles n’ont cessé de grandir dans l’espace économique et social et de tenir le cap d’une économie résolument humaine, solidaire et ancrée dans son territoire.

Depuis lors, les événements se sont accélérés. La loi PACTE a été adoptée en mai 20192Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises., suivie en juin 2022 d’une recommandation de l’OCDE sur l’économie sociale et solidaire et l’innovation sociale3La recommandation sur l’économie sociale et solidaire et l’innovation sociale, adoptée par le Conseil de l’OCDE au niveau des ministres, détermine neuf piliers directeurs pour garantir le développement de l’économie sociale aux échelles locale, nationale et internationale. Réunion du Conseil de l’OCDE au niveau des ministres, Recommandation sur l’économie sociale et solidaire et l’innovation sociale (adoptée), 10 juin 2022.. La même année, la Conférence internationale du travail reconnaît la contribution décisive de l’ESS dans le travail décent et charge le Bureau international du travail de préparer une stratégie et un plan d’action dédiés4Organisation internationale du travail, « Le travail décent et l’économie sociale et solidaire », Conférence internationale du Travail, 110e session, Rapport VI, 2022.. En avril 2023, une résolution de l’ONU consacre une définition universelle de l’ESS et reconnaît sa contribution à la réalisation des objectifs de développement durable5Assemblée générale des Nations unies, « Promouvoir l’Économie sociale et solidaire pour le développement durable », résolution A/RES/77/281, 18 avril 2023.. À ce titre, nous sommes fiers d’avoir été associés en tant qu’entreprise mutualiste à l’intense travail entrepris par la France, aux côtés de l’Espagne et d’une quinzaine d’autres pays, pour défendre l’adoption de ce texte. Nous avons pu prendre la parole pour illustrer les apports du modèle de gouvernance mutualiste aux enjeux économiques, sociaux et environnementaux de notre époque. Enfin, en novembre 2023, le Conseil de l’Union européenne a adopté une recommandation relative à la mise en place de conditions cadres favorables au développement de l’économie sociale6Recommandation du conseil C/2023/1344, du 27 novembre 2023, relative à la mise en place des conditions-cadres de l’économie sociale..

Cette reconnaissance internationale répond à une double prise de conscience, essentielle. D’une part, la dimension démocratique de la gouvernance, la place de la personne humaine dans l’économie, la prise en compte par les entreprises de leurs impacts sociaux et environnementaux et l’inscription de l’activité économique dans un temps long sont des impératifs non négociables, qui demandent des cadres juridiques adaptés. D’autre part, nul mieux que l’ESS n’incarne aujourd’hui cette réponse aux crises de notre époque.

En 2008 déjà, en pleine tourmente financière, les acteurs de l’ESS ont démontré leur résilience et les vertus d’une économie réelle, ancrée dans un territoire et refusant la spirale infernale du superprofit. En 2020, lors de la crise liée à la pandémie de Covid-19, ils ont joué un rôle primordial d’amortisseur des « effets socio-économiques de la crise »7Timothée Duverger, Économie sociale et solidaire : une reconnaissance internationale, Fondation Jean-Jaurès, 30 mai 2023..

À l’occasion de l’adoption par le Conseil de l’Union européenne de sa recommandation sur l’ESS, Yolanda Díaz Perez, ministre espagnole du Travail et de l’Économie sociale, rappelait à juste titre que « les entités de l’économie sociale s’attaquent à certains des plus grands défis auxquels notre société est confrontée (…). Nous devons exploiter l’énorme potentiel de l’économie sociale, afin d’améliorer nos réponses aux défis sociaux et environnementaux auxquels nous sommes tous confrontés et de veiller à ce que personne ne soit laissé de côté8Yolanda Díaz Perez, « Économie sociale : le Conseil recommande aux États membres d’en exploiter tout le potentiel », Conseil européen, 9 octobre 2023.. »

Mais il faut aller encore plus loin, car la crise qui assaille le monde aujourd’hui est multi-frontale. Notre monde se fissure comme jamais sous l’effet de trois défis majeurs : un défi climatique et environnemental, un défi anthropologique et un défi démocratique. Ces enjeux sont historiques. Ils engagent en profondeur notre devenir et celui des générations futures.

