Alors que le G20 a mis à l’ordre du jour la place de l’Afrique dans l’économie mondiale au cours de la dernière session et qu’Emmanuel Macron a annoncé la création d’un comité présidentiel pour l’Afrique, lors de son discours énonçant les grandes lignes de sa politique étrangère le 29 août dernier, Martine Méheut, présidente de Citoyennes pour l’Europe, met en avant la nécessité d’un partenariat réciproque entre l’Union européenne et l’Afrique.
On parle beaucoup aujourd’hui d’un « plan Marshall de l’Europe pour l’Afrique ». Mais la référence ne convient pas. La situation est par trop différente. L’Afrique doit demain pouvoir répondre rapidement à son explosion démographique puisque sa population sera multipliée par 10 à l’horizon 2050. Elle comptera alors 2,5 milliards d’habitants et, dès 2030, 500 millions de personnes chercheront du travail. La situation de l’Europe en 1948 ne demandait pas de prévoir les conséquences d’un tel développement démographique malgré ce que l’on a appelé avec emphase le baby boom. Le plan Marshall a été pensé pour remettre sur pied l’économie européenne et il y a réussi.
L’enjeu africain est d’une autre ampleur. Il s’agit de permettre à sa jeunesse de trouver son chemin pour vivre de façon autonome. Pour y parvenir, il faudra privilégier deux exigences :
- l’éducation de tous les jeunes, filles comme garçons,
- l’émancipation économique des différents pays africains.
Certains projets sont intéressants : celui, initié par Jean-Louis Borloo, de la Fondation « Énergies pour l’Afrique », de développement de l’électrification tout en favorisant les énergies renouvelables ou celui de l’Allemagne, « Compact with Africa », autour notamment de la Côte d’Ivoire, du Maroc, du Rwanda, du Sénégal et de la Tunisie. L’objectif est de créer par exemple des centres d’innovation verte pour répondre au paradoxe de l’Afrique subsaharienne qui, malgré son potentiel agricole, dépend de l’importation de nourriture et compte plus de 200 millions de personnes souffrant de la faim. Derrière ces projets et initiatives, subsiste cependant l’énorme problème de l’eau.
La décision d’Angela Merkel de mettre l’Afrique à l’agenda du G20 cette année a permis un dialogue fructueux avec les responsables des pays africains qui a montré qu’il ne s’agissait pas de monter un plan pour l’Afrique mais avec l’Afrique dans un véritable partenariat sur un pied d’égalité, comme l’a dit le président du Niger, Mahamadou Issoufou, à cette occasion : « L’Afrique a besoin de l’Europe qui, à son tour, a besoin de l’Afrique. Il est donc normal que les deux continents investissent dans un avenir commun. Cela nécessitera des efforts de part et d’autre dans le cadre d’un partenariat gagnant-gagnant ».
L’idée d’aide par pure générosité de l’Europe ne tient pas. Il s’agit bien de construire une coopération entre l’Europe et l’Afrique par réalisme prévisionnel pour pouvoir répondre dans l’avenir aux capacités d’employabilité des jeunes grâce à leur formation, pour développer les zones rurales, mais aussi pour améliorer les infrastructures en vue d’investissements privés – ce qui demande sécurité, transparence et primauté de la loi.
Il est clair que ce partenariat ne peut être envisagé sans une réelle coopération des États de part et d’autre. Mais il faut tout d’abord parvenir à une ferme décision commune des gouvernements lors d’un prochain Conseil européen au cours duquel chacun prendra ses responsabilités équitablement. L’ampleur du projet requiert cette dimension.
Ce sera alors, à n’en point douter, pour les citoyens européens un signe marquant de la capacité de l’Europe à anticiper l’avenir au-delà de cette piètre politique frileuse menée sans perspective par les différents États européens en réponse à l’immense problème humain de la migration.