L’Histoire des relations entre juifs et musulmans

Pour la Cité des livres, Benjamin Stora revient sur l’ouvrage qui a dirigé chez Albin Michel.

Benjamin Stora est sociologue et historien. Il enseigne l’histoire du Maghreb contemporain (XIXe et XXe siècles), les guerres de décolonisations, et l’histoire de l’immigration maghrébine en Europe, à l’université Paris 13 et à l’INALCO (Langues Orientales, Paris).Parmi sa trentaine d’ouvrages, on peut citer La Gangrène et l’Oubli. Mémoire de la guerre d’Algérie, La Découverte, 1991 ; Imaginaires de guerre, Algérie-Vietnam, La Découverte, 1998 ; Algérie-Maroc. Histoires parallèles, Maisonneuve et Larose, 2003 et Les Trois exils des juifs d’Algérie, Stock, 2006.

 

 

Extraits de l’introduction de L’Histoire des relations entre juifs et musulmans :

Cet ouvrage, qui n’occulte ni les malheurs ni les heures fastes, a pour humble ambition de rendre accessible le résultat des recherches contemporaines afin de proposer une synthèse commune sur les mémoires des uns et des autres. Il pourra servir de préambule destiné à être prolongé en suscitant les rencontres et les concertations. Notre intention est de donner la chance au laboratoire du chercheur de féconder le sens commun du citoyen. Alors chacun sera en mesure d’établir le bilan du contentieux en fabriquant le compromis qui l’aidera à tracer les voies de la réconciliation (sans forcément occulter la part de l’inconciliable). Nous ambitionnons aussi de mettre à la disposition des autorités des pays concernés la matière pédagogique qui pourra rapprocher les systèmes éducatifs, afin d’établir les fondements didactiques de la reconnaissance mutuelle tant attendue et qui reste à venir. […] Nous n’avons pas cherché à présenter dans cet ouvrage une histoire judéo-musulmane qui serait d’emblée convergente. Mais nous avons rassemblé des spécialistes parmi les plus éminents du monde entier pour restituer une relation entre juifs et musulmans telle qu’elle s’est tissée sur leur parcours historique. Nous avons tenu à dépasser le prisme qui isole chacune des deux entités. Ainsi avons-nous tenu à déborder les frontières pour traverser les contraintes des communautarismes et des nationalismes et situer cette relation à l’horizon de l’histoire universelle où elle s’est manifestée. […]Les lecteurs vont ainsi parcourir l’histoire de nombreux pays où ont longtemps vécu côte à côte, face à face, ensemble ou séparément, musulmans et juifs. Entre trois continents, d’est en ouest, du nord au sud, du Maroc à l’Iran et à l’Inde, d’al-Andalus au Yémen, de l’Algérie à l’Égypte ou à la Mésopotamie, de l’Asie Mineure aux Balkans… Et l’on découvrira les métamorphoses subies ou voulues par musulmans et juifs, de l’édification des empires musulmans à l’arrivée des puissances coloniales européennes, les problèmes d’assimilation à la culture des dominants, les bouleversements des modes d’organisation des communautés, leur croissance démographique, les évolutions de la nature des activités professionnelles, leur essor ou déclin culturel et politique. En allant à l’histoire réelle, tout en ne lâchant pas les mythes qui ont influencé les comportements, les représentations de l’autre se déplacent, et l’histoire est rendue à son dynamisme. En ces temps où cette relation se porte mal, très mal, il est hors de question de dissimuler les oppositions religieuses mais aussi celles qui se manifestent dans l’histoire politique et sociale. C’est au cœur de cette scène tragique que nous situons les contributions qui suivent. Nous nous sommes attachés à rendre possible cette histoire distancée, équilibrée, apaisée, qui semblait de prime abord impossible. […]

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