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La crise environnementale

Chacun s’accorde désormais à reconnaître le rôle central de l’entreprise face au dérèglement climatique. Rôle négatif, puisqu’elle en porte largement la responsabilité. Mais aussi rôle positif, parce qu’elle peut mettre en œuvre des solutions drastiques pour le ralentir ou limiter ses impacts.

Ce défi est majeur : il y va de la vie et de la survie de tous les êtres vivants, l’être humain compris. Pour y répondre, nous devons parvenir à transformer nos modes de production et nos modes de consommation. Mais nous devons également anticiper une nouvelle organisation économique et sociale, destinée à absorber les inévitables flux migratoires issus de régions du monde qui sont d’ores et déjà condamnées.

Il y a donc urgence. Pourtant, la mutation des systèmes industriels, économiques et financiers s’opère bien trop lentement pour être au rendez-vous fixé par les accords de Paris. Certes, les institutions ne restent pas sans rien faire. De nombreuses entreprises ont engagé des efforts parfois colossaux et les innovations vertes se multiplient. Mais, à peine adopté, le Pacte vert pour l’Europe se fissure déjà, car les gouvernements reculent face aux pressions sectorielles : ainsi, par exemple, le verdissement de la Politique agricole commune (PAC) a connu un recul significatif lors du vote du Parlement européen du 24 avril 2024 faisant suite à la mobilisation des agriculteurs européens9Virginie Malingre, « Le Parlement européen entérine la fin des ambitions environnementales de la PAC », Le Monde, 24 avril 2024.. Ou encore la règlementation sur les emballages et déchets d’emballages qui, suite à d’importantes pressions, a privilégié le recyclage au réemploi tout en continuant d’autoriser l’utilisation de carton à usage unique10Fabienne Loiseau, « Emballages : l’Europe réglemente… mais pas trop », Reporterre, 6 mars 2024.. Partout la logique du profit immédiat continue de l’emporter sur les enjeux futurs. Partout les intérêts particuliers continuent d’étouffer un intérêt commun – en réalité, un enjeu existentiel.

En avril 2023, le vote par l’Assemblée générale des Nations unies de la résolution « Promouvoir l’Économie sociale et solidaire pour le développement durable11Assemblée générale des Nations unies, « Promouvoir l’Économie sociale et solidaire pour le développement durable », résolution A/RES/77/281, 18 avril 2023. » a permis non seulement de donner une définition internationale à l’ESS mais aussi de reconnaître sa contribution à la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD), notamment au niveau local. L’ancrage territorial des entreprises et des organisations de l’ESS est en effet une dimension très importante de leur enracinement dans l’économie réelle. Prendre systématiquement en compte son territoire, associer ses parties prenantes dans la construction de sa stratégie : telles sont les conditions majeures pour l’entreprise si elle veut agir positivement sur le monde.

Les mutuelles en offrent une illustration saisissante, parce qu’elles se refusent à dissocier la prise en considération de leur environnement et celle des intérêts de leurs collaborateurs et de leurs clients-sociétaires. À cet égard, Pascal Demurger, dans son livre L’entreprise du XXIe siècle sera politique ou ne sera pas12Pascal Demurger, L’entreprise du XXIe siècle sera politique ou ne sera pas, La Tour-d’Aigues, Éditions de l’Aube, 2019. a mis en évidence ce cercle vertueux : prendre en compte les parties prenantes est bénéfique à la performance de l’entreprise, et cette performance rejaillit sur ce même environnement.

