Cycle israélo-palestinien : rencontre avec Avishay Braverman

La Fondation Jean-Jaurès a reçu Avishay Braverman, membre du parti travailliste israélien et actuel ministre des minorités, pour une journée de débats et de rencontres avec des responsables politiques.

Proche du camp de la paix, il a confirmé son intention de se porter prochainement candidat à la direction du parti travailliste contre Ehud Barak, et annoncé que si les négociations avec les Palestiniens restaient bloqués par l’intransigeance de Netanyahou sur la question de la colonisation, les travaillistes quitteront la coalition. La rencontre organisée par la Fondation Jean-Jaurès avec un membre du gouvernement israélien, à un moment où les nouvelles négociations avec les Palestiniens une fois de plus s’enlisent, présentait un intérêt politique évident. Qu’Avishay Braverman, ministre travailliste, ait accepté de participer à un gouvernement de Benjamin Netanyahou, en cohabitation avec le leader d’extrême droite Avigdor Lieberman, appelait à d’autres séries de questions. Qu’enfin, ce soit le portefeuille du ministère des Minorités – c’est à dire, en français courant, des Arabes israéliens – que détienne l’invité de la Fondation Jean-Jaurès [1] achevait de susciter à tout le moins la curiosité. La présence de plusieurs anciens ministres, de parlementaires et de nombre de spécialistes, soulignait la pertinence et l’enjeu politiques de ce débat.L’exposé introductif d’Avishay Braverman fut net et clair : le mouvement pour la paix est en ce moment en difficulté. Etre au gouvernement donne une chance de peser sur les négociations. Celles-ci doivent avoir pour objectif l’existence de deux Etats, aux frontières élaborées à partir de la ligne verte de 1967 et comportant des engagements de sécurité conjoints. L’inclusion dans Israël de certains blocs de colonies doit recevoir des contreparties territoriales. Qu’un moratoire sur la construction de nouveaux logements dans les colonies doit être accepté constitue une question mineure par rapport aux enjeux. Imposer aux Arabes israéliens des obligations spécifiques comme un serment est une erreur. Il faut reconstruire un nouveau parti travailliste.Sur le fond des négociations, cette intervention appelait peu de contestation, tout au plus des demandes de précisions : que peut-on espérer du président Obama ? Quel rôle peut jouer l’Union européenne ? Peut-on obtenir une issue favorable avec les institutions israéliennes actuelles, qui donnent un pouvoir de blocage aux partis religieux les plus extrémistes ?Sur la situation politique elle-même, les questions posées furent par contre sans concession : n’avez vous pas l’impression que la politique de Netanyahou est simplement de gagner du temps pour poursuivre la politique de colonisation ? Comment ne pas comprendre que l’introduction du concept d’ « Etat juif » ne peut que durcir les positions des interlocuteurs, des Arabes israéliens et, même en Europe, provoquer des réactions négatives dans des milieux très différents ? Ne pensez vous pas que Netanyahou utilise le réel danger que représente pour Israël et pour le monde le régime iranien pour faire passer au second plan le conflit israélo-palestinien ? Ne croyez vous pas que la solution de ce conflit serait la meilleure façon de réduire l’influence d’Ahmadinedjad ?Sur cette partie plus difficile, les réponses de fond furent à nouveau nettes et claires : Netanyahou comprend intellectuellement la situation mais a peu de temps pour montrer qu’il a l’envergure pour en tirer les conséquences. Israël doit être l’Etat des juifs mais non un Etat juif. Il faudra changer notre Constitution. Contenir l’Iran suppose une coalition des Etats-Unis, de l’Union européenne, d’Israël et de ceux qu’on appelle les Etats arabes modérés : cela suppose des avancées décisives des négociations en cours, pourquoi pas en acceptant comme une de leurs bases la proposition de ces derniers Etats ?Au terme de cette rencontre, il pouvait être légitime de s’interroger : si la politique d’Israël était effectivement celle qu’ Avishay Braverman présente comme souhaitable, la situation au Proche Orient deviendrait-elle pour autant immédiatement différente ? Mais y a-t-il la moindre chance que l’actuel Premier ministre fasse sienne une telle politique ? Pour conclure, on citera ici Avishay Braverman : « Il vaut mieux avoir essayé et échouer que ne pas avoir essayé ». Soit. Mais essayer jusqu’où et jusqu’à quand ?[1] Cette rencontre est la première d’une série relative au conflit israélo-palestinien qui se déroulera sur plusieurs mois avec des invités des deux bords.

Ils en parlent
  • Reuters
  • Afp

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