Pour l’Observatoire de l’éducation, Christophe Premat et Cyril Coulet analysent les dispositifs d’accompagnement de l’insertion professionnelle des jeunes dans les pays nordiques. Une mixité des parcours privilégiée comme solution pour lutter contre l’échec de formation et d’orientation.
La tranche d’âge des 15/21 ans (désignée par la dénomination -3/+3) est confrontée à de nombreux défis. Si la société attend du système éducatif qu’il favorise l’insertion sociale et professionnelle pour tous, c’est une mission d’accompagnement que celui-ci peine à accomplir.
Le « -3/+3 » couvre quatre niveaux dans la classification internationale de l’éducation (CITE). Le niveau 3 désigne le deuxième cycle secondaire, le 4 l’enseignement post-secondaire non supérieur, le 5 l’enseignement supérieur court et le 6 la licence. Cette classification permet la comparaison avec les pays nordiques sur la place de l’enseignement professionnel et le lien qu’il entretient avec l’enseignement général. Les rapports du Conseil nordique nous permettent d’éclairer notre réflexion sur l’éducation professionnelle.
Il existe une summa divisio entre systèmes éducatifs privilégiant une formation secondaire et supérieure généraliste, tels que la France et la Suède, et ceux de pays qui entretiennent une éducation secondaire généraliste et professionnelle comme l’Allemagne ou le Danemark. Plus que les référentiels de politiques publiques, ce sont les structures de l’économie qui expliquent cette différence. La France dispose de grandes firmes et d’un tissu lâche de PME ; a contrario, au Danemark, riche en PME, 75 % des apprentis sont formés dans les entreprises de moins de cinquante salariés.
Le système danois est dual. Il existe une voie professionnelle autonome empruntée par 38 % des jeunes à partir de quinze ans qui se répartissent pour une période de deux à quatre ans dans divers secteurs. Deux tiers de la formation est consacrée à la pratique en entreprise. La gouvernance de ce système est partagée entre les partenaires sociaux, qui assurent la formation pratique, et l’État, qui finance la partie scolaire et définit le cadre juridique. La voie professionnelle offre aux jeunes un taux de chômage et une rémunération comparables à ceux des travailleurs expérimentés.
Les systèmes éducatifs nordiques nous ouvrent des pistes de réflexion. En Suède et en Finlande, les partenaires sociaux déterminent les programmes dans le cadre de conseils consultatifs associés aux ministères de l’Education, pour qu’ils soient en phase avec les besoins de l’économie. La qualité de ces formations est due à un système de passerelles entre formation professionnelle et enseignement secondaire. Les pays du Nord expérimentent actuellement des programmes qui permettent aux jeunes de lier formation professionnelle et généraliste (projet EUX au Danemark). Les jeunes peuvent aussi tester les différentes voies professionnelles avant de choisir celle qui leur convient. Le droit à l’erreur est intégré dans la formation. En Norvège, le programme « Y-veien » permet d’établir une passerelle pour que les titulaires d’un diplôme professionnel puissent retourner à l’université.
De plus, au Danemark, les jeunes chômeurs de 18-25 ans ont accès à la formation professionnelle financé par les fonds publics de la politique de l’emploi. Les plus de 25 ans disposent également d’une formation qualifiante qui peut être complétée par une formation plus théorique.
Les pays nordiques ont fait de la souplesse leur force. L’articulation entre les niveaux 3 à 6 de formation du CITE est privilégiée par rapport à la stricte articulation entre les différentes tranches d’âge. Cette articulation permet de mieux accompagner l’insertion professionnelle.