L’absence d’actionnaires à rémunérer facilite à l’évidence des prises de décision ambitieuses et puissantes13C’est le cas du dividende écologique instauré par MAIF qui consacre désormais 10% de ses bénéfices à la nature, afin de protéger la biodiversité et développer la solidarité climatique.. Il n’en demeure pas moins qu’elles sont à la portée de toutes les entreprises. Je crois sincèrement qu’il nous appartient d’ouvrir la voie. Nous sommes des entreprises et des organisations pionnières. Notre devoir, au nom de l’intérêt général, doit nous conduire à valoriser, promouvoir et rendre applicables par le plus grand nombre ces principes fondamentaux. Face aux défis qui nous attendent, nous ne pouvons plus transiger.

La crise anthropologique

La crise anthropologique que traversent les sociétés occidentales est peut-être moins évidente au premier abord. Elle emporte pourtant des conséquences vitales pour leur avenir. On peut en distinguer trois composantes, étroitement liées.

La première concerne la place de l’être humain dans la nature. Dans le contexte du dérèglement climatique, elle ne cesse de s’exacerber. Elle exige de chacun qu’il reconnaisse et assume ses responsabilités, et qu’il s’engage à le combattre.

Par ailleurs, l’homme est confronté aux conséquences directes de ses innovations technologiques. Celles-ci ne touchent pas seulement son environnement, mais sa propre définition. Le projet transhumaniste d’une humanité augmentée prétend repousser des limites tenues jusqu’ici pour fondamentales : la mort, la finitude. L’intelligence artificielle (IA) générative semble quant à elle remettre en question les capacités créatives de l’esprit humain, et interroger en retour sa liberté et sa singularité.

C’est pourquoi la crise anthropologique est en définitive une crise de la compréhension que l’homme entretient de lui-même. L’individu, autodéterminé et autosuffisant, a été au cœur du projet moderne et du modèle capitaliste de développement. En se posant comme source de toute valeur, selon ses besoins et ses aspirations, il a cru pouvoir s’émanciper des autorités traditionnelles. Mais c’est pour se heurter à un supplément d’aliénation, du fait de son incapacité à résoudre seul les grands problèmes du monde, et de la dépendance de ses désirs à une société de consommation de masse. Face à ce modèle, celui de la personne, qui comprend sa valeur en relation avec les autres, s’impose désormais comme le plus à même de répondre à une exigence sociale et politique d’égalité, de justice et de solidarité. 

Devant cette crise, l’entreprise mutualiste a-t-elle un rôle à jouer ? Bien évidemment. Car elle ne se contente pas de proposer un modèle alternatif d’organisation économique. Elle exprime une vision de la société et de son fonctionnement, centrée sur la personne, sa dignité et ses aspirations.

Son rôle est crucial dans la transition écologique, comme on vient de le rappeler. C’est parce qu’elle se nourrit d’une conception relationnelle de l’être humain, qui ne le place pas en concurrence avec la nature.

C’est pourquoi l’ESS est par ailleurs convaincue que la technologie doit être mise au service de l’humain, et non destinée à le remplacer, moins encore le concurrencer. En aucun cas, l’IA générative ne doit se substituer aux collaborateurs. Elle doit viser à les aider dans certaines tâches, afin de leur dégager du temps pour d’autres. Elle doit ainsi prendre sa place dans une manière de repenser le travail, au service de l’apport singulier et créatif que chacun peut apporter à l’entreprise.

Enfin, dans l’ESS, c’est pour répondre à un besoin humain réel et fondamental que se construisent le projet et l’organisation sous forme d’association, de coopérative ou de mutuelle. Ainsi, lorsque la MAIF a été fondée en 1934, c’est par un groupe d’instituteurs qui ne trouvaient pas à s’assurer à un prix juste au regard du risque raisonnable qu’ils représentaient. De même, les associations répondent à des situations de détresse qui ne sont prises en charge par personne, en proposant un accès au logement, un accompagnement dans la maladie, ou le recours au microcrédit pour sortir de la pauvreté. Alors que l’organisation capitaliste se construit autour d’une coalition d’intérêts financiers où le bénéfice prend le pas sur l’homme, devenu variable d’ajustement parmi d’autres, la personne reste au cœur du projet de l’ESS. C’est son juste besoin qui est central, et qui justifie de déployer une solidarité active dans un collectif doté de sens.

