Dans le cadre du Forum international Planet A pour penser l’agriculture de demain, la Fondation a posé trois questions à Guillaume Garot, député de la Mayenne et ancien ministre délégué à l’Agroalimentaire.
Quels sont les grands défis de l’agriculture française et mondiale pour les dix prochaines années ?
Guillaume Garot : Le défi alimentaire mondial nous concerne tous. Comment nourrir 9 milliards d’humains en 2050 ? Nous sommes 7 milliards aujourd’hui.
Au niveau mondial, l’enjeu est celui de la sécurité alimentaire et environnementale pour garantir à chaque pays les moyens de nourrir sa population. Il y a urgence face à la paupérisation de la biodiversité agricole, risque majeur pour la sécurité alimentaire. Nous devons aussi lutter contre le gaspillage alimentaire. Plus d’un tiers de production mondiale est perdue entre le champ et le consommateur. Il faut ici investir massivement dans des programmes de lutte, et coordonner l’action publique contre le gaspillage alimentaire.
En France, il nous faut concilier qualité et compétitivité. Viser l’excellence de nos produits tant chez nous qu’à l’exportation, en répondant aux attentes des consommateurs. Sans baisser les standards sociaux des travailleurs en France et en sauvant l’environnement, il faut réussir à (re)conquérir les marché français et internationaux. En résumé, produire les meilleurs produits, aux meilleurs prix, en préservant la planète.
Les principales marges de manœuvre pour une meilleure condition des agriculteurs français peuvent-elles passer par une réforme de la Politique agricole commune (PAC) ?
Guillaume Garot : Tout dépend de la réforme que nous voulons !
L’objectif doit être de garantir la meilleure sécurité alimentaire aux consommateurs et d’assurer un revenu digne aux producteurs. Rien ne sera possible ni durable sans régulation des marchés, pour les stabiliser.
Rien ne sera possible non plus sans une politique commune qui reste véritablement européenne, pour limiter les distorsions de concurrence et pour favoriser une agriculture exigeante sur la qualité et la protection de la planète.
La proposition de la Commission européenne pour la prochaine PAC ne vise en rien ces objectifs : elle ouvre les vannes libérales et renonce à toute véritable ambition pour la transition agricole et alimentaire.
Quels sont les effets des comportements alimentaires sur l’agriculture ? Quelles actions sont envisageables pour y faire face ?
Guillaume Garot : Nous sommes passés dans un paradigme consumériste très différent de celui que nous avons connu jusqu’à présent. Les consommateurs sont de plus en plus exigeants sur la qualité. Ils ont raison. Cela impacte très sérieusement le processus de production dans la filière alimentaire.
C’est la raison pour laquelle je plaide pour une grande politique alimentaire en France et en Europe. Que voulons-nous dans notre assiette ? C’est une question de justice sociale, tant les inégalités sont grandes devant l’alimentation. Il ne s’agit pas de réserver l’excellence pour quelques-uns qui auraient les moyens, et d’oublier tous les autres. C’est l’ensemble de l’offre alimentaire qui doit être amélioré. Produire une alimentation de qualité pour tous, nous engager à mettre en œuvre la transition agricole et alimentaire, pour produire mieux et transformer mieux : c’est ainsi que l’on redonnera du revenu aux agriculteurs. Plus de qualité dans l’assiette, c’est plus de revenu pour le producteur.