La crise démocratique

À la crise environnementale et la crise anthropologique s’ajoute une profonde remise en question des institutions et des valeurs démocratiques. Alors que la fin de la guerre froide pouvait laisser croire à une victoire de la démocratie, celle-ci est aujourd’hui critiquée, soupçonnée, rejetée, y compris par ses propres citoyens. La montée des populismes dans les sociétés occidentales en est une manifestation directe.

Elle découle en grande partie de l’angoisse suscitée par le dérèglement climatique et la crise anthropologique. Bien que les effets de la crise environnementale ne puissent plus être niés, ils alimentent chez une partie de la population, notamment parmi les plus vulnérables économiquement, une réaction de déni, qui oppose faussement fin du monde et fin du mois. Pourtant, précarité sociale et dommages écologiques sont les deux effets d’une même cause, l’exploitation économique des ressources humaines et naturelles.

De même, le repli sur soi et les valeurs refuges d’une identité collective fantasmée (« eux » vs « nous ») sont les deux faces d’une même crise de l’individu. Le populisme s’alimente ainsi à une triple contradiction. D’abord, le sentiment d’une partie des citoyens d’appartenir à une majorité oubliée et ignorée nourrit à la fois le désir d’une participation directe aux décisions publiques (en témoigne la nouvelle popularité du référendum d’initiative citoyenne au sein d’une partie de la population) et une tendance à confier un pouvoir fort à une personnalité providentielle et autoritaire. Ensuite, l’accès toujours accru, par l’information et les réseaux sociaux, aux événements mondiaux s’accompagne, sous l’effet des théories du complot et des fake news, d’un sentiment d’abandon, d’exclusion et de rejet qui alimente colère, ressentiment et aspiration de moins en moins contenue à l’action directe et à la violence. Enfin, dans une société où l’individualisme est à la fois entretenu par le consumérisme et confronté à l’échec de son autosuffisance, et alors même que les solidarités traditionnelles se sont progressivement effacées, le populisme donne l’illusion de pouvoir renouer avec des valeurs traditionnelles et des appartenances fantasmées (la nation, la religion, voire la « race »). Mais il est le premier adversaire de tous les moyens de reconstruire des principes authentiquement partagés, en enfermant les individus dans leurs peurs et leurs angoisses.

Comment nier que certaines méga-entreprises mondiales participent à cette déstabilisation des valeurs démocratiques ? Les GAFAM ont initié une révolution technologique qui a touché l’ensemble de la société et qui leur confère une puissance économique et un pouvoir d’influence inédits. Parfois alliées à une idéologie de rejet de l’État, elles promeuvent une conception ultra-individualiste de la liberté qui fragilise pourtant l’accès à une information fiable, condition essentielle de la vitalité des institutions démocratiques. Elles prétendent même s’inviter, à l’image d’Elon Musk dans le conflit ukrainien, sur la scène géopolitique, au risque d’en exacerber l’instabilité. À un niveau différent, d’autres entreprises, notamment dans le domaine des médias, ne répugnent pas à exploiter des peurs et des angoisses contemporaines, rendant ainsi de plus en plus plausible l’hypothèse d’un basculement populiste de la démocratie. Enfin, l’impératif du business as usual motive certains acteurs économiques à se rapprocher de mouvements politiques jusqu’ici rejetés aux extrêmes, quitte à leur apporter crédibilité et légitimité.

Dans ce paysage, les entreprises de l’économie sociale cherchent une fois encore à porter un projet radicalement différent. Celui-ci est fondé sur leurs valeurs humanistes, le respect de la laïcité et une adhésion aux valeurs démocratiques qui est au cœur de leur modèle de gouvernance.

À cet égard, le modèle de MAIF se montre particulièrement éloquent. Créée quelques mois après le 6 février 1934, dans le contexte d’une République déjà menacée dans ses fondements et une situation internationale marquée par la marche à la guerre, elle n’a cessé, au cours de ses quatre-vingt-dix ans d’existence, de faire entendre son attachement à la démocratie. Elle le fait dans le fonctionnement de ses institutions, qui repose sur la représentation et la participation de ses sociétaires et de ses militants – liberté. Elle a ainsi permis de développer et d’entretenir des valeurs collectives de débat, de respect et de reconnaissance de l’engagement de chacun – égalité. Dans le cadre même de la relation entre salariés et dirigeants, elle a accordé une place décisive au partage de la valeur et au management par la confiance, qui permettent l’épanouissement de ses collaborateurs en les associant au sens de leur engagement – fraternité. Là est sa fidélité à un idéal républicain, qui exige d’œuvrer à la réduction de la fracture sociale où s’engouffre aujourd’hui le populisme.  

C’est pourquoi l’entreprise mutualiste constitue aujourd’hui un espace de résistance. Elle est un lieu où les valeurs démocratiques retrouvent leur dimension concrète et vivante, et leur crédibilité dans le monde où nous vivons. Elle peut ainsi, à son niveau, contribuer à ce renouveau de la démocratie que beaucoup de nos concitoyens continuent à appeler de leurs vœux, et qui ne peut rester un slogan vide face aux menaces qui nous entourent.

Et maintenant, que faire ?

Nous vivons un moment de l’histoire où le temps semble s’accélérer et devenir incontrôlable, où la violence des idéologies abîme le débat public, où l’exigence de la pensée recule devant le sentiment que la vérité est plus relative que jamais. C’est pourquoi l’homme a besoin d’être replacé au cœur de la société. Nous avons tous besoin de nous sentir à nouveau considérés, associés aux décisions de ce qui nous environne et impacte notre vie. Nous avons tous besoin de ne pas nous sentir seuls aux prises avec la complexification du monde, afin de comprendre le sens de notre destin commun.

On le voit, les organisations de l’économie sociale et solidaire sont l’une des réponses universelles possibles face aux défis qui s’accumulent, parce que la personne et le collectif en constituent les principes et la boussole. Il y a donc urgence à accélérer ces modèles d’entreprendre et à en développer la force d’inspiration pour les entreprises dites « classiques ».

D’abord, il faut poursuivre le développement de l’ESS à l’échelle mondiale en veillant à une mise en œuvre effective de la résolution de l’ONU afin que ses modèles accélèrent leur développement. Que l’on songe, par exemple, au fait qu’un grand pays comme le Brésil n’autorise toujours pas la création de mutuelles d’assurance !

Ensuite, il est nécessaire de structurer des modalités de financement ambitieuses pour accompagner ce développement, y compris dans notre propre pays. Comme l’a souligné en avril 2017 le rapport de la commission sur le le financement de l’économie sociale d’ESS France14Rapport sur le financement des entreprises de l’économie sociale et solidaire, commission menée par Frédéric Tiberghien, ESS France, avril 2017., ce sujet est « largement délaissé ». La faible considération portée aux acteurs de l’ESS dans l’attribution des marchés publics comme au sein des véhicules d’investissement traduit un manque de connaissance persistant à l’égard de la pertinence économique de ces acteurs. Elle est symptomatique d’un logiciel économique de l’État et des investisseurs institutionnels qui méconnaît encore un fait majeur : loin de lui faire obstacle, l’impact social et environnemental contribue à la performance économique.

Enfin, il faut encourager tous les leviers permettant de rendre les modèles « classiques » d’entreprises plus vertueux. Si nous voulons réellement transformer le monde, nous allons devoir travailler avec l’économie traditionnelle et l’aider à puiser l’inspiration au cœur de nos principes. Je crois à la biodiversité économique, mais je crois encore plus que ses composantes doivent poursuivre un même objectif : l’épanouissement de l’être humain